C’est samedi dernier que Bernard Mackiza a fêté, dans la joie et l’affection des proches, ses 90 ans de vie. C’est une grâce. C’est une bénédiction. Une invite à toute notre profession dont La Semaine Africaine commence à faire figure d’ancêtre au Congo. Or Bernard Mackiza, deuxième rédacteur-en-chef de notre journal, est passé allègrement au rang d’ancêtre. Un titre qu’il porte avec dérision, toujours le sourire aux lèvres et l’évocation toujours près. Sans toutefois se prendre pour un donneur de leçons, qu’il mériterait bien pourtant d’être.
90 ans, dont 60 à noircir du papier, à peaufiner les écrits (des autres le plus souvent), à chercher la meilleure manière de traduire les pulsions du monde au monde, à dire à nos contemporains que ce qui est mauvais est mauvais (alors que notre monde est plus porté vers le croustillant et le saignant), à ne pas céder à la tentation de ce qui plait et non de ce qui est vrai. Ou à le tourner de sorte qu’il le soit par la force. Ce n’est pas facile, surtout dans nos pays. Bernard Mackiza a traversé les époques.
Il a vu venir, avec le Père Jean Legall, fondateur de ce journal en 1952, les bonheurs et les malheurs qu’annonçaient les indépendances. Il a vu se transformer des révolutionnaires fougueux en prédateurs des économies de leurs propres pays, avec interdiction formelle de les dénoncer. Il a vécu avec dégout les séances d’égorgements des fils d’une nation prometteuse par d’autres fils à la gâchette ou au couteau faciles. Pendant 60 ans de sa vie, il a vu fondre les espoirs du renouveau et toujours puisé dans sa foi catholique pour se relancer au nom du devoir de soutenir les autres.
Nous avons eu en Bernard Mackiza la bibliothèque vivante de la presse au Congo, la mémoire de ce qui a été, et de ce qui devrait être. Gloire à Dieu de nous avoir donné un patriarche qui nous aide à confronter par son expérience ce que le journalisme a été, et ce qu’il sera. Surtout, il le raconte lui-même ; on ne le raconte pas pour lui. C’est véritablement une bénédiction.

Albert S. MIANZOUKOUTA

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici