Nous sommes encore entrés dans ce mois de douleurs de mars où, il y a 47 ans, du sang coula ici en abondance. Il ne fut épargné à personne. Militaires, civils, hommes d’Eglise : tout le monde passa par l’épée d’une cause qui, aujourd’hui encore, a du mal à dégager les acteurs véritables et tous les contours de leur agissement. Le Président Marien Ngouabi fut assassiné ; le Président Massamba-Débat aussi, un peu plus tard. Tout comme le Cardinal Emile Biayenda, le 22 mars 1977.
A quelques années du cinquantenaire de cette marée de sang, chacun garde ses convictions intactes. Et, à défaut de les exprimer clairement, chacun espère que l’Histoire finira par effacer l’émotion de ces jours-là. La suspicion s’est installée un peu durablement, mais chez le chrétien l’espoir demeure aussi que le Cardinal Biayenda, serviteur du Christ, suivra un jour jusqu’à la sainteté le destin de son divin maître. Qu’il sera béatifié, canonisé, le témoignage de sa vie d’innocence ne permettant aucun doute.
Les miracles les plus visibles seront pourtant la marche vers une nation réconciliée avec elle-même. Une nation qui comprenne l’inanité de faire couler du sang pour des fins politiques. Une nation qui admette que le sang déjà versé est suffisant pour nous amener à la sagesse des filles et fils appelés à vivre ensemble en harmonie. Des paroles en l’air et des pures incantations ? Sans doute, si l’on oublie que nous sommes aussi façonnés par le destin de Dieu. Déjà des miracles se sont produits depuis…
Ce mois de mars ressemblera à tous les autres si nous en décidons ainsi. Il sera symbole de notre refus des errances si nous en faisons le symbole d’une unité nécessaire. Un ciment de notre Histoire commune. Entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, devrait régner la conviction que la douleur partagée nous impose de lui donner un sens.

Albert S. MIANZOUKOUTA