L’abbé Armand Brice Ibombo, secrétaire général de la Conférence épiscopale du Congo, a publié chez L’Harmattan un important ouvrage sur l’institution des évêques portant sur ses cinquante ans d’existence. C’est un livre fort riche en informations mettant au grand jour les prises de position des évêques congolais sur les problèmes socio-politiques.

Le texte comprend une partie historique et surtout les messages et déclarations des évêques.

1/ L’historique
L’histoire rappelle la mission des Capucins dans l’ancien royaume Kongo quand le roi Nzinga M’bemba devenu Afonso 1er se convertit en 1491. Plus tard, les spiritains reçurent du Pape la mission de remplacer les Capucins devenus invisibles dans le royaume.
Les premiers missionnaires s’installèrent au Gabon et plus tard au Congo en 1865, ce furent deux prélats, NN.SS. Hyppolite Carrie et Prosper Augouard qui, les premiers entrèrent dans le royaume.

La couverture du livre
La couverture du livre

Les décisions des politiques européens à la Conférence de Berlin, (1884-1885) modifièrent les contours des entités ecclésiastiques devant désormais se confondre avec les limites territoriales et les possessions coloniales.
Ainsi, Mgr Augouard devint le responsable du vicariat apostolique du Haut Congo et les premières missions virent le jour à Loango et Linzolo en 1883. Les premiers fruits de cette évangélisation furent l’ordination presbytérale de Charles Mahonde et Louis Guerlot en 1892. Et il fallut attendre 1938 pour voir deux congolais atteindre le sacerdoce. Ce furent les abbés Roch Auguste Nkounkou et Eugène Kakou.
La promotion suivante celle de 1946 comprenait les abbés Théophile M’bemba, Fulbert Youlou, Benoît Gassongo, Raphaël Dangui et Louis Loubassou.
D’eux émergèrent de grandes personnalités: Théophile M’bemba fut le premier évêque et archevêque noir du Congo, l’abbé Youlou empruntant d’autres chemins devint Président de la République (1959 à 1963). Benoît Gassongo, promu évêque auxiliaire fut sacré à Rome en 1965 pour être l’auxiliaire de Mgr Émile Verhille, évêque de Fort Rousset.
Depuis, l’Eglise du Congo connaît de l’expansion et forme neuf diocèses répartis en trois provinces ecclésiastiques: celle du Nord comprenant les diocèses d’Impfondo, Ouesso et l’archidiocèse d’Owando; la province du Centre englobe l’archidiocèse de Brazzaville, les diocèses de Kinkala et de Gamboma. La troisième province du Sud-Ouest comprend l’archidiocèse de Pointe-Noire et les diocèses de N’kayi et de Dolisie.
Les provinces sont dirigées par des archevêques métropolitains.

2/ Des messages et déclarations
Ils sont émis par la Conférence épiscopale qui se réunit deux fois dans l’année. La conférence est dirigée par un président et dispose d’un ordre de juridiction, avec un secrétaire général et des commissions épiscopales.
La mission de la conférence est d’abord pastorale. A la fin de ses travaux, elle publie des messages et des déclarations intitulées parfois «Parole d’évêque».
Parce que l’Eglise vit avec le peuple, ces messages et déclarations portent sur les problèmes de la société congolaise: la dignité humaine, le tout éclairé par le droit canon, la doctrine sociale de l’Eglise et les enseignements de l’évangile.
Une place importante est consacrée aux questions spécifiques de l’Eglise dont la gestion des biens de l’Eglise, la formation des prêtres, des séminaristes et des laïcs.
À la lecture, on relève des positions tranchées sur la vie politique et les décisions émanant des autorités. La Conférence entend éclairer leur lanterne en rappelant les principes du décalogue-du moins les trois qui peuvent entrer dans la vie sociale: Tu ne tueras point -Tu ne voleras point-Tu ne mentiras point.
Les évêques rappellent qu’ils sont des citoyens et à cet égard ont aussi à apprécier l’ordre des choses.
Les hommes politiques devraient être rassurés que les évêques ne sont pas leurs concurrents dans l’arène politique.
Au demeurant, ils fixent des règles pour la conduite des consacrées vis à vis de la politique pour les mettre en garde.
Ils sonnent le rappel:
«Il n’est point question de pousser ou de faire pression sur un prélat, un prêtre ou un religieux à se porter candidat aux différentes élections politiques». Les évêques dans leurs messages et déclarations cisèlent dans les analyses sur les pratiques des politiques tout en esquissant des approches de solutions.

Parfois, ils expriment leurs déceptions:
«Les leadeurs politiques peuvent aujourd’hui s’embrasser, se donner l’accolade, après avoir suscité des conflits. C’est tellement facile pour eux tant ils n’ont pas connu les souffrances dans leur chair et dans leur cœur. Mais pensent-ils à toutes ces familles déchirées, à tous ces foyers disloqués, à tous ces enfants désemparés?»
Les crises nombreuses ont causé la mort et la désolation et dans d’autres domaines comme la gestion du pétrole et des forêts.
Les évêques portent des analyses critiques par ce qu’ils notent peu de progrès dans la société.
La pluralité politique est mal vécue-Les richesses injustement réparties-Les diversités des langues mal vécues.

Les évêques expriment avec fermeté et finesse leur point de vue sur les violations de la Constitution dont certaines dispositions ne peuvent être modifiées mais sont malheureusement soumises à la sanction du Parlement qui entérine les initiatives du pouvoir exécutif sans broncher. Ils sont scandalisés de voir que l’on se préoccupe peu de la pauvreté du peuple pour donner plus d’importance aux mesures barrières et empêcher la célébration des messes de Noël après avoir demandé une cérémonie œcuménique pour la fin de la pandémie de la COVID 19 au Palais des congrès.
Le texte préfacé par Mgr Daniel Mizonzo est de lecture facile et aide les chrétiens à trouver des repères sur leur conduite.

Le souhait des évêques est :
«Que le droit coule comme l’eau et la justice comme un torrent qui ne tarit pas».
Voilà un excellent livre à s’approprier.

Lecas
ATONDI MONMONDJO