Nous avons trop souvent tendance à oublier que nous sommes toujours les étrangers de quelqu’un. Quoique l’on fasse, quelle que soit la beauté de notre pays, il nous viendra toujours, un jour, l’envie de nous dégourdir les jambes chez le voisin. Sur les 342.000 Km² de notre souveraineté, il y aura toujours des coins auxquels nous nous cognerons, des encoignures qui nous donneront à voir par-dessus le muret. Parce que, étranger, on peut l’être, mais on ne peut pas le demeurer. En principe.
Les événements de Ouesso où toute une ville s’est emportée contre la communauté des Camerounais ne sont pas à souhaiter. Pas plus les raisons qui ont suscité ces révoltes que les révoltes elles-mêmes ne sont à souhaiter et à répéter. Les Camerounais sont généralement chez eux à Ouesso ; lorsqu’ils débordent, c’est le travail de la police de les ramener à la raison. Saccager des maisons, piller, brûler ne règlent nullement un problème de coexistence ni ne ramènent un mort à la vie. Se venger en tant que Nation, c’est nous condamner au jeu de la barbichette, parce qu’aujourd’hui c’est lui, demain ce sera moi.
Qui de nous renoncera à aller au Cameroun? Ntam et Souanké sont à un jet de cailloux l’une de l’autre. Les populations des deux pays vivent généralement en harmonie. Les énervements de part et d’autre sont allés rarement à la dimension de ce qu’ils ont atteint le week-end dernier. D’où l’invite à la retenue ; à ne pas jouer avec les allumettes en flattant un égo national qui n’existe pas qu’à Ouesso.
Il faut d’autant plus faire attention que nous vivons une atmosphère délétère avec l’affaire des terres vendues aux Rwandais, une autre communauté avec laquelle nous entretenons des relations qui auraient pu être sereines. Seulement voilà : avec notre voisin géant qui ne cesse d’accuser Kigali – avec quelques raisons – , d’attiser la rébellion à l’est du pays, il n’y a pas de relations avec le Rwanda qui ne soient pas suspectées de nuire, peu ou prou, à Kinshasa. Dilemme apparent : lequel des deux frères privilégier ?

Albert S. MIANZOUKOUTA