Nous avons l’esprit tout entier tourné vers le coronavirus, ses effets, ses avancées inquiétantes, mais nous en oublierions presque que d’autres maladies continuent d’exister. Elles sont plus anciennes, plus familières, mieux étudiées mais pas pour autant moins meurtrières. Car même quand elles sont guérissables, leurs ravages nous valent chaque matin et soir ces longs cortèges de corbillards dans la ville.
Et aussi ces nombreuses veillées mortuaires qui sont devenues autant de clusters où le coronavirus se diffuse et se répand. Nous lamenter à l’infini ne servira à rien. Il nous faut seulement garder la pleine conscience que l’homme et la femme à guérir, aujourd’hui comme hier, c’est le citoyen de toujours. Celui grâce à qui nous avons construit les nombreux hôpitaux et centres de santé. Celui, en principe, pour lequel nous avons formé infirmiers et médecins.
Pendant un temps, en mars et en avril, c’est-à-dire au plus fort de l’anxiété suscitée par la montée en flèche du nombre de malades atteints du virus, nous avons eu l’impression que nos hôpitaux enregistraient (produisaient ?) moins de décès. Et, du fait que tout était silencieux, que les buvettes ne déversaient plus leurs tonnes de décibels, on s’est bercé de l’illusion d’une situation plus normale et plus calme. Le réveil est brutal aujourd’hui que tout a repris.
Nous ne pouvons malheureusement pas privilégier une pathologie plus qu’une autre ; une pandémie plutôt qu’une autre. Toutes sont nocives, prégnantes et mortelles. Toutes méritent une attention de la part de nos gouvernants. D’autant qu’elles se compénètrent parfois : ce n’est pas parce qu’on est atteint du coronavirus que l’on ne peut contracter une tuberculose ou, banalement, un palu !
C’est une autre leçon à retenir de la pandémie qui nous angoisse aujourd’hui: nous devons avoir un personnel mieux formé, plus éthique. Des hôpitaux plus fonctionnels. Car la santé de tous fait la santé d’une nation. Nous avons enregistré des cas diagnostiqués comme coronavirus, mais qui se sont «simplement» révélés des crises d’emphysèmes ou d’asthme. Mais toutes ces maladies sont autant de défis à relever.
Qu’on n’y ajoute donc pas le mépris qui, hélas, accueille le malade aux urgences. Ni les ordonnances kilométriques dont on fait commerce ensuite au décès programmé de celui qu’elles devaient sauver. Des états généraux de la Santé s’imposent; de grandes messes qui s’ajouteront à une longue liste d’autres ruineux et inutiles comices du genre, c’est vrai. Mais si la chloroquine reste la même hier comme aujourd’hui, il n’est pas sûr qu’il faille l’administrer aujourd’hui comme nous avons toujours fait.
C’est une vue de l’esprit de penser tirer du positif d’une situation d’angoisse généralisée, sans doute. Mais on ne peut pas dire que nos sociétés sortiront de cette pandémie comme elles y sont entrées. Tant qu’à faire, saisissons là l’opportunité pour ce coup de fouet général qui nous ébrouerait en tout. Nous avons à nous secouer pour sortir du double langage, du mensonge en politique, de la corruption, de la violence… Les admonestations et les critiques n’ont rien pu y faire, peut-être qu’un virus y réussira.

Albert S. MIANZOUKOUTA