Les relations entre la RDC et le Congo semblent au beau fixe. Pour deux pays qui ont en partage une grande partie des langues les plus fréquemment usitées chez l’un et chez l’autre, les choses sont ce qu’elles devraient être. Les ministres des deux pays se tutoient, se donnent l’accolade, les présidents des deux pays sont toujours dans une relation de papa à fils quand ils se rencontrent. Leurs échanges se font en lingala, et semblent d’affection.
Mais ces apparences ne sont pas d’aujourd’hui. Et, comme toutes les apparences, elles ont parfois servi à alimenter les méfiances et les suspicions. Par beau temps, la fraternité est célébrée ; les «deux capitales les plus rapprochées du monde», Kinshasa et Brazzaville, savent magnifier, y compris par des chansons, la singularité de leur positionnement géographique. Pourtant, il suffit d’un coup de grisou pour que tout s’embrase, et le Congolais de RDC redevient « le Zaïrois » à Brazzaville, et la République du Congo est reléguée au statut de « petit Cong».
A ces zig-zags sémantiques, savent correspondre aussi des phases de tensions politiques, et même de guerre comme le témoigne le conflit qui enflamma les armées des deux pays en 1976 à propos de l’Ile Mbamou (ou Mbamu, suivant la rive du fleuve Congo d’où l’on écrit!). Les crises politiques de la République du Congo (surtout) ont eu leurs répercussions en République démocratique du Congo, soulignant à quel point la souveraineté chez l’un et chez l’autre peut aussi avoir des répercussions déstabilisantes.
Aussi n’est-il nullement sage de se lancer dans une énième course à l’invective, par médias et réseaux sociaux interposés, sachant qu’un nationalisme blessé peut se donner tous les prétextes pour la surenchère. Le Président de la République insulté ? Il n’y avait sans doute pas mieux à faire que ce qui a été fait : la grandeur de la fraternité se mesure aussi à subir les coups sans en rendre. Dans ce sens, tout le tintamarre orchestré à Brazzaville sur cette question, par des journalistes, s’est avéré pure flatterie. Tout comme le côté zen du ministre Ngakosso lors du discours du Président Tshisekedi au sommet des 3 bassins tropicaux à Brazzaville doit être souligné.
Aucun de nos deux pays ne gagnerait à se battre le flanc en proclamant : «Nous sommes les plus riches, les plus sages, les plus grands, etc… ». Les revers de fortune guettent aussi les Nations flamboyantes. Le Président Tshisekedi avait taxé de tribalisme le fait pour le Congo de nouer des relations avec le Rwanda. Un autre a «réduit» cela à de la «simple xénophobie» : ni l’un, ni l’autre terme n’est adapté pour décrire la complexité de notre fraternité. Comme dans toute bonne famille.

Albert S. MIANZOUKOUTA