De retour dans son diocèse dont il est devenu l’administrateur apostolique, Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou s’est confié à «sa» radio, «Radio Mayombe Ndinga Ya katolika». Monseigneur est resté absent du Congo pendant trois mois; il est rentré par Pointe-Noire le 22 avril dernier et s’est arrêté à Dolisie.

*Vous avez disparu pendant trois mois, que s’est-il passé?
**J’ai effectivement physiquement disparu pendant près de trois mois. Ce déplacement que vous avez appelé «disparition» avait comme objectifs à la fois un bilan médical et un séjour pastoral prévu de longue date.

*Chez nous, on ne parle pas de la maladie des responsables. Mais oserais-je vous demander ce que vous aviez eu exactement?
**Cher ami, les secrets finissent toujours par se faire connaître. D’ailleurs, le Christ nous dit en Luc 12, 2-3 qu’il n’y a rien de caché qui ne doive être découvert, ni de secret qui ne doive être connu. Il ajoute que tout ce qu’on dit dans les ténèbres sera entendu dans la lumière, et ce qu’on vous aura dit à l’oreille dans les chambres sera prêché sur les toits. C’est dire que jouer au secret ne sert à rien. Plusieurs fidèles m’ont vu à la messe ou dans la cour de Saint-Paul ou encore dans les rues de Dolisie quelques jours avant ma fameuse disparition. Il est normal que des questions surgissent. Pourtant, après quarante ans d’âge, l’humain est appelé à la vigilance. Vous savez aussi qu’un relâchement corporel exige parfois une mise à jour. C’est ce qui s’est fait. Par la grâce de Dieu, et bien sûr, par l’intervention puissante de Notre Sainte Mère du Ciel, j’ai rejoint notre diocèse.

*Excusez-moi, Monseigneur, il a été dit que vous avez, en réalité, été évacué par avion médicalisé. Est-ce vrai?
**Ah bon? Cette question est un train qui en cache un autre, pour ne pas dire qu’il y a anguille sous roche… Je vous repose la question: avec quel argent? Je n’en ai pas les moyens, notre diocèse non plus. Et même si c’était possible, cela n’aurait pas été nécessaire. De toutes les façons, le citoyen lambda a de l’imagination. C’est juste vous dire que j’ai pris un vol normal. La suite a été l’œuvre de la Divine Providence.

*Monseigneur, avant votre absence, beaucoup de choses se sont dites sur la prise de position des évêques par rapport aux élections. Que pensez-vous de ces critiques?
**Je voudrais d’abord préciser que je ne suis pas le porte-parole des évêques. Il y a un élu pour ce rôle. Mais je peux humblement donner un avis, puisque vous me posez la question, pourvu que mes propos ne fassent pas polémique (rire)… Il est normal qu’il y ait des critiques, même si elles sont dures. Mais aller jusqu’à insulter, c’est simplement inacceptable. Mais n’en faisons pas un drame non plus. Jésus Lui-même que nous prêchons a subi pire et a averti Ses disciples sur les épreuves à venir: «Si l’on a traité ainsi le bois vert, qu’adviendra-t-il du bois sec?» (Lc 23, 31).

*Mais l’intervention des évêques n’était-elle pas une erreur de terrain?
**Non, mon frère. Absolument pas! Nos interventions entrent dans la droite ligne des Saintes Ecritures et de la tradition de l’Eglise catholique. C’est donc ni la première fois, et ce ne sera pas non plus la dernière. Cela dépend de chaque contexte, de chaque réalité. Et c’est justement le terrain qui dicte nos interventions. Vous comprenez donc que nous sommes fidèles à la tradition reçue de l’Eglise. C’est le silence qui étonnerait, car Episcopè en grec signifie surveillant.

* Comment, surveillant?
**Oui, vous l’avez bien entendu: surveillant. Qu’est-ce qu’un surveillant? Eh bien, c’est un guetteur, une sentinelle, un veilleur, dans le sens du berger qui veille sur le troupeau afin d’éviter toute infiltration mortifère. L’évêque a donc aussi ce rôle de prévenir. Quoi qu’on dise, l’évêque est la conscience prophétique de la société, il ne peut déroger à cette mission, ainsi a-t-il été formaté, il n’y peut rien.

*Décidément, être évêque c’est porter une lourde responsabilité. Enfin, disons simplement que la foi en Jésus-Christ est lourde de conséquence!
**Ne réduisons pas les concepts «lourdes responsabilités» à la charge des évêques. Toute mission reçue comporte une responsabilité. Et elle est de plus en plus importante selon les dimensions. Par contre la foi en Jésus Christ, que Jean 14, 6 présente comme le Chemin, la Vérité et la Vie, demande aux baptisés un effort supplémentaire, qu’on appelle la foi en la Transcendance, en l’Invisible.

