Même quand l’Histoire avance, il nous arrive de ne pas toujours en distinguer les séquences. Nous sommes entrés dans ce mois des douleurs où il nous arrive souvent de pleurer séparément, parfois en union, deux morts illustres de notre Panthéon national. Il y a 46 ans en effet, le Président Marien Ngouabi et le Cardinal Emile Biayenda étaient assassinés à quatre jours d’intervalle l’un de l’autre.
Depuis lors, quand arrivent le 18 et le 22 mars, il nous faut puiser en nous pour garder notre sang-froid et chercher le sens de ces morts infligées, subies et finalement acceptées au bout des années. En citoyens et/ou en chrétiens. Car il nous faut poursuivre notre chemin et consolider nos efforts pour bâtir ensemble une Nation. Le chemin est encore long pour un Congo vraiment uni et apaisé, mais nous avons tenu jusqu’ici, il n’y a pas de raisons que nous n’y arrivions pas.
En citoyen, le Congolais vit à côté de la réalité de cette construction. C’est-à-dire que son action, sa militance, ses aspirations ne s’encadrent plus dans l’idéal révolutionnaire d’il y a 46 ans. Ni les PND, ni les objectifs multiples vers une quelconque émergence ne s’inspirent des idéaux de Marien Ngouabi. Et la vérité commande de dire que même au sein du parti politique qu’il fonda, la référence au fondateur ne se fait plus qu’a minima.
En Eglise, la prière pour l’aboutissement de la cause de béatification du Cardinal Biayenda est incessante. Nous nous en remettons à l’immanence. Mais nous peinons à nous saisir des nombreuses et éblouissantes recommandations contenues dans ses exhortations épiscopales. Au point que les veuves sont toujours maltraitées contrairement à ce qu’il prônait, et que nous continuons à errer des églises vers les temples et les lieux de croyances les plus aux antipodes de nos convictions chrétiennes.
Le Congolais n’a pas fondamentalement changé depuis 1977. Mais en est-on bien sûr? Déjà, même le communisme sur lequel nous marquions nos différences n’existe plus. Il n’est plus la raison de nos démarcations entre «eux» et «nous». Il n’y a plus d’un côté les communistes et de l’autre ces rêveurs de «prieurs». Pire, des ministres sont devenus Pasteurs, chose impensable hier. Donc, le Congo change bien et nous avec lui.

Albert S. MIANZOUKOUTA