Secrétaire adjoint du Conseil consultatif des personnes vivant avec Handicap, Armand Guy Richard Ndinga Okossa est de formation ingénieur agroéconomiste. Passionné de la réflexion sur de nombreux sujets et notamment ceux relatifs à la personne handicapée, nous avons échangé avec lui en ce mois d’avril à Brazzaville. Il nous a fait part de son opinion sur la violence faite sur le genre et notamment sur la femme vivant avec handicap.

**Que diriez-vous sur la violence sur le genre et particulièrement sur la femme vivant avec handicap ?
*La femme étant l’être le plus exposé à des risques par rapport à l’homme, tout comme la jeune fille par rapport au jeune garçon, dans sa vulnérabilité et sa discrimination, elle est exposée à plusieurs types de violences et maltraitances. Dès le jeune âge, les garçons veulent toujours violenter la jeune fille, elle doit être au pas selon leur volonté. A l’école, les enseignants sans scrupule, leurs imposent une relation sexuelle. Le refus de la jeune fille l’expose à de mauvaises notes qui ne reflètent pas son travail réel. La fille handicapée, en particulier celle qui présente un handicap mental est près de dix fois plus exposée aux violences sexuelles selon Handicap International. Au travail, la plupart des hommes ne veulent pas respecter les collègues de sexe féminin quand bien même, elles seraient supérieures hiérarchiquement. La plupart des parents d’élèves ne veulent pas que leurs enfants soient enseignés par les femmes.

**Pensez-vous que cela est aussi perceptible dans d’autres secteurs ?
*Effectivement ! Dans la plupart des partis politiques par exemple, peu de femmes sont proposées aux élections législatives, sénatoriales ou mêmes locales. La parité n’existe pratiquement pas dans les nominations aux postes de responsabilités. C’est ce qui explique l’inégalité des chances. Concernant les femmes vivant avec handicap, la situation est encore plus grave. Malgré sa beauté ou son intelligence, les parents des hommes s’opposent souvent à leur union. Selon eux, l’union n’est possible qu’entre deux personnes vivant avec handicap. De telles unions les obligent à trouver quelqu’un pour les assister de façon permanente. Les personnes sourdes et malentendantes sont obligées de se marier entre elles ; une personne handicapée motrice peut se marier avec une personne sourde et malentendante. Ce qui est vrai, on trouve des aveugles qui se marient entre eux, alors que ce sont des mariages qui ne sont pas souhaités, car, en présence d’un danger quelconque, ils ne sauront se protéger. Il n’est pas impossible de retrouver un mariage entre deux sans mélanine ou albinos alors que leur union donne un pourcentage de 75% d’enfants également sans mélanine ou avec albinisme. Selon le rapport sur les sans mélanine au Congo de juillet 2011, ces situations permettent d’évoquer certaines postures sur le plan idéologique.

**Comment cela se passe-t-il sur le plan écologique ?
*Au niveau écologique, des cas particuliers comme le choix du conjoint appartient le plus souvent, non pas au futur époux ou à la future épouse mais aux membres les plus influents de leurs groupes de parenté respectifs d’une part. Et d’autre part, au niveau des normes sociales, le mariage n’est jamais libre, en ce que n’importe quel homme ne peut épouser n’importe quelle femme. Dans toutes les sociétés, il existe des catégories de personnes qu’un individu donné ne doit pas épouser et d’autres avec lesquelles ce mariage, sans être totalement interdit n’est pas encouragé (confère Marc Augé ‘’Les domaines de la parenté’’, Paris 1975, François Maspero). D’autres hommes font des femmes vivant avec handicap de simples productrices d’enfants et la plupart sont abandonnées avec leurs enfants.

**Que diriez-vous sur de tels comportements ?
*Ils m’autorisent à dire que la femme vivant avec handicap est appelée à vivre dans la frustration de façon permanente, certaines qui ont eu la chance d’avoir des maris valides sont exposées aux injures de la part de la belle famille ou des beaux-parents, et exposées aux tortures physiques, psychologiques ou sexuelles de la part de leurs maris. Il n’est pas rare de trouver une femme handicapée violée par des hommes et pourtant personne n’a voulu devenir handicapé. Si ces jeunes filles et femmes vivent aujourd’hui avec leur handicap, cela peut être due à des circonstances existentielles, voire même des conséquences de la vie. Il est aberrant que l’homme profite de leur situation du handicap pour leur faire subir cette discrimination. La plupart de ces hommes vont vers ces femmes pour les juger ou les tester en les prenant comme des objets d’expérience et non par relation amoureuse.

**A propos, auriez-vous un souhait à émettre ?
*Soyons ensemble pour combattre de tels agissements qui n’ont pas de raison d’être au XXIè siècle parce que les violences faites aux femmes et aux filles handicapées sont invisibles, mal connues et peu prises en compte. Elles ont un risque accru d’être victimes de violences conjugales. (Contexte de vulnérabilité : femmes handicapées). La Convention relative au droit des personnes handicapées reconnaît que les personnes vivant avec handicap ont un risque accru de victimisation, particulièrement les femmes et les jeunes filles.

Propos recueillis par Alain-Patrick
MASSAMBA