Le vice-président William Ruto a été déclaré, lundi 15 août 2022, vainqueur de l’élection présidentielle par la Commission électorale du Kenya, face au candidat soutenu par le président sortant Uhuru Kenyatta, Raila Odinga. Une partie des membres de cet organe indépendant ont cependant rejeté ces résultats. Le scrutin a été marqué par des tensions et une forte abstention.

Après six jours d’attente à laquelle la population a été soumise à rude épreuve, et d’après le décompte de la Commission électorale du Kenya, le vice-président Ruto a cumulé plus de 7,17 millions de votes, soit 50,49% des voix. Son opposant Raila Odinga, vétéran de l’opposition désormais soutenu par le pouvoir, remporte environ 48,85% des suffrages exprimés. Lundi 16 août, des membres de la Commission électorale ont rejeté les résultats du scrutin, à cause selon elle, du caractère opaque du processus. Cet organe indépendant est soumis à une intense pression.
Quelque 22,1 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes le 9 août pour désigner le successeur du président sortant Uhuru Kenyatta, ainsi que les gouverneurs, parlementaires et quelque 1500 élus locaux. Dans l’ensemble, le scrutin s’est déroulé dans le calme, mais a été marqué par une forte hausse d’abstention, avec une participation d’environ 65%, contre 78% en août 2017. Ce manque de mobilisation s’explique par une désillusion envers la classe politique et de flambée du coût de la vie depuis la pandémie et la guerre en Ukraine.
Agé de 55 ans, William Samoei Ruto a malgré son statut de vice-président fait figure de challenger durant la campagne électorale, face à Raila Odinga, 77 ans, soutenu par Uhuru Kenyatta et le parti présidentiel. Le nouveau président avait âprement battu campagne ces dernières années tandis qu’il était mis sur la touche par une alliance inattendue entre Kenyatta et Odinga. Cet enfant d’une famille modeste de la vallée du Rift devenu l’une des premières fortunes du pays, aime à rappeler son histoire de «self made man» parti de rien et s’est proclamé porte-parole des «débrouillards» du petit peuple face au pouvoir des dynasties politiques incarnées par Kenyatta et Odinga.
Après l’annonce de sa victoire, William Ruto a promis de travailler avec «tous les leaders» dans un pays «transparent, ouvert et démocratique». Porte-parole des «débrouillards» et du petit peuple, William Ruto avait bénéficié du soutien du chef de l’Etat sortant Uhuru Kenyatta dont il est le vice-président depuis 2013. Mais, le président kenyan a finalement soutenu son concurrent direct Raila Odinga.
Diplômé en sciences politiques, professeur avant de se lancer en politique dans les années 1990, au sein des jeunesses du parti de l’autocrate Daniel Arap Moi, William Ruto aime rappeler qu’il n’a eu sa première paire de chaussures qu’à l’âge de 15 ans et qu’il vendait des poulets en bordure de route. Il est actuellement à la tête d’une grande entreprise de volailles, un des piliers de sa fortune, une des plus grandes du pays, qui comprendrait aussi des hôtels, des milliers d’hectares de terre.

Alain-Patrick MASSAMBA