‘’La création théâtrale au Congo: quel avenir?’’, ce thème évocateur a fait l’objet d’un échange, il y a quelques semaines à Brazzaville, entre des artistes pratiquants du théâtre et des cadres du département en charge de l’Industrie culturelle. (Nous revenons sur cet échange à la demande des lecteurs).

L’artiste Alphonse Mafoua a parlé de la création du théâtre congolais depuis ses origines, notamment du CFRAD et de la création des cercles culturels de Poto-Poto et de Bacongo. Mais également, des grandes troupes et acteurs qui ont fait la pluie et le beau temps de ce théâtre, de ses moments forts et faibles, ainsi que de ses avancées et de son apport dans l’évolution culturelle du Congo.
S’agissant des méthodes que les metteurs en scène mettent en place pour une création, il a souligné que pour qu’on arrive à la création théâtrale, ‘’il faut comprendre le processus qui emmene à cette création. Il existe deux possibilités: l’envie de travailler sur un sujet précis ou sur une situation précise, et à partir de ce moment-là on commence à écrire le texte. Puis on fait le casting des acteurs, et en même temps, il faut savoir qu’une création nécessite des moyens. En général, quand on a fait le choix du sujet sur lequel on peut travailler, il faut savoir combien cela peut coûter… Mais, pour avoir des bonnes créations il faut se structurer’’.

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«Pour faire du théâtre en Afrique et au Congo, il faut boxer la situation», dixit Emeraude Kouka

Pour être auteur, a-t-il expliqué, ‘’il faut d’abord aimer le travail d’écriture. Cela naît en soi et on le développe. Une fois qu’on est auteur on commence à écrire, il y a deux circuits qui permettent de se perfectionner ou de faire avancer son travail, les ateliers d’écriture qui permettent aux auteurs aguerris d’accompagner les jeunes auteurs qui veulent se perfectionner et avoir plus de connaissances. Au Congo, il
n’existe pas de lieux de résidence, ni d’accompagnement, pour l’avenir du théâtre, il faut créer ces résidences d’écriture’’.
A propos, du pragmatisme, le conseiller aux Arts et des Lettres, de la ministre en charge de l’Industrie culturelle, M. Emeraude Kouka, a salué ‘’tous les efforts des opérateurs culturels qui, avec très peu de moyens, réussissent à réaliser des choses. Il y a des salles de spectacles, mais il y a des festivals comme Mantsina sur scène qui se débrouillent tant bien que mal. ll y a aussi le manque de résidences d’écriture, il y a Bill Kouelany avec les ateliers Sahm qui propose des résidences aux artistes. Ce sont des gens qui «boxent» la situation’’, a-t-il assuré.
Les pouvoirs publics, a-t-il reconnu, ‘’ont un grand rôle à jouer. Le rôle principal d’un ministère de la Culture c’est de créer un environnement qui soit propice à la pratique artistique. Et cela passe par la formation aussi bien des artistes, que des promoteurs culturels ; c’est une chose qu’il faut inculquer aux Congolais. Les Congolais investissent rarement pour soutenir la création. Il y a aussi un problème culturel, un problème de mentalités. Etre artiste, ce n’est pas seulement faire de la création ou monter sur scène, être artiste c’est également être un produit et savoir se vendre. Le problème n’est pas de ressasser ce qui ne marche pas, mais quelles sont les solutions qu’on envisage sur le plan personnel et sur le plan collectif’’.
La démarche, a-t-il expliqué, ‘’doit devoir converger vers l’idée d’un changement des mentalités, inciter les entrepreneurs à comprendre qu’on investit dans la culture, et quand les gens le sauront, peut-être que les artistes aussi arrêteront de penser qu’un ministère de la Culture est fait pour donner de l’argent…’’

Alain P.
MASSAMBA