Actes d’indiscipline, corruption, abus notoires, voire exactions sur les populations comme on l’a vu avec les tortionnaires de triste mémoire du viaduc de Kintélé: la situation se dégrade au sein des Forces de police. Et c’est à juste titre que le général Jean-François Ndengué, fâché, a fermement condamné ces pratiques.

On l’a déjà déploré à maintes reprises, les malfrats et autres voyous ont infiltré les rangs des Forces de police. La preuve vient d’être donnée avec l’implication de certains éléments d’un Commissariat de police de Brazzaville dans les faits de tortures sur des tiers, en leur fracassant les jambes à l’aide d’une masse, au pied des piliers du viaduc de Kintélé. Au point d’émouvoir le commandant des Forces de police, le général Jean-François Ndengué, qui a recadré ses hommes à l’occasion de la cérémonie de port des insignes de grade aux promus du premier trimestre de 2022, le 12 janvier dernier.
«C’est inacceptable»
C’est sur un ton ferme qu’il a répondu à ses compatriotes scandalisés par cette dérive. «C’est révoltant! C’est inacceptable! Nous avons identifié des policiers qui ont été présentés devant le procureur de la République. Inculpés, ils ont été déférés à la Maison d’arrêt où ils subiront la rigueur de la loi. En plus, le Conseil de discipline statuera sur leur cas. Et au regard de l’extrême gravité des faits qui leur sont reprochés, ils sont passibles de radiation», a-t-il laissé entendre. «Que cela serve de mise en garde rigoureuse à tous les policiers qui déshonorent le corps avec ce type de pratiques inhumaines et criminelles», a encore martelé le général Jean-François Ndengué.
La Police est donc très malade. Le constat a été fait par son plus haut responsable. Selon des ONGS, «sévisses, tortures et viols sont des pratiques courantes dans les commissariats» où ces derniers temps, on a enregistré plusieurs décès. Elles dénoncent aussi l’absence de poursuites contre les coupables présumés. Les flics se rendent «coupables de collusion avec des bandits de grand chemin, de trafic de stupéfiants et d’affaires de mœurs». Il y a aussi les agents de police chargés de réguler la circulation routière, véritable épine au pied des automobilistes qu’ils arnaquent. «Avant-hier, un policier m’a interpellé et emmené sous l’arbre. Il me demandait 3000 francs CFA pour une infraction inexistante je lui ai donné 1000 francs CFA pour gagner du temps et continuer mon travail. Il a refusé…», raconte un taximan. Des cas comme celui-là se comptent par dizaines.
De l’avis général, la police congolaise souffre de plusieurs maux. Un homme politique estime que le brassage des ex-combattants -intégrés après la guerre de 1997 au processus de paix à partir de 2003- «n’a été qu’un simple démantèlement des groupes armés mais qu’il n’a en aucune manière donné naissance à une police nationale». Le général Jean-François Ndengué, lui-même, pointe l’emploi des civils et a mis en garde les responsables qui s’entêtent à recourir à leurs services.
Mais la police est également gangrenée par l’incurie de ses responsables, qui en ont fait une «mangeoire». Des cas de corruption avérée parmi les subalternes et les officiers sont rarement sanctionnés. «On comprend maintenant pourquoi la peur du policier a disparu. Tout cela parce que dans notre monde actuel, rares sont ceux qui ont encore le sens élevé du devoir…républicain», s’indigne un internaute. «Et ça devient compliqué de lutter à la fois contre les hors-la-loi ‘’naturels’’ et les gens d’armes convertis au grand banditisme», souffle, de son côté, un confrère.
Ce sont ces comportements que le patron de la police veut combattre. Va-t-il y parvenir? «Il faut que ça change. Et ça doit changer», aime-t-il à marteler. Ce discours, véhément, il l’avait déjà tenu le 20 septembre 2014. On le voit, ce sera un travail de longue haleine car les habitudes ont la peau dure. Surtout en ces temps où la course effrénée à l’argent sale bat son plein.

Jean ZENGABIO