*Depuis 2013, le diocèse de Dolisie organise une grande procession mariale dans la ville de Dolisie et elle prend de l’envergure. L’an dernier, elle a tenu son pari, mais en mode confinement, car il n’y avait pas de marche à pied comme les autres fois. Qu’en sera-t-il cette année?
**Oui, le mois de mai, est un mois spécial pour le diocèse de Dolisie. A notre actif, sept processions déjà. Nous ne dérogerons pas à ce qui est devenu une tradition. Les deux premières processions étaient consacrées au Saint-Sacrement. Depuis 2015, la Vierge Auxiliatrice, Patronne du diocèse de Dolisie a pris le relais. Et cette année, ce sera le 30 mai. Nous continuerons en «mode confinement» pour respecter les gestes barrières. Autrement dit, la procession sera motorisée. Seuls les véhicules et les motos parcourront les artères de Dolisie. Les fidèles recevront les faveurs de notre Sainte Mère en restant devant leurs maisons.

*Quel sera le thème de la Procession?
**Nous faisons nôtre le thème voulu par le Pape François pour ce mois de mai 2021: prière pour mettre fin à la COVID-19, sans oublier la paix et l’unité nationale. Car, mises à part ses apparences carnavalesques qui lient l’utile à l’agréable, notre Procession est d’abord et avant tout une prière au Très-Haut.

*Vous venez d’évoquer la COVID-19, les efforts du Gouvernement par les vaccins et les gestes barrières ne suffisent-ils pas?
**Ces efforts sont très importants, d’ailleurs nous les soutenons et les encourageons. Pour le chrétien, ils s’inscrivent dans le cadre du «aide-toi, le Ciel t’aidera». Ainsi, au-delà des efforts humains nécessaires pour combattre et en finir avec la pandémie, il nous faut aussi demander le secours de Celui qui est l’Alpha et l’Oméga.

*Et la Vierge Marie dans tout ça?
**C’est l’éternelle question, pourtant c’est tout simple! Le diocèse de Dolisie est placé sous le haut patronage de Notre-Dame Auxiliatrice. De toutes les façons, ce n’est pas une exclusivité de Dolisie, car de nombreux diocèses de vieille chrétienté ont la Vierge Marie pour Patronne et organisent également ce genre de processions. En plus, ce que nous vivons à Dolisie est tout petit si l’on fait une comparaison avec les méga processions du Brésil, d’Espagne, du Portugal, des pays d’Amérique latine, qui regroupent non pas des milliers, mais des millions de personnes.

*Monseigneur, le 24 mai notre Radio Mayombe deviendra Radio Notre-Dame. Pourquoi ce changement de nom, alors que nos auditeurs sont déjà habitués avec l’ancien nom?
**Vous savez que la Radio Mayombe appartient à la Fondation Congo développement qui a son siège à Dolisie. Son président a eu l’immense générosité de la confier au diocèse de Dolisie pour en faire la Radio catholique. Nous sommes restés gracieusement dans les locaux de la Fondation Congo développement pendant environ cinq ans. D’ailleurs, c’est aussi l’occasion d’exprimer encore et encore notre reconnaissance à tous nos bienfaiteurs, et dans ce cas, à la Fondation Congo développement. Et justement, ayant aménagé notre local au niveau du Khuné, au quartier Gaya, nous avons pensé changer de nom. Concrètement, deux raisons concourent à ce changement: la première, c’est faire preuve d’honnêteté, car le nom Radio Mayombe appartient, comme nous l’avons souligné, à la Fondation Congo-développement. Deuxièmement, nous sommes une Eglise. Il est important que notre Radio manifeste aussi notre identité par son nom. Du coup, ce nouveau nom entre en vigueur le jour même de la fête de Notre-Dame Auxiliatrice, le 24 mai, en même temps, fête de la création du diocèse de Dolisie.

*Un dernier mot, Monseigneur?
** Volontiers! Juste appeler tous les chrétiens de Dolisie à accueillir Notre-Dame. Elle nous visite au nom de Son Fils. Alors, tous, en tenue, sur la route, devant nos maisons ou devant notre paroisse, accueillons notre Très Chère Maman, chapelet à la main, le cœur enflammé de l’amour de Jésus-Christ, de l’amour pour notre prochain et pour notre pays. Avec Elle, prions pour la consolidation de la paix et de l’unité entre les Congolais; par nos prières, repoussons la pandémie dans ses derniers retranchements et arrachons la victoire par la foi en Jésus-Christ Fils du Dieu vivant. Priez aussi pour les évêques et pour moi, pauvre serviteur. Que Dieu répande Ses abondantes pluies de bénédictions sur chaque participant et sur tous ceux qui seront de cœur avec nous. Rendez-vous le 30 mai!

Propos recueillis par
Eté Raymond BOUHOYI