Il ne serait pas surprenant, dans ce Congo des miracles mathématiques, que des correcteurs, des jurys de complaisance, des examinateurs très adroits, des magouilleurs de tout acabit qui n’ont strictement rien à faire de l’avenir de notre jeunesse, nous donnent à applaudir les incongruités les plus incroyables. Nous en sommes aujourd’hui à espérer des résultats louangeurs dans tous les domaines, oubliant qu’une note, une appréciation ne s’obtiennent qu’au bout d’un travail honnête. Travail honnête + travail honnête = Nation honnête.
A trop l’oublier, nous en sommes à espérer des miracles (qui ne sont pourtant, là aussi, que la somme de beaucoup de vertus!). Dans les quartiers, les clameurs de la proclamation des résultats du Bac ne sont pas encore retombées. Nos enfants ont rempli de joyeux chœurs nocturnes l’autre soir, la découverte de leurs résultats sur les sites officiels des ministères de l’Enseignement. Quel parent ne se réjouirait pas devant la mine épanouie de son bambin, proclamant fièrement à coup de badigeons sur sa tunique qu’il est bachelier !
Quel pays ne se remplirait-il pas d’orgueil en sachant que nous comptons cette année plus de 40.000 nouveaux bacheliers ! C’est-à-dire des jeunes bien formés, prêts à prendre la relève de leurs aînés, futurs retraités qui s’angoissent déjà de rejoindre la masse des pensionnés devenus mendiants ! Car, c’est ici que se trouve le nœud de la question: nous faut-il plus de bacheliers ou moins de chômeurs? Si nous savons fabriquer des bacheliers, il semble que nous ne sachions pas éviter le flux des futurs chômeurs.
Les jeunes sont dans leur plein droit de fêter leur Bac; c’est une étape importante de leur vie. Mais nous avons le devoir d’analyser ce que cela implique. Tout au long de l’organisation de ces examens d’Etat, on nous a répétés que les épreuves étaient sécurisées, que les fraudes étaient réduites à néant. Mais dans une Nation qui triche toujours, blinder et fortifier une malle porteuse des matières d’examen n’a aucun sens. Tout comme se montrer sévères (ou «souples») à la correction. C’est tout au long du processus que nous sommes appelés à veiller: sur les élèves, les surveillants, enseignants, les enseignements…
Placer un goulot d’étranglement en aval d’un processus, c’est tout simplement tuer la jeunesse. Et donc encourager la fraude. Avant d’exiger d’un élève qu’il rapporte une note élevée en mathématiques, assurons-nous d’abord que les maths lui ont été enseignées ! Que l’enseignant ne s’est pas contenté de lui soutirer de l’argent pour quelques polycopiés muets et non didactiques. Ce n’est qu’ainsi que nous éviterons de donner des notes de 20 sur 10 à nos enfants.
Nous attendons du FMI qu’il nous accorde «notre prêt», mais nous oublions les étapes préparatoires que ce miracle devrait ignorer: l’approximation de notre gestion, la légèreté de nos mains face aux deniers, l’oubli rapide des engagements prononcés aussitôt obtenu ce que nous réclamons etc… On peut faire le pari que le jour béni où le FMI cessera de s’agacer de notre trop grande distraction, nous ferons fête. Pour replonger dans l’insouciance le jour d’après grâce à la facilité élargie de crédit enfin obtenue. 20 sur 10, nous savons faire, mais pas l’inverse.

Albert S. MIANZOUKOUTA