La propagation continue de la COVID-19 et les effets du changement climatique impactent de façon significative les économies africaines. La crise sanitaire menace les moyens de subsistance et renforce les défis économiques, notamment ceux liés à la crise alimentaire. Avant la COVID-19, la moitié des Africains étaient confrontés à une insécurité alimentaire due au changement climatique et à d’autres facteurs. Ce nombre de personnes exposées à la faim pourrait probablement doubler en 2021.

La terre est une ressource vitale. Elle est essentielle à l’agriculture, un secteur dont dépendent les moyens de subsistance de 70% d’Africains. Dans le même ordre d’idée, la Coalition internationale pour l’accès à la terre en Afrique (ILC Afrique), la Commission de l’Union africaine (CUA) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) invitent du 15 au 17 septembre 2020 différentes parties prenantes au forum foncier africain qu’ils organisent. L’objectif étant de fournir des réponses aux nombreuses questions qui se posent.
Plus de 1.000 acteurs du développement aborderont le thème: «Réaliser l’Agenda 2063 de l’Union africaine en promouvant une gouvernance foncière centrée sur les personnes en Afrique». Celle-ci est en effet nécessaire pour relancer l’agriculture du continent.
«Pour atteindre l’idéal de «l’Afrique que nous voulons», nous devons aborder stratégiquement les questions brûlantes liées à la faible sécurité foncière, à l’invasion des criquets pèlerins qui détruisent à leur passage les cultures dans la Corne de l’Afrique; à la situation sécuritaire à travers le continent, laquelle a aussi des effets sur la gouvernance du foncier. Les sécheresses et les inondations sont également des causes connexes qui contribuent à la destruction des cultures et des moyens de subsistance de millions de petits agriculteurs africains», affirme Audace Kubwimana, coordonnateur régional de l’ILC pour l’Afrique. Avant d’ajouter que «ces préoccupations font écho à de nombreuses aspirations du plan directeur de l’Agenda 2063 pour la transformation de l’Afrique en une puissance mondiale du futur dans quelques décennies».
L’Afrique importe énormément de produits alimentaires, avec un montant faramineux de 47 milliards de dollars rien que pour l’année 2018. Les restrictions de la COVID-19 entraînent également des pertes élevées de revenus car les productions invendues et perdues s’accumulent dans les fermes. Cela tranche avec le souhait des États membres qui, en 2013, ont adopté l’Agenda 2063.
Pour réduire les importations de denrées alimentaires et se prémunir contre l’escalade des prix, la mise en œuvre de la Déclaration de l’UA sur les problèmes et défis fonciers aux niveaux régional et national est impérative. Des processus tels que le Cadre et les directives sur les politiques foncières en Afrique, les Directives volontaires sur la gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale (DV), et les Principes directeurs de l’UA sur les investissements à grande échelle en Afrique (ATGE) fournissent au continent des instruments pour faire de la terre un moteur clé de la prospérité économique.
«Les processus susmentionnés doivent être renforcés, documentés et survis grâce à des approches multipartites et multidisciplinaire efficaces qui offrent la possibilité d’un apprentissage continu. Nous devons prendre en compte le rôle des institutions d’intégration continentale et régionale pour permettre une meilleure mise en œuvre de l’Agenda foncier de l’Union africaine. Le Forum foncier 2020 nous offre l’opportunité d’évaluer le niveau de mise en œuvre de ces instruments afin d’améliorer la gouvernance foncière sur le continent», indique le Dr. Janet Edeme, chef de la division de l’économie rurale du département de l’économie rurale et de l’Agriculture de l’UA.
La bonne gouvernance foncière transcende les aspirations et les objectifs stratégiques du plan directeur de l’Agenda 2063.

La terre, un bien très précieux des ménages

Pour les femmes et les hommes ruraux en Afrique, la terre est souvent le bien le plus précieux des ménages pour soutenir la production agricole. Elle est également essentielle pour assurer la sécurité alimentaire et la nutrition. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la sécurité foncière est associée à des niveaux plus élevés d’investissement et de productivité dans l’agriculture. Il détermine également des revenus plus élevés et un plus grand bien-être économique.
Des droits fonciers sûrs pour les femmes et les hommes sont souvent corrélés à de meilleurs résultats pour eux et leurs familles. Ils renforcent le pouvoir de négociation des femmes au niveau des ménages et de la communauté. Ils conduisent à une meilleure nutrition des enfants et favorisent la paix sociale au sein des couples. Toutefois, dans de nombreux pays africains, les hommes et les femmes ont un accès insuffisant à des droits fonciers garantis, les femmes et les jeunes étant particulièrement désavantagées.
Les statistiques récentes de l’ILC Afrique révèlent que si les femmes constituent 70% de la population rurale active et 80% de la capacité de production alimentaire au Sénégal (et dans la majeure partie de l’Afrique subsaharienne), seules 13% ont accès à la terre et 2,6% détiennent des garanties sur leurs droits fonciers. De plus, 61,2% des femmes déclarent que le manque de ressources aggrave les inégalités d’accès à la terre.
«Je suis heureux de constater que le Forum a donné une place de choix à l’inclusion et à l’égalité des sexes dans la gouvernance foncière. Il est essentiel que les acteurs du continent soient sensibles à l’égalité des sexes dans le secteur foncier dans la poursuite de l’atteinte des objectifs fixés dans l’Agenda 2063. Il est tout aussi important pour nous de comprendre comment le fait d’atteindre ces objectifs libère le plein potentiel des jeunes et des femmes pour contribuer à la réalisation de cette Afrique que nous voulons, au lendemain de la COVID-19», déclare Esther Obaikol, experte en gouvernance foncière à l’IGAD

V.MALONGA