Les décès dûs au paludisme dépasseront de loin ceux causés par la pandémie de COVID-19 en Afrique subsaharienne, alerte l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon l’organisme onusien, la perturbation du traitement de la malaria causée par la pandémie de coronavirus pourrait entraîner des dizaines de milliers de décès dus au paludisme.

L’OMS craint que même des perturbations modérées dans l’accès au traitement ne conduisent à des pertes de vies humaines considérables. Dans les scénarii les plus optimistes, une interruption de 10 % de l’accès à un traitement antipaludéen efficace en Afrique subsaharienne pourrait entraîner 19.000 décès supplémentaires.
Si l’accès aux soins diminue de 15%, 28.000 décès supplémentaires devraient être observés. Des interruptions de 25 % et 50 % dans la région pourraient entraîner respectivement 46.000 et 100.000 décès supplémentaires.
Les lacunes en matière d’accès aux outils vitaux sapent les efforts mondiaux visant à enrayer la maladie, et la pandémie devrait faire reculer la lutte encore davantage. «Selon nos estimations, en fonction du niveau de perturbation des services (due à la COVID-19), il pourrait y avoir un excès de décès dûs au paludisme de l’ordre de 20.000 à 100.000 en Afrique subsaharienne, la plupart d’entre eux chez les jeunes enfants», avait déclaré Pedro Alsonso, directeur du programme de lutte contre le paludisme à l’OMS, au cours d’un point de presse en 2020.
«La COVID-19 menace de faire encore dérailler nos efforts pour vaincre le paludisme»
Depuis, les effets de la pandémie sur les soins et la prévention ont pu être atténués malgré les perturbations sur l’approvisionnement. «Des dizaines de milliers de personnes ont été sauvées», avait précisé M. Alonso. En 2020, la COVID-19 est finalement apparue comme un défi supplémentaire à la fourniture de services de santé essentiels dans le monde entier.
Pourtant, la plupart des campagnes de prévention du paludisme ont pu progresser en 2020 sans retard important, selon un rapport de l’OMS. Contrairement à d’autres campagnes, celles de prévention contre le paludisme n’ont pas été freinées par la pandémie de COVID-19 pour l’heure. Mais, «la COVID-19 menace de faire encore dérailler nos efforts pour vaincre le paludisme, et en particulier de traiter les malades», a déclaré le Dr Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.
«En dépit de l’impact dévastateur de la COVID-19 sur les économies africaines, les partenaires internationaux et les pays doivent faire plus pour s’assurer que les ressources nécessaires sont disponibles pour développer les programmes anti-malaria qui font une telle différence dans la vie des gens», a-t-elle poursuivi.
Le paludisme a fait près de 409.000 morts en 2019
Les progrès dans la lutte contre le paludisme continuent à plafonner, en particulier dans les pays africains où la charge de morbidité est élevée. «Il est temps que les dirigeants de toute l’Afrique – et du reste du monde – de se mobiliser une fois de plus pour lutter contre le défi du paludisme», a déclaré Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS. Avant d’ajouter: «En agissant ensemble et en nous engageant à ne laisser personne en chemin, nous pouvons arriver à notre but commun: éradiquer le paludisme dans le monde.»
En 2019, le nombre d’infections nouvelles tournait autour de 229 millions de personnes. Un nombre relativement stable ces quatre dernières années. Au total, le paludisme a fait quelque 409.000 morts en 2019, contre 411.000 en 2018.
En 2019, quatre pays ont concentré près de la moitié de tous les cas dans le monde: le Nigéria (27%), la République démocratique du Congo (12%), Ouganda (5%) et le Mozambique 4%. La région africaine a supporté ainsi, comme dans les années précédentes, plus de 90 % de la charge de morbidité globale. Mais depuis 2000, la région a réduit de 44 % le nombre de décès dus au paludisme, lequel est passé d’environ 680.000 à 384.000 par an.

Gabriel MALONGA
MBEMBA