A l’issue de son sommet extraordinaire dans la capitale du Ghana, Accra, le dimanche 9 janvier 2022, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a entériné les décisions prises peu avant par l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Pour amener la junte à un retour rapide à l’ordre constitutionnel, les pays d’Afrique de l’Ouest ont pris des sanctions économiques et financières très dures qui s’ajoutent aux précédentes. La junte a rétorqué immédiatement, en haussant le ton.

La CEDEAO a décidé de geler les avoirs du Mali au sein de la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), de couper les aides financières, de fermer les frontières entre le Mali et les Etats membres de l’organisation, mais aussi de suspendre les transactions avec Bamako, à l’exception des produits médicaux et de première nécessité, les produits pétroliers et l’électricité, les actifs et avoirs du Mali dans toutes les banques centrales des pays membres de la communauté. Mais aussi, le gel des avoirs du gouvernement et des entreprises d’Etat du Mali dans toutes les banques commerciales de l’organisation régionale.
Il a aussi été décidé le retrait des ambassadeurs de tous les pays membres au Mali. Enfin, les dirigeants ont décidé d’activer immédiatement la force en attente de l’organisation, compte tenu de «l’impact potentiellement déstabilisateur de la transition malienne sur la région». Outre ces décisions, le sommet a constaté que la transition avait échoué en ne parvenant pas à organiser des élections à la date du 27 février 2022 comme convenu. Les diplomates estiment le chronogramme proposé par le Mali inacceptable. Un appel a été lancé aux autorités de transition maliennes de suspendre les grandes mesures de réforme jusqu’à l’entrée en fonction des institutions légitimes qui seront mises en place après les élections. Alors que le Mali proposait une durée de transition de quatre ans.
D’après Nana Akufo-Addo, président du Ghana et président en exercice de la CEDEAO, «ces mesures coup de poing ne ciblent que les militaires au pouvoir au Mali mais aucunement les civils. On voudrait avoir un espace démocratique en Afrique de l’Ouest. On ne peut pas subir cette histoire de coup d’Etat qui se prolonge pendant cinq, six ans, ce n’est pas possible».
A l’arrivée à Bamako le 5 janvier dernier, du médiateur de la CEDEAO Goodluck Jonathan, l’un de ses collaborateurs avait constaté que la junte malienne demande en réalité une transition d’une durée de cinq ans, pour obtenir au moins trois ans. Les voyages du ministre malien des Affaires étrangères Abdoulaye Diop, et ses déclarations sont minutieusement analysés dans la sous-région. L’idée de fermeté vis-à-vis de Bamako était décidée.
La veille du sommet d’Accra convoqué par le président burkinabé Roch Marc Christian Kaboré, président en exercice de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), une délégation malienne vient sans surprise remettre un message au président du Ghana, président en exercice de la CEDEAO. Au lieu d’une transition de cinq ans, la junte demande désormais quatre ans… La même nuit, au cours d’un dîner, les Chefs d’Etat déjà présents dans la capitale ghanéenne rejettent la nouvelle proposition malienne, et maintiennent leur position de fermeté.
Par la voix du ministre Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement, les autorités militaires maliennes ont «condamné énergiquement ces sanctions illégales et illégitimes». De son côté, le président malien de transition a dénoncé ces sanctions qu’il qualifie d’illégal et d’illégitime. Mais il s’est dit ouvert au dialogue. Cependant, le gouvernement appelle à une mobilisation, le vendredi 14 janvier, pour protester contre les sanctions de la CEDEAO.

Alain-Patrick MASSAMBA