Il est des visiteurs de notre pays qui se réjouissent de la paix et de la sécurité apparentes dans nos villes et nos villages. Nous sommes, nous-mêmes surpris que cela soit le premier point remarqué par des étrangers. Peut-être que, habitués, nous ne faisons plus attention. Ou que, au contraire, comme faisait remarquer un confrère, nous savons tellement dissimuler nos délinquances que nos rues tortueuses ne livrent pas d’un coup au regard étranger toute la saumure de leurs traquenards et les Al Capone dont elles regorgent.
A Pointe-Noire, à Brazzaville (plusieurs fois ces derniers jours), à Dolisie et à Kinkala, Nkayi des assassinats ont été rapportés. Des cas de vols et de viols ; des agressions. Mais ne rendons pas les choses plus noires qu’elles ne sont. Ceux qui peuvent faire la comparaison, vous parlent de certaines villes étrangères qui sont de véritables coupe-gorges. Il y en a chez qui se promener avec un téléphone à l’oreille est une véritable invite à la violence du vol.
Nous n’en sommes pas là, mais de nombreux signes montrent que nous n’en sommes pas loin. A Fond-Tiétié, à Pointe-Noire, à Manianga (Brazzaville), à Total (Bacongo) de solides réputations commencent à se faire. Le chauffeur de taxi remonte instantanément la vitre et appuie sur le champignon lorsqu’on y passe. C’est seulement après qu’il avertit : «A certaines heures ici, c’est dangereux». A certaines heures…
Nous savons cela et nous fonctionnons avec nos cartes virtuelles de la dangerosité non virtuelle de nos cités. Nous ne pouvons, naturellement pas, artificiellement susciter de l’inquiétude. Ni donner l’impression qu’il nous manque des frissons journaliers pour bien nous porter. Un commissariat de police a été ouvert carrément dans une cour d’école à Brazzaville la semaine dernière. Les parents d’élèves et les riverains se disent soulagés. C’est le signe que tout à Agostinho Neto ne marchait pas paisiblement.
Mais, est-il impossible que nous retrouvions ces années où, si quelqu’un s’en trouvait la force, pouvait marcher dans la nuit profonde de La Tsiémé au Pont du Djoué sans se retourner toutes les dix secondes? Le taximan qui m’a dévalisé en plein jour jeudi dernier s’était fait passer pour un policier en civil… Nous sommes au point de jointure où un assassinat + un cambriolage + une escroquerie finissent par assombrir l’image verte d’une ville paisible. Prenons les moyens de ne pas basculer dans le versant du non-retour négatif.
Albert S. MIANZOUKOUTA