Shanghai Ranking Consultancy vient de publier l’édition 2020 de l’Academic Ranking of World Universities. L’Afrique place 16 établissements dans le Top 1000 des meilleures universités du monde dans cette 18e édition de l’ARWU et la suprématie de l’Afrique du Sud et de l’Égypte se confirme (cf. tableau). La présence de ces deux pays dans le classement est devenue une habitude.

Avec 9 établissements dans le Top 1000 de l’ARWU 2020 dont 4 dans le Top 500 et 5 dans le Top 500-1000, l’Afrique du Sud assoie son rang; elle conforte même son statut en y plaçant un nouvel établissement, l’Université de Rhodes qui intègre le classement 2020 au 953e rang. Deux universités du pays sont même classées dans le Top 300 de l’ARWU 2020:
– l’Université de Cape Town 260e en 2020 et 259e en 2019:
– l’Université du Witwatersrand 288e en 2020 et 286e en 2019.
L’Égypte place 5 établissements, dans le Top 1000 dont un, l’Université du Caire (407e rang) dans le Top 500. Cependant il faut noter que l’Université Beni-Suef qui apparaissait au 909e rang dans l’ARWU 2018 est sortie du classement en 2019 tandis que l’Université Zagazig qui y a fait son entrée dans le classement 2019 au 1000e a gagné une place en 2020 en se classant 999e.
La Tunisie, avait placé 2 établissements en 2018: l’Université de Tunis El Manar (872e) et l’Université de Sfax (892e). Depuis 2019, l’Université de Sfax est sortie du classement. L’Université de Tunis El Manar n’est plus que l’unique établissement francophone d’Afrique classé dans l’ARWU; il est classé au 972e rang en 2020 contre 892e rang au 2019.
Enfin l’Éthiopie fait son entrée dans l’ARWU 2020 avec Addis Ababa University qui se classe au 802e rang.
La présence de l’Afrique du Sud et l’Égypte dans l’ARWU 2020 est une confirmation du niveau et de la qualité des établissements d’enseignement supérieur de ces deux pays parmi l’élite mondiale. Par contre la sortie de l’Université d’Ibadan du Nigeria et Makerere d’Ouganda, deux établissements de «renommée» en Afrique est une véritable déconvenue. Le Nigeria avait réussi à placer l’Université d’Ibadan dans le classement 2019 au 976e rang; l’établissement ne figure plus dans l’ARWU 2020. De même l’Université de Makerere d’Ouganda présente dans l’ARWU 2018 au 936e rang ne figure plus dans le classement depuis 2019.
Le classement de type ARWU est une sorte de hiérarchisation des établissements d’enseignement supérieur et de recherche de la planète, en fonction de leur capacité à attirer des talents et à produire de nouvelles connaissances par le nombre de publications ou de citations pour déterminer la qualité de la recherche.
On ne peut que déplorer l’absence d’universités d’Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud) dans le classement. Celles-ci, pour plusieurs raisons, peinent à sortir l’enseignement supérieur et la recherche en Afrique d’une situation lamentable et fâcheusement honteuse. Parmi les dysfonctionnements on peut citer: des infrastructures peu adaptées ou mal entretenues; des mécanismes de financement inefficace et peu transparents; une politique de recrutement qui n’attire pas les talents ou au mieux les découragent; la faible gouvernance des institutions de formation et la gestion du personnel enseignant; la politique de la recherche sans moyens et sans liens avec la demande sociale; la faible communication pour les francophones (difficulté de communiquer en anglais, langue utilisée par les revues scientifiques de renommée internationale); la corruption sous toutes ses formes et le trafic d’influence; la délivrance des diplômes et des titres de complaisance et l’absence d’évaluation et d’une culture de la performance.
Plusieurs voix ne cessent de dénoncer la faiblesse des systèmes nationaux de formation, de recherche et d’innovation depuis plusieurs années; mais hélas, sans succès faute de vision politique sur l’importance du capital humain comme base de développement.
L’une des stratégies pouvant permettre aux universités africaines d’améliorer leur production de recherche serait l’amélioration de leur réponse à la demande sociale des savoirs et des savoir faire. L’université africaine consacre ses efforts uniquement à la mission de formation; elle délaisse le lien entre les missions de recherche et les attentes sociales ou des entreprises. Ce qui explique la faiblesse relative du nombre de publications et de leur qualité.
Une telle stratégie ne peut voir le jour que si la vision politique intègre véritablement la formation et le capital humain dans la stratégie de développement en lui donnant une importance bien supérieure à celles des ressources naturelles qui alimentent et entretiennent des comportements de prédation. En revalorisant le capital humain et les institutions de formation, on pourrait ainsi actionner un certain nombre de leviers parmi lesquels la coopération internationale et les partenariats avec le secteur privé.
C’est au prix d’une crédibilité, du sérieux organisationnel, de l’appui politique et d’une stratégie SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, Temporelle) que les universités africaines francophones vont prétendre se positionner sur l’échiquier international et libérer les braves enseignants compétents des frustrations insupportables.