Home National GOUVERNANCE PUBLIQUE : Peut-on encore gagner le combat contre la corruption ?

GOUVERNANCE PUBLIQUE : Peut-on encore gagner le combat contre la corruption ?

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Le palais de la justice

Les derniers faits présumés de détournements de fonds et d’enrichissement illicite à la direction générale des Impôts et à la douane imposent un constat : la corruption et le vol ont la vie dure au Congo, malgré les promesses maintes fois réitérées d’application d’une politique de tolérance zéro notamment par le président de la République.

Ces deux phénomènes et leurs corollaires touchent tous les secteurs d’activité. Un rapport publié en 2012 par l’ancienne Commission nationale anticorruption présidée par Lamyr Nguelé indique que «la fraude et la concussion sévissent à tous les étages de l’administration, des structures administratives de base jusqu’aux institutions. Des entreprises privées, quelle que soit leur forme, aux partis politiques. Même des structures comme les Eglises ne sont pas exemptes ».
Les impôts et la douane, deux mamelles des recettes de l’Etat, seraient contaminés. Ces derniers temps par exemple, les médias classiques et les réseaux sociaux n’ont cessé de relayer et de publier des montants qu’auraient détournés des hauts fonctionnaires et autres chefs et collaborateurs des services des impôts et de la douane. S’agissant des Impôts, le DG de cette structure est sous le coup d’une action judiciaire depuis le 3 avril 2024. S’il jouit d’une liberté provisoire après avoir payé une caution, d’autres agents impliqués dans la même affaire sont, eux, toujours écroués à la maison d’arrêt de Brazzaville, dans l’attente d’un éventuel procès.
Concernant la douane, 21 fonctionnaires indélicats sont incarcérés également à la maison d’arrêt depuis le 21 mars dernier.
Le mal, profondément enraciné dans certaines mentalités, est très difficile à combattre. Même le président Denis Sassou Nguesso est conscient que la tâche est dantesque, car s’attaquer à la corruption, c’est tenter de réformer l’ensemble du système politique et de la société. En 2016, le chef de l’Etat invitait à «la dénonciation et la cessation avec les antivaleurs (…) un véritable frein à la marche vers le développement». En 2017, il réitérait son propos : «Face à la fraude et la corruption, la concussion, le trafic d’influence, le laxisme, sanctionner restera la pierre angulaire de la gouvernance, sur l’autel de la législation et la réglementation en vigueur». En avril 2021, après avoir fait la critique de l’action de son gouvernement, il affirmait ne pas manquer «de courage» pour faire élaborer «une politique nationale de lutte contre la corruption» et appliquer «à l’encontre des détournements de fonds, de l’enrichissement illicite et du favoritisme, une politique de tolérance zéro». Et d’ajouter : «J’y veillerai, avec vigilance et sans faiblesse».
Les proclamations du chef de l’Etat n’ont pas été véritablement suivies d’effet. La plupart des enquêtes des commissions de lutte anti-corruption et des autres institutions habilitées contre les crimes financiers ont rarement abouti. Un exemple pour étayer cela : l’enquête concernant le ministère des Hydrocarbures portant sur le détournement d’une somme de 1,032 milliards de francs CFA destinés à la construction du siège de l’APPO (Organisation des producteurs de pétrole africains) à Brazzaville. «Nous avons démontré la culpabilité du ministre des Hydrocarbures», avait révélé le président de l’ancienne Commission nationale de lutte contre la corruption, Lamyr Nguélé. La justice n’a jamais pris le relais. Les magistrats eux-mêmes sont accusés d’être soudoyés. Et donc, la lutte contre les anti-valeurs se fait toujours attendre. Si le président de la HALC (Haute autorité de lutte contre la corruption) garde l’espoir de faire reculer le fléau, l’opinion publique n’y croira que «lorsque les prisons vont déborder de corrompus et de corrupteurs».

Jean ZENGABIO

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