Plus ça change, et moins ça change! Nous avons beau chanter et jurer, notre naturel revient toujours au galop. Servi par les mêmes ingrédients et les mêmes indicateurs; encouragé par tous les prétextes, des plus valables aux plus farfelus, qui se terminent par la promesse en des lendemains qui chantent. C’est un primat devenu celui de l’Afrique: le «plus jamais ça !» n’a aucun sens chez nous.
Le Mali vient de nous rappeler au souvenir de réalités pas si anciennes que cela finalement, même chez nous. Cela s’est passé mardi soir là-bas. Mais, finalement, comme tous nos pays sont logés à la même enseigne, nous avons suivi quasiment en direct le déroulé du film de déchéance d’un homme, en principe démocratiquement élu, et la montée en puissance d’un homme fort. Fort!.
Il est écrit que l’effacement de M. Ibrahim Boubakar Keita, IBK, fera place désormais à l’entrée en scène et l’affirmation de Assimi Goita. Un militaire comme il est prescrit au manuel du parfait coup d’Etat. Et qui sera boudé un temps par l’insaisissable communauté internationale, puis sera toléré, puis admis avec tapis rouge en bas de passerelles dans les principales capitales. Les admonestations et les sommations n’y feront rien: on commencera par l’appeler «colonel», puis il finira «Monsieur». La musique est connue.
Et même si les choses ne se passent pas vraiment ainsi suivant le scénario qui a fait ses preuves ailleurs, il est à parier que la finalité sera la même. Ceux qui arrivent commencent toujours par dénoncer un déficit de démocratie, un manque d’efficacité devant les graves problèmes de la Nation, puis ils plongent leurs mains dans le cambouis et s’étonnent qu’elles en ressortent poisseuses. Alors on fera exactement comme celui qu’on vient de déposer. Ou on fera pire.
Les peuples suivront, entre partisans et adversaires des différents camps, puis se résigneront à subir un sort qui était écrit d’avance, quels que soient la figure, le grade, le titre et les proclamations de celui qui entrera au palais après les pillages de rigueur. Les peuples suivront les intentions honorables des temps de grâce, où tout sera fait pour présenter M. Ibrahim Boubakar Keita comme un voleur, un menteur, un incapable.
Ils attendront peut-être en vain la concrétisation des promesses de normalisation dans un pays pris dans l’étau du djihadisme et les velléités de partition, alors que l’économie est mise à mal, notamment par un virus qui rode. C’est la quatrième fois que le Mali connaît cette situation. Ceux qui n’étaient pas nés du temps de Modibo Kéita (1968), ont applaudi l’arrivée de Moussa Traoré. Et ceux qui sont nés ensuite, ont trouvé dans Amidou Toumani Touré le vrai libérateur. A moins que celui-ci ne fût Amadou Sanogo…Mais comme Assimi Goita a trouvé des gens à convaincre, c’est donc que la liste est toujours ouverte: jusqu’à quand?

Albert S. MIANZOUKOUTA