La vigne est une image, un thème très important et abondant dans les écrits bibliques avant et avec Jésus, pour décrire le monde que Dieu aime et sauve, duquel il attend une belle vendange de foi, d’espérance et d’amour. C’est peut-être, pour cette raison qu’après l’épisode des ouvriers de la onzième heure; le tour est aujourd’hui à cette parabole qui met en challenge le «Non» et le «Oui» des deux fils.
Au juste, que représente pour nous: le fils du «Oui-stérile» et celui du «Non-fécond»? Il ne s’agit pas dans cette parabole de faire vivre à cette famille une échéance de référendum filial, quant à savoir lequel des deux, aime son père plus que l’autre. Par contre celle-ci fait le procès de la fidélité du peuple d’Israël en premier et ouvre sur la démarche de conversion des autres, les païens. C’est dire, à travers Israël sont ciblés: ces chefs des prêtres et ces Anciens… ils sont «le second fils» lequel a dit oui sans s’engager. Le peuple de la promesse, peuple élu par Dieu pour se révéler… hors pour Jésus, ils ont dit «oui» à chaque étape de leur histoire… mais ils n’ont pas toujours vécu ce «oui». Par contre «le premier fils» de la parabole représente ceux qui ont dit «non» au départ à Dieu: ils étaient prostitués, Samaritains, publicains… ce sont Zachée et Nicodème, les collecteurs d’impôt; c’est Marie Madeleine, le centurion romain; mais aussi Pierre, les autres apôtres et le Bon Larron… Avec le temps; ils se sont engagés. Ils ont été retournés par le regard, l’appel, le message et l’attitude de Jésus; ils ont vu en lui, Dieu parmi eux, source de conversion.
En fait, les fils du Oui avaient répondu favorablement au Seigneur en se consacrant totalement à lui pour une satisfaction charnelle, donc une autosatisfaction… mais ils ne se rendaient plus compte que leur cœur avait besoin de se dévouer totalement au service de Dieu possible que par un changement radical «metanoia». Par contre les autres, tous des pécheurs, aux cœurs blessés, pouvaient y accueillir la tendresse et la volonté de Dieu, par un repentir sincère et réparer leur «non» précoce résultant des peurs ou des «impedimenta» de leur histoire. Loin de moi, de jeter la pierre au peuple juif d’hier ni d’aujourd’hui; ils sont nos frères aînés dans la foi (Saint Jean Paul II). Le repentir selon l’Evangile ne relève pas de nos réactions psycho-affectives. Il est le fruit de la Grâce de Dieu. C’est la prise de conscience que quelque chose ne va pas dans ma relation au tout Autre (le Seigneur) et aux autres (le prochain). Le fils qui dit «Je ne veux pas.» est certes un contestataire. Il veut faire sa vie tout seul ou se sentir autonome, libre de faire ses propres choix sans être influencé. Mais au plus profond de lui-même il reconnait l’autorité du père. Sous son attitude désinvolte et immature, il y a un cœur qui réagit comme chez l’enfant prodigue: «J’irai vers mon père et je lui dirai… ». Après un examen de conscience, il est revenu sur ses pas ou son refus! Alors que l’autre qui dit “Oui, Seigneur” et ne fait rien, est en réalité enfermé en lui-même. Se repentir, ce n’est pas avoir du remords, ce qui ne serait que négatif et malsain. Une telle attitude ne construit rien, mais qui ronge de l’intérieur; c’est donc, «faire la Volonté du Père». Se repentir, c’est repenser dans son cœur ce qui est Bien ou Bon et se laisser être re-pansé par Dieu qui est Amour. Se repentir, c’est accepter de remettre en cause sa manière de voir et ses attitudes. Un point de départ indispensable pour se mettre en route et découvrir les horizons jusqu’alors insoupçonnés de l’amour de Dieu.
Ceci dit, nous voici aujourd’hui encore devant une parabole qui nous concerne tous, chacune et chacun. Nous sommes invités à vérifier si, avec l’usure du temps, nos «oui» ne sont pas formulés du bout des lèvres, ou au fond de nos cœurs, devenus des reliques hors d’usage pour la foi. Comme chez Marie, Mère de Jésus, que ton Oui soit oui ou que ton Non soit non. Ainsi est-t-il dit dans l’Apocalypse: «Que n’es-tu chaud ou froid! Mais puisque tu es tiède, ni chaud, ni froid, je vais te vomir. (13,16)» Pourquoi? Parce que celui qui vit dans la tiédeur de la médiocrité, est dans l’incapacité de réagir.
Frères et Sœurs, un «Oui» prononcé il y a longtemps a souvent besoin d’être renouvelé. Nous le savons bien dans nos engagements divers, notamment dans le mariage comme dans l’ordination ou la vie consacrée. Car ne l’oublions pas le Seigneur demande des ouvriers pour travailler à sa vigne et non des syndicalistes, pour «syndiquer» sa volonté. Tous, laïcs et prêtres, même si notre manière de servir Dieu nous distingue souvent, c’est un seul et même «Oui» que Dieu nous réclame et qui nous engage: tous ouvriers de sa vigne là où nous sommes! Demandons-nous: Quelle est la parcelle de vigne où Dieu m’envoie? Quelle mission il veut m’y confier? Les situations actuelles, depuis la crise financière à la crise sanitaire de la COVID-19 dans lesquelles nous nous trouvons, les défis économiques et sociaux mais aussi environnementaux … sont autant de questions qui obligent à remettre régulièrement à jour notre réponse au Seigneur: nos «oui» autant que nos «non» selon les circonstances. Il est temps d’y réfléchir car le Seigneur compte sur nous!

Abbé Cellot Primat NKOUNGA MABIKAS
(Aumônier général de l’Association des Scouts
et Guides du Congo)