La Commission nationale de reconnaissance des terres coutumières s’est réunie en session extraordinaire le 13 mai dernier à Madingou, chef-lieu du département de la Bouenza, pour examiner quatorze affaires. Les travaux étaient présidés par le ministre d’Etat, ministre des Affaires foncières et du domaine public chargé des relations avec le Parlement, Pierre Mabiala, en sa qualité de président de la Commission. En présence du préfet de la Bouenza, Jules Moukala Tchoumou; du président du Conseil départemental, Jean Fulgence Mouangou.

Les quatorze affaires ont été introduites par les familles Kinsimba, Ngoma Victor, Tseke-Mambinda, Kilounga, Mikaya, Basseke Nzala Batu, Ombamba de Madouma, Des terres de Kibaka, Kindamba de Doungou, Mimpambou, Kimbimbi, Minzoumba de Kibimbi, Bakoyi de Kimbamba, Bouende-Mpouma.

Les membres dela commission et des familles
Les membres dela commission et des familles

Dans la salle de conférences du Conseil département, face à Pierre Mabiala, étaient installés les membres de la Commission, les sous-préfets de Kayes, Boko-Songho, Kingoué, Loudima, Madingou, Mfouati, Mouyondzi, Ntsiati et la vice-mairesse de Madingou commune, les chefs des villages, les représentants des familles et des villages limitrophes.
Le préfet Jules Moukala Tchoumou, premier vice-président de la Commission, a rappelé aux membres de la Commission leur sens du devoir. «Vous êtes sollicité pour apporter votre arbitrage somme tout déterminant quant au verdict des affaires en examen. Mon invite à votre égard consiste à vous enjoindre à l’objectivité et la responsabilité. A chaque session, nous avons abouti à l’apaisement et au règlement des conflits entre terriens», a-t-il déclaré, tout en souhaitant une issue heureuse au traitement des soucis soumis à l’appréciation de cette session.
Il a relevé l’adhésion de plus en plus grandissante des populations de la Bouenza à la sécurisation de la terre et au travail de la Commission nationale de reconnaissance des terres coutumières, au regard du nombre croissant des dossiers soumis à l’appréciation de cette session. «Notre vœu le plus ardent est que cette session s’inscrive également dans le renforcement de la paix», a exhorté Jules Moukala Tchoumou.
Pour le préfet, la question de la propriété terrienne devient de plus en plus préoccupante et la maîtrise de la gestion de la terre est un impératif pour l’Etat. C’est tout le sens à donner à toutes les descentes du ministre d’Etat à travers les différents départements du pays. Car, une terre sécurisée et immatriculée est exempte de tout litige.
Jules Moukala Tchoumou est revenu sur le message du Chef de l’Etat sur l’Etat de la nation devant le Parlement réuni en congrès le 28 novembre dernier. Il demandait au Gouvernement d’accélérer le processus de reconnaissance des terres coutumières, en vue de constituer la réserve foncière de l’Etat.
C’est dans cette optique que s’inscrit la session ordinaire de la Commission nationale de reconnaissance des terres coutumières, tenue à Madingou. Elle avait à son ordre du jour quatorze affaires dont deux ont pu être validées. Il s’agit des dossiers des familles Kinsimba, dans le district de Boko-Songho, et Kibaka, dans le district de Loudima.
Neuf dossiers ont été ajournés pour des sursis à statuer. Ces familles sont en conflit avec les voisins; et les affaires sont pendantes devant les tribunaux qui n’ont pas encore tranché. «Si vous avez déjà saisi les juridictions de la République, vous ne pouvez plus venir ici. Nous sommes incompétents. Il faut attendre la décision définitive de justice», a expliqué Pierre Mabiala.
Les dossiers des familles Basseke Nzala Batu, Ombamba de Madouma, et Bakoyi de Kibamba ont été purement et simplement rejetés. Et pour cause: une bonne partie des terres de la famille Basseké est couverte de forêts. Dans le cadre de la gestion foncière, les forêts appartiennent à l’Etat. «Pourquoi allons-nous reconnaître des citoyens à l’intérieur des forêts de l’Etat?
C’est un problème de responsabilité. Si nous donnons ces terres à une famille qui s’y installe, ça veut dire que c’est des forêts qui seront détruites. On ne peut pas, nous l’Etat, se permettre une telle chose», a indiqué le préfet.
Pour le président du Conseil départemental, c’est une zone forestière en devenir. «Il ne s’agit pas d’arrêter cette dynamique naturelle».
«Est-ce qu’il y a des villages sur ces terres?», demande le ministre d’Etat. «Non», répond l’impétrant, le mandataire général Adolphe Harbon Ngoma Mboungou.
Et d’ajouter: «Vous n’allez pas empêcher une famille de jouir de son bien. Ce sont les éléphants qui ont poussé mes parents à quitter le village pour s’installer à Moupépé, Loudima gare».
«Justement, ce que vous dites là conforte notre décision. Si vous parlez d’éléphants, ils sont dans la forêt. Vous ne pouvez pas être propriétaire des terres forestières. Ce n’est pas parce que vous faites l’agriculture sur les terres de l’Etat que vous devenez propriétaire. Vous n’avez pas vraiment le droit de propriété. Le dossier est rejeté», a conclu Pierre Mabiala.
Quant aux terres de la famille Bakoyi de Kimbamba, elles sont comprises dans l’Unité de forestation aménagée.
La famille Ombamba a bénéficié de l’hospitalité légendaire de ceux qui étaient dans le village lorsqu’ils étaient venus après la construction du chemin de fer. Un endroit leur avait été indiqué pour qu’ils s’installent. Par ce motif, «est-ce qu’ils doivent être propriétaires fonciers?», s’est questionné le ministre d’Etat.
«Non», répond unanimement l’assistance. Tout en rejetant ce dossier, Pierre Mabiala a joué à la conciliation. Il a proposé une démarche en demandant à la famille d’accueil, de penser aux Ombamba. «Vous n’allez pas les chasser comme ça. C’est à vous de leur donner une partie de vos terres lorsqu’elles seront reconnues par l’Etat, et non pas la commission», a-t-il conseillé.
A signaler que cette session ordinaire a permis à l’Etat de se constituer une réserve foncière d’une superficie totale de 1826 hectares.

Cyr Armel YABBAT-NGO