Archevêque métropolitain de Kinshasa en RD Congo et membre du Conseil des 9 Cardinaux (C9) qui assistent le Pape François dans le projet de réforme de l’Eglise, le Cardinal Fridolin Ambongo Besungu s’est vu refuser l’accès au salon VIP de l’aéroport international de Ndjili à Kinshasa, dimanche 14 mars 2024. Le prélat se rendait à Rome, en Italie, pour participer à une réunion de cette institution présidée par le Saint-Père. L’incident a suscité l’indignation à Kinshasa, notamment parmi les chrétiens catholiques qui le condamnent avec «la dernière énergie».
Dans un communiqué, la réaction de la chancellerie de l’archidiocèse de Kinshasa a été immédiate. Elle «condamne avec la dernière énergie le traitement dégradant que les services officiels aéroportuaires ont réservé» au Cardinal. Le communiqué précise que les témoins qui ont assisté à cette scène ont été très indignés.
La chancellerie de l’archidiocèse de Kinshasa regrette si cette décision est liée aux déclarations ou prises de position du Cardinal Ambongo. «Ce serait dommage si ce traitement fait suite à ses prises de position prophétiques, notamment à son homélie de la nuit de Pâques où il interpelle toutes les personnes impliquées, de quelque manière, dans la crise qui sévit dans notre pays», écrit le secrétaire-chancelier l’abbé Clet-Clay Mamvemba.
Lors de la messe de la nuit de Pâques en la cathédrale Notre-Dame du Congo, qu’il présidait le 30 mars, le Cardinal Fridolin Ambongo a dénoncé dans son homélie l’insouciance des autorités de la RD Congo, un message que certains ont jugé très politique et critique. Avec son franc-parler habituel, l’archevêque de Kinshasa a, en effet, dénoncé l’insouciance des autorités face à l’activisme rebelle du M23 dans l’Est du pays sur fond, selon lui, d’actes qui le fragilisent.
Le Cardinal a dressé un diagnostic très critique sur l’état de la RD Congo en martelant: «Nous savons très bien que notre pays est aujourd’hui un pays en agonie, un grand malade dans un état comateux. La justice est la première instance à bafouer les droits de simples citoyens et nous tenons ici des discours comme si nous étions forts. La réalité est que le Congo n’a pas d’armée».
L’Est du pays, a-t-il expliqué, «continue d’être occupé tandis que le pays n’a aucune force pour défendre son intégrité. Un éléphant aux pieds d’argile… C’est très grave pour une nation comme la nôtre». Aux autorités, le Cardinal Ambongo leur a demandé de cesser des actes susceptibles de pousser à la rébellion. Allusion faite au ralliement de certains cadres de l’ex-parti présidentiel au M23. D’après l’archevêque de Kinshasa, le pays a touché le bas-fond de la souffrance. Il a aussi pointé la voracité des compagnies minières et les visées territoriales expansionnistes de ses voisins.
En RD Congo, depuis la 2ème République, les textes juridiques qui régissent le Protocole d’Etat reconnaissent aux évêques catholiques le statut d’honneur avec rang de ministre. A ce titre, les évêques bénéficient du droit d’accès au salon VIP avant d’embarquer dans l’avion ou à leur descente. Quant au Cardinal particulièrement, il existe une autre disposition très importante.
En tant que conseiller direct du Pape, il est en effet, automatiquement détenteur du passeport diplomatique du Vatican qui lui confère un statut diplomatique particulier. Lui donner accès au salon d’honneur n’est pas une faveur que l’Etat de son pays lui octroie. C’est un droit régi par la Convention de Vienne.
Habituellement, en raison de son rang, le Cardinal Ambongo qui est détenteur d’un passeport diplomatique utilise le salon VIP de l’aéroport de Ndjili pour voyager. Le prélat est par ailleurs président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar (SCEAM). Récemment, le Souverain pontife l’a désigné pour le représenter comme son envoyé personnel à la cérémonie de béatification de missionnaires martyrisés à Uvira (RD Congo), qui se tiendra le 18 août prochain.
Aristide Ghislain NGOUMA&
Alain-Patrick MASSAMBA
