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JOURNEE INTERNATIONALE DE LA FEMME : Investir en faveur de la femme?

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Sœur Thècle Saurelle BAHAMBOULA Religieuse de Notre Dame du Rosaire

La Journée internationale des droits des femmes instituée par les Nations unies  depuis 1977, est célébrée officiellement le 8 mars de chaque année, en hommage au mouvement en faveur des droits des femmes. Le Congo comme tous les pays du monde célèbrent aussi les droits de la femme. Cette 47ème Journée internationale des droits des femmes a pour thème: «Investir en faveur de la femme: accélérer le rythme». Qu’est-ce-que cela veut dire? Que peut-on entendre?

Ce thème nous interpelle tous: hommes et femmes du continent africain spécialement. C’est pourquoi, en tant que femme, nous prenons le risque d’écrire ces quelques lignes, de faire part de cette réflexion. Ce n’est qu’un point de vue personnel. Nous le faisons pour toutes ces femmes sans voix et aussi pour tous ceux qui continuent de lutter pour que le respect des droits des femmes soit effectif dans notre culture, dans notre mentalité. Que cessent toutes formes de préjugés défavorables à l’égard des femmes pour un monde, mieux une Afrique plus respectueuse de la personne.

En tant que femme d’Eglise, cela nous paraît gênant de parler en termes d’investissement. C’est pourquoi, nous faisons le libre choix d’utiliser des concepts qui nous sont plus familiers, plus expressifs. A notre avis, investir c’est aussi promouvoir les droits des femmes et rendre plus visible la place des femmes. Concrètement, qu’est-ce-que cela veut dire?

Promouvoir les droits des femmes

Pour nous résumer, faire la promotion des droits des femmes consiste à mettre en œuvre des mécanismes qui favorisent le respect des droits des femmes à vivre libre de toute violence et discrimination; à avoir droit au meilleur état de santé, droit à l’éducation, le droit à la propriété, le droit de voter et le droit à un salaire égal. D’un continent à l’autre, mieux d’un pays à l’autre on peut noter des disparités. Il y a des pays qui sont plus avancés que d’autres. En ce qui nous concerne, comme Africains, travailler à promouvoir la dignité de la femme nous paraît un défi de taille. Remémorons-nous cette réalité que nous rappelle les Saintes Ecritures: «Au commencement, Dieu les créa homme et femme et leur donna la mission de poursuivre son œuvre». C’est pour dire que l’humanité c’est à la fois l’homme et la femme. Jamais l’un sans l’autre. D’où l’importance de promouvoir le respect mutuel de la dignité de la personne dans l’acceptation des différences.

C’est pourquoi, nous sommes appelés à nous accepter comme créatures à l’image et à la ressemblance de Dieu et comme égaux en droit et en dignité, dans la conscience que nous sommes différents. Cette différence, ne nous donne certainement pas la latitude de léser l’autre dans ses droits. D’où l’importance de lutter contre certains stéréotypes susceptibles de renforcer les comportements discriminatoires à l’égard des femmes. Facilement, on entend des propos du genre: «Les femmes ne construisent pas…»; «La femme ne garde pas de secret»; «Ah les femmes!». Promouvoir la dignité de la femme, c’est aussi l’accepter dans sa différence et l’aider à s’intégrer et à mettre en œuvre ses talents. Il est question d’accepter la femme simplement parce qu’elle est créée aussi à l’image et à la ressemblance de Dieu. Promouvoir les droits des femmes c’est accueillir la diversité en accueillant la femme avec dignité et en lui reconnaissant une place.

