Face à la gravité de la pandémie du coronavirus, les deux chambres du Parlement ont prorogé le 2 octobre dernier l’état d’urgence sanitaire pour la 29e fois. Pour le Gouvernement, la situation est inquiétante et préoccupante. Les débats donnant lieu au vote à l’Assemblée nationale ont été francs et directs.

Ils étaient onze députés à prendre la parole pour exprimer leurs préoccupations, voire leur ras-le-bol devant la faiblesse de l’autorité de l’Etat à faire appliquer les différentes mesures édictées par le Gouvernement dans le cadre de la riposte contre la COVID-19. Le Gouvernement était représenté par le ministre d’Etat Pierre Mabiala, chargé des relations avec le Parlement; Aimé Wilfrid Bininga, de la Justice et Gilbert Mokoki, de la Santé.
Henri Zoniaba Ayimessone a voulu savoir si les mesures prises au niveau des aéroports de Brazzaville et de Pointe-Noire sont appliquées dans toutes les frontières du Congo.
Venance Monia a posé la question sur le délai de validation d’un vaccin. «Est-ce qu’on ne peut pas passer à une phase de tests sérologiques pour voir si la personne à encore la capacité sérologique nécessaire pour se protéger contre la maladie», a-t-il suggéré.
Le député Bonaventure Boudzika a demandé au ministre de la Santé si une personne vaccinée pouvait encore être contaminée et contaminer les autres.
Quant à Jérémy Lissouba, il s’est interrogé sur la nécessité des mesures prises par le Gouvernement. Il a insisté sur le couvre-feu, notamment sur les horaires imposés les week-end et les jours fériés. «Quelle est l’efficacité du couvre-feu», a-t-il questionné, tout en plaidant pour l’assouplissement de celui-ci pour le ramener à 23 heures, «sachant qu’aujourd’hui, la meilleure arme pour enrayer la progression de la pandémie est la vigilance, la responsabilité, le respect des gestes barrières et la vaccination», a-t-il affirmé.
Pour Arnaud Accel Ndinga Makanda, rien ne se fait dans le cadre de l’opération «Coup de poing». «Dans les départements, on ne porte presque pas les masques. Ça veut dire que les gens ne croient pas à ce que nous faisons. L’Allure avec laquelle les gens meurent maintenant devient très inquiétante. Quand nous parlons de variant, on ne sait pas quel type de variant circule au Congo et dans quelle proportion. Tout ça veut dire que nous ne maîtrisons rien», a-t-il indiqué.
Si Marcel Mbani a insisté sur la nécessité de connaître l’état réel de santé d’un individu avant de lui administrer le vaccin, le député Blaise Ambéto a, quant à lui, fait constater au ministre de la Santé que les gens ne respectaient pas les mesures barrières lorsqu’ils vont se faire vacciner. «On ne prend pas, non plus, le soin de faire reposer la personne pendant 30 minutes, après la prise du vaccin. Une fois vaccinée, on laisse la personne se promener, ce qui est un danger», a-t-il regretté.
«Est-ce que les décès déclarés de la COVID-19 sont réellement ceux de la COVID-19?», s’est-il interrogé, tout en poursuivant: «On est dans la période où, COVID-19 ou pas, il y a la grippe et la toux au mois d’octobre et décembre. Ce changement de climat, de la saison sèche à la saison des pluies, nous amène toujours ces maladies. Aujourd’hui, tout se résume à la COVID-19. Est-ce que le ministère de la Santé peut avoir les moyens de distinguer les décès COVID-19 et d’autres décès dûs aux autres pathologies qu’on a tendance à négliger aujourd’hui? Dès que vous avez la fièvre, c’est la COVID-19 comme si le paludisme n’amène pas la fièvre; dès que vous toussez, c’est la COVID-19 comme si la toux n’existe plus», s’est-il indigné.
Un député a posé la question de savoir la part de responsabilité du Gouvernement au cas où quelqu’un venait à mourir après avoir pris le vaccin. Un autre a dénoncé la vente des pass-sanitaires aux personnes non vaccinées à hauteur de 20.000 F.Cfa. «La virulence du variant delta peut-elle nous amener à envisager une troisième dose de vaccin? Dans l’hypothèse d’une troisième dose, doit-on continuer avec le même vaccin? Qu’en sera-t-il pour ceux qui ont reçu une dose unique». Telles sont les autres préoccupations soulevées par les députés.
Dans ses réponses, le ministre Gilbert Mokoki a apporté quelques éclaircissements. S’agissant de la prise de la 3e dose de vaccin, il a fait savoir que le Comité des experts n’a pas encore donné un avis favorable.
Concernant l’achat des pass-sanitaires, le ministre a dit être informé de la situation. «On va s’en occuper», a-t-il promis. Et d’ajouter: «Une équipe d’informaticien travaille pour produire un document sécurisé», a-t-il informé.
Si le coût des tests PCR est élevé au niveau des aéroports de Brazzaville et de Pointe-Noire, a dit Gilbert Mokoki, «c’est parce qu’ils sont réalisés par une société privée avec laquelle nous avons signé un protocole d’accord. Elle paie ses droits et taxes».
Le ministre Aimé Wilfrid Bininga a, pour sa part, reconnu la faiblesse du dispositif de contrôle tant des gestes barrières que du port obligatoire du masque. Il a précisé que le vaccin n’apporte pas une immunité totale. «La personne vaccinée en cas de contact avec les autres, peut être contaminée et contaminer les autres. Voilà pourquoi, il faut toujours continuer à observer les mesures barrières», a-t-il soutenu, tout en insistant sur le maintien du couvre-feu à ses horaires habituels.

Cyr Armel YABBAT-NGO