C’est un fait : les enfants ont des droits. Réfugié ou migrant, orphelin ou fils/ fille de famille, ses droits sont inaliénables et sa sécurité est garantie suivant l’article 54 de la convention. Le promoteur de la «Maison d’enfant», de Pointe-Noire, l’abbé Abel Liluala, chargé des affaires judiciaires dans le diocèse, revient sur la célébration de la Journée de l’enfant africain, le 16 juin dernier.

*Père, à Pointe-Noire, les enfants de la rue ont-ils des droits ?
**Tous les enfants ont des droits fondamentaux, il suffit de se rappeler la Convention internationale des droits de l’enfant; la liste établie par les Nations Unies le 20 novembre 1989. Donc, tous les enfants ont les mêmes droits : droit à la santé, droit à l’éducation, à la protection. Qu’il soit un enfant en famille, avec ses parents ou qu’il soit enfant de la rue.
*Le nombre d’enfants de la rue est en augmentation à Pointe-Noire. Comment réagissez-vous à cette situation?
**C’est vraiment affreux de voir combien le nombre d’enfants de la rue est en augmentation de jour en jour. Cette situation doit interpeler: interpeler l’État, la famille, la société civile, nous interpeler tous. Au niveau de l’Église, nous essayons de faire des efforts. Car nous avons un centre d’accueil des enfants mineurs où nous accueillons les enfants en situation de rue et nous faisons des efforts également pour accueillir au moins les enfants orphelins. C’est juste notre manière d’apporter une réponse et relever les défis qui nous menacent tous dans notre capitale économique.
*Père, quel est le plus grave: l’absence des parents ou l’absence de l’État ?
**Je dirais les deux. Chaque fois que je rencontre un de ces enfants, je lui pose la question: d’où viens-tu ? Un enfant est le fruit d’une communauté, le fruit de l’amour d’un père et d’une mère. Dès lors qu’un enfant nait, les parents ont comme première obligation de l’accueillir, de s’occuper de lui, de lui donner un nom-le nom de la famille. Il doit être bien nourri, bien logé, bien soigné, protégé, éduqué et qu’il soit pris en charge pour avenir. Voilà pour la famille. Pour ce qui est de l’État, on peut relever que lui aussi a des obligations. L’État doit aussi être interpelé par ces enfants qui sont là, main tendue 24h sur 24. Il a le devoir de les prendre en charge, de les intégrer, de rechercher leurs familles au besoin. Or, dans une ville comme Pointe-Noire où nous avons beaucoup d’enfants, il n’existe aucune structure étatique pour s’occuper d’eux ! Pourtant il est du devoir de l’État de veiller et d’accompagner les personnes vulnérables. Il devrait chercher à savoir pourquoi ces enfants sont là, qu’est ce qui leur manque et chercher, pourquoi pas, à interpeler leurs parents ! Chacun doit s’occuper du fruit de ces entrailles.
*Depuis le temps, la situation ne s’est-elle pas même améliorée ?
**En tant que promoteur d’une maison d’orphelinat je suis au contact avec les frères et les sœurs qui s’occupent d’établissements similaires. Je me rends compte que les structures de soutien à l’enfance n’ont été créés ici que par l’Église ou la société civile. J’ai l’impression qu’il y a comme une peur d’affronter le problème des enfants de la rue ; on ne s’occupe pas d’eux. Il faut penser à l’équipe d’encadrement, de suivi. Étant donné que ces enfants ont toujours vécu dans la rue, ils y ont acquis des habitudes. Il faut donc impérativement une équipe bien préparée, bien motivée pour les encadrer.
*Comment l’État pourrait-il corriger cette situation ?
**L’État a une grande responsabilité et un grand rôle à jouer pour que les enfants soient vraiment protégés, éduqués et pour encadrer ces enfants au lieu de les voir errer de gauche à droite dans la rue. Je propose qu’au ministère qui s’occupe de l’enfance, il y ait une direction dédiée à leur protection. Car il n’est pas normal que des enfants de la rue se transforment ensuite en bébés noirs. Nous ne devons pas nous habituer à voir des enfants vivre dans l’immoralité grave, dans les grossesses précoces.
*Père, quel est votre appel à l’endroit des parents ?
**Cet appel est important : que les parents soient doux, plus affectueux, moins violents. Qu’ils soient responsables.

Propos recueillis par Madocie Déogratias MONGO