Les auteurs de l’hymne national ‘’La Congolaise’’ sont à la fois connus et méconnus des Congolais. Cette année marquant le 60è anniversaire de l’Indépendance du Congo est l’occasion idéale pour reparler d’eux, et évoquer le contexte historique dans lequel l’hymne national a vu le jour.

C’est Joseph Spadilière, Jean Royer, des compositeurs, et Jacques Tondra (de nationalité française) et Georges Kibanghi (de nationalité congolaise) qui furent les co-auteurs des paroles. Tous sont décédés. Le dernier a quitté ce monde est Jacques Tondra, en février 2014, en France.
‘’La Congolaise’’, c’est le chant national officiel. Il est un chant patriotique qui incarne l’union de tous les enfants et citoyens du Congo-Brazzaville, vu son sombre passé. Elle a été adoptée par la loi constitutionnelle n° 10 du 21 novembre 1959, date à laquelle l’abbé Fulbert Youlou est élu Président de la République. Le refrain de cet hymne national intègre la devise qui s’articule autour de l’unité-travail-progrès. Il a quatre strophes dont l’une constitue un refrain.
La naissance de la Congolaise, affirme l’historien Célestin-Désiré Niama dans un bref aperçu historique sur l’hymne national «n’est pas un fait du hasard. Sa présence fut pour les optimistes un éveil de conscience dans l’esprit des hommes politiques. Elle leur a permis d’intérioriser le refrain de ses paroles, pourtant combien moralisantes et constructives pour l’avenir de la République du Congo afin d’éviter les déviances qui l’ont conduite à des guerres civiles, purement meurtrières. La Congolaise est née pour mettre fin aux différends de chaque communauté morale. Parce que, avant sa naissance, le pays sous la colonisation fut un théâtre du désordre sanglant, notamment la première guerre civile du 2 janvier 1956 et celle du 15 février 1959.»
Ces deux épisodes aussi sombres, poursuit-il, «ont teinté le Congo de sang, dans la violence, la barbarie. A cette époque, donc avant l’indépendance, vivre en communauté entre les ethnies congolaises fut une chose impossible à cause de la vie politique teintée de l’instinct grégaire du tribalisme, et du régionalisme. Les Congolais ne pouvaient plus vivre dans la diversité, dans l’unité et dans la paix. Parce que le tribalisme ou l’ethnocentrisme fut un catalyseur de la société congolaise. L’union nationale était devenue une imagination, malgré le référendum et la naissance de la République, le 28 novembre 1958 ».
Le constat du désordre causé par ces deux guerres civiles, qui illustrèrent l’impossibilité de l’union nationale et de la paix, explique l’historien Niama, «poussa l’abbé Fulbert Youlou, grand homme politique qui représenta la partie Sud et Jacques Opangault, la partie septentrionale du pays, à penser qu’il était temps de réconcilier les filles et fils du Congo, peu importe leurs divergences ethniques. Ce qui permet à l’abbé Fulbert Youlou, devenu Vice-Président du Conseil en lieu et place de Jacques Opangault, très vite d’ailleurs, d’adopter par la loi constitutionnelle n° 10 du 21 novembre 1959, l’hymne national ‘’La Congolaise’’, qui a vu le jour au même moment que la proclamation de la République du Congo et ses symboles ».
Mais il importe, pour les besoins d’histoire, de dire que l’hymne national ‘’La Congolaise’’ était en pleine compétition avec un autre chant appelé ‘’Allons Congo’’, l’hymne concourant, battu par ‘’La Congolaise’’ au cours d’un vote à l’Assemblée nationale (9 voix contre 44), était l’œuvre de deux Européens, Jo Noves et Stéphane May. La particularité de ‘’La Congolaise’’, c’est qu’elle suscite une communion des hommes vers des actions communes pour un développement durable. Son objectif, à cette époque, a permis de tourner la page sombre de l’histoire à travers les guerres civiles qu’a connues le Congo. L’hymne national a une importance capitale dans la vie des hommes.
«L’hymne traduit la manière dont les ressortissants d’un même Etat se présentent à eux-mêmes et au reste du monde. Il est un chant qui conscientise les âmes d’un peuple. Et met fin à l’obscurantisme du passé pour apporter de la lumière au sein d’une République. Sur le plan sémiologique, l’hymne représente un signe, il participe de la construction et de l’expression au mythe de l’Etat moderne. Sa dimension symbolique et référentielle est incontestable. Mais nombreux des Congolais ne l’ont pas compris», affirme Bienvenu Boudimbou, auteur de: ’’Regard critique sur les hymnes nationaux des pays d’Afrique noirs francophones».
L’hymne national ‘’La Congolaise’’ devrait être au-dessus de toute chose, parce qu’il constitue l’incarnation du bien et de la vertu. Il permet aux Congolais, à travers son fond et sa forme, de comprendre que le sujet pensant n’est pas la seule réalité existante.
‘’La Congolaise’’ a été restaurée par la Conférence nationale souveraine en 1991, 23 ans après son abolition. Il avait été remplacé le 31 décembre 1969 par ‘’Les Trois glorieuses’’.

Alain-Patrick
MASSAMBA