Une plus grande reconnaissance de la place de la femme

La reconnaissance de la place de la femme incombe à nous tous, hommes et femmes. Il y a des actes qui ont été posés, on ne saurait le nier. Il y a des textes juridiques qui reconnaissent à la femme ses droits. Mais beaucoup reste à faire de manière concrète. Pour les femmes, il y a un vrai travail à faire sur soi. C’est important de comprendre que le 8 mars n’est pas la fête du pagne, ni un jour de vengeance où on s’en prend aux hommes, en les obligeant à faire les tâches ménagères. Il est impérieux que les femmes prennent conscience de ce qu’elles sont, qu’elles soient fières de leur condition de femme et qu’elles s’estiment heureuses de l’être. La femme est la première responsable de son épanouissement personnel, de sa formation permanente. Il lui revient de prendre conscience de ses capacités et de s’engager à les mettre au service de sa communauté de vie, de la société, mieux de l’humanité. Malheureusement, les femmes sont souvent les premières à se sous-estimer, à décourager celles parmi elles qui essayent d’émerger, de s’engager. Elles sont malheureusement en première ligne pour opprimer la veuve et l’orphelin, en s’accaparant des biens laissés par leur  défunt frère ou fils. Comment parler de reconnaissance de la place de la femme quand elle-même ne croit pas à son émancipation; quand elle est la première à déserter son lieu de travail ou ne prend pas à cœur ses responsabilités, son travail? Comment lui reconnaître sa place, quand elle est totalement dépendante de l’homme: incapable de se prendre en charge; quand elle est exposée à la pauvreté et doit tendre la main pour survivre? Il est urgent pour la femme de continuer le combat pour une plus grande reconnaissance de ses droits et un plus grand respect de sa dignité.

Pour les hommes, reconnaître la place de la femme passe par l’acceptation  de la différence. C’est lui donner un espace d’expression. Comme le souligne le Pape François, «les hommes ont à écouter suffisamment les femmes»….Nous pouvons extrapoler en disant que les hommes ont beaucoup à apprendre des femmes. C’est pour dire tout simplement que les femmes ont toute leur place dans les espaces de paroles et même dans les cercles ou instances de décisions. C’est une invite, un appel à sortir de l’égoïsme, pour favoriser la diversité et accueillir cette diversité comme une richesse. Que les hommes fassent preuve de plus d’ouverture, qu’ils acceptent de quitter leur zone de confort pour entendre un autre son, une manière de penser différente. Il est important de prendre conscience que la présence des femmes et leur contribution à la vie sociale par la réflexion ou par l’action sont des réalités qui enrichissent la communauté de vie ou la société à différents niveaux.

C’est pourquoi, il est nécessaire que les hommes et les femmes travaillent main dans la main pour mettre fin aux stéréotypes et aussi aux obstacles professionnels qui freinent l’épanouissement des femmes et leur autonomisation: à titre d’illustration, nous pouvons citer la préférence pour certains chefs d’entreprise d’embaucher les hommes plutôt que les femmes  et aussi le manque de confiance en termes d’investissement et la différence de revenus homme/femme dans beaucoup de cas.

Pour conclure, homme et femme, c’est ensemble que nous sommes appelés à lutter pour mener à bien la mission commune qui nous incombe, celle de prendre soin de la création. C’est encore ensemble qu’il nous faudrait lutter contre certains préjugés ou freins culturels qui empêchent l’émergence ou l’émancipation de la femme. Que grandisse en chaque homme et en chaque femme, la conscience de la réciprocité et de la pratique d’une vraie collaboration! Homme, femme, nous sommes condamnés à marcher et à œuvrer ensemble dans le respect des différences et dans la complémentarité. C’est un défi de taille et nous sommes convaincus que c’est ensemble que nous y parviendrons. N’est-ce pas le moment de mettre en œuvre toutes les théories et toutes les bonnes résolutions adoptées en faveur du respect des droits des femmes? Jusqu’à quand, allons-nous continuer à préférer le dévouement des femmes à leur bon sens, à leur capacité à contribuer à la réflexion? A notre avis, une action communautaire nous semble nécessaire pour éviter que les femmes ne soient continuellement laissées pour compte.

                                                                                                                                    Sœur Thècle Saurelle                                                                                                   BAHAMBOULA

Religieuse de Notre Dame du Rosaire

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