Artiste congolais multidisciplinaire, Bertin Dzangué est conteur, crieur, griot, poète, comédien et s’essaie également au roman. Il dit avoir hérité sa démarche artistique de feu l’écrivain Antoine Létembet Ambily. Ses débuts dans le métier de griot partent d’une histoire humanitaire. Il s’était retrouvé à Kinshasa, en République Démocratique du Congo, au camp des refugiés, pendant la guerre du 5 juin 1997. Dans ce camp, il constatait que les enfants étaient là, malheureux et abandonnés à eux-mêmes. Il avait donc pensé organiser, sur autorisation de l’UNICEF, des soirées de contes qu’ il animait trois jours dans la semaine.

Arrivé à Kinshasa, il fera partie de la compagnie de théâtre ”Les Intrigants”, dans laquelle il faisait la même chose qu’à Kinkolé. Rentré à Brazzaville, il est appelé par des amis, étant donné qu’il n’était pas encore préparé au théâtre, il va se faire remorquer par l’artiste Loukaya Lua Ndouenga pour devenir comédien. Peu après, il représentera le Congo aux 4es Jeux de la Francophonie au Canada, et à la biennale de la langue française en tant que pionnier de cette langue. De là, pendant douze ans, il ne vivra que de l’art en échangeant son expérience avec ceux qui étaient mieux outillés que lui.
Bertin Dzangué est un artiste qui est au centre de tout. Les thèmes qui reviennent souvent dans ses interprétations portent sur l’homme dans ses droits; les conflits inter-hommes; le racisme; la discrimination à l’endroit des êtres vulnérables et la sensibilisation à la citoyenneté; l’appel à l’amour; la motivation des jeunes; l’encadrement par la voix, le texte ou par le message. Il aborde presque tous les thèmes et aucun ne lui est étranger. Tout est en lui, et comme il aime à le dire, ”l’intelligence est dans l’air”.
Comme modèles, il y a son grand-père qu’il cite souvent lorsqu’il chante en langue. Il pense également à sa mère, à ceux qui l’ont précédé. Il aime bien Tchicaya U’Tamsi et pense à Sony Labou Tansi. Mais, il a le sang d’Antoine Létembet Ambily, aime-t-il dire à ceux qui veulent l’écouter. C’est son père, et techniquement son oncle. Mais, le jour où Letembet Ambily a suivi pour la première fois son passage à l’émission «Autopsie» sur la chaîne de télévision DRTV, il s’est exclamé:
«Ah, enfin j’ai un héritier!». Bertin Dzangué se permet de dire qu’il a hérité cela de Létembet Ambily. Mais, celui qui l’a beaucoup plus encadré c’est Jean-Blaise Bilombo Samba. Pour le reste, il croit en Dieu. Ce n’est donc pas lui seul qui amène les gens à se lever, mais aussi ceux qui sont là.
De la façon exceptionnelle de contextualiser ses textes, estime-t-il, il se nourrit de sa truelle, le bon menuisier de son rabot et un bel artiste de son art. Bertin Dzangué est condamné à l’excellence. Il se rappelle qu’un jour, en voyant sur scène son aîné Ngampika Mpéré, son précurseur couvert de raphia, il se disait, ”si je pouvais faire comme lui, ce serait bien”. Donc, il n’est pas en train de réinventer la roue, il fait ce que les aînés ont fait avant lui, mais qui est différent de ce qu’il fait.

Alain-Patrick
MASSAMBA