L’expérience était redoutée, taxée par l’opposition de machine à frauder et entourée de toutes sortes de suspicions. Mais, il faut, à la vérité, dire que le vote anticipé des militaires, une première dans le pays, ne s’est pas trop mal passé. Si de ce qu’on a vu on peut déduire quelque chose, ce quelque chose sera tout sauf une condamnation à ne plus répéter l’expérience. En tout cas, la première partie de ce vote, le défilé des hommes en kaki dans les bureaux de vote, semble ne pas avoir donné lieu à des débordements. Pas selon les images que nous a montrées la télévision nationale. Ils ont voté dans une discipline relative, sont venus exprimer leur joie devant les caméras, puis sont rentrés sagement dans leurs casernes.
Naturellement, ceux qui alertaient sur de possibles fraudes, insistaient plus sur l’après que sur le pendant et l’avant. C’est dans l’acheminement jusqu’aux bureaux de la CONEL, affirmait Guy-Brice Parfait Kolélas, que tout était possible. On verra bien. Les dés sont jetés, acta est fabula, nous verrons dimanche soir, à la fin du vote général, ce que cette «innovation» pourrait avoir induit.
Du côté de Denis Sassou-Nguesso, on prône l’esprit zen. On assure que tout a été fait pour que le vote, dans ses deux phases, militaire et civile, se déroule dans la transparence. Soit. Croisons les doigts que tout aille ainsi, dans les mêmes apparences de la normalité. Apparence, parce que nous sommes dans le pays où la triche est un sport national. Et que, d’une manière ou d’une autre, il y aura bien quelqu’un pour trouver à redire. Il serait étonnant que l’opposition joue le fair-play et déclare que tout s’est bien passé.
La couverture de cette première journée de vote a été assez incertaine. Il fallait tendre l’oreille pour entendre la moindre dissonance: un retard des représentants des candidats dans un bureau, le constat de deux présents seulement dans un autre (représentant Denis Sassou-Nguesso et Guy Brice Parfait Kolélas), les mêmes images pour meubler un reportage dans deux bureaux de vote pourtant différents… Pas de quoi influencer l’issue du vote sans doute.
Si le Congo continue de faire montre d’une même sagesse dimanche, dans la compilation des résultats comme dans leur proclamation, cette élection marquera alors un tournant. Sinon, nous continuerons sur la voie des tangages de toujours. Qui font de nous un pays qui n’est pas cité en tête de ceux dont l’expérience démocratique est donnée en modèle.

Albert S. MIANZOUKOUTA