Après l’Ordre des pharmaciens, le tour est au syndicat national des pharmaciens du Congo de monter au créneau le 7 décembre dernier. Au cours d’une assemblée générale extraordinaire, le bureau exécutif national a condamné l’injonction faite, selon lui, par le procureur général près la Cour d’appel aux grossistes de pouvoir livrer en médicaments Mr Abdoul Madjid Traoré, un sujet malien, qui tient à ouvrir une officine pharmaceutique au Congo. Il en avait obtenu l’autorisation du ministre de la Santé et de la population en 2017 sans pourtant qu’il ne soit inscrit à l’Ordre. Un délai de sept jours a été accordé aux autorités compétentes afin d’annuler cette autorisation, faute de quoi, un mouvement de grève sera observé sur toute l’étendue du territoire.

La réunion avait à son ordre du jour un seul point: l’affaire Abdoul Madjid Traoré qui dérange les pharmaciens. Son objectif était de réfléchir sur les actions à mener pour mettre un terme définitif à cette affaire qui fait couler tant d’encre et qui risque de discréditer l’Ordre des pharmaciens, si jamais la politique prenait le dessus sur le droit.
En réalité, Mr Abdoul Madjid Traoré ne peut pas ouvrir une officine pharmaceutique au Congo. Et pour cause, l’article 29 de la loi créant l’Ordre dispose que nul ne peut exercer son art, s’il n’est inscrit à l’un des tableaux de l’Ordre des pharmaciens.
Mr Abdoul Madjid Traoré n’étant pas inscrit à l’Ordre, veut faire un passage en force, en bravant l’institution ordinale qui ne compte pas baisser les bras et avec elle, le syndicat national des pharmaciens du Congo.
Mr Jean Charles Claude Ongoli, président du conseil national de l’Ordre des pharmaciens, a, au cours de cette réunion, fait un dernier rappel de l’évolution de l’affaire. Pour lui, elle n’a pas connu son épilogue. «Deux requêtes ont été introduites au niveau de la Cour suprême. Notre conseil dans cette affaire s’y est pris avec beaucoup de retard, la Cour a jugé irrecevable ces requêtes. Sur la base de cette décision, Mr Madjid pense qu’il peut s’installer parce que la Cour suprême nous aurait déboutés. La Cour a dit le droit sur la forme et non sur le fond. Le procureur général près la Cour d’appel a fait une injonction aux grossistes de pouvoir livrer Madjid. Ce qui est aberrant parce que nous sommes une profession libérale et indépendante. Ce qui fait qu’aucune institution ne peut donner d’injections aux pharmaciens inscrits à l’Ordre», a-t-il déclaré.
Et d’indiquer: «Nous avons fait une rétractation pour que cette injonction soit annulée. Entre temps, nous avons réuni les trois grands grossistes du pays. Il avait été décidé que tant que Mr Madjid n’était pas inscrit à l’Ordre, aucun grossiste ne peut le livrer. Le conseil national de l’Ordre doit poursuivre les démarches pour que Mr Madjid n’exerce pas la pharmacie au Congo. Il est Congolais d’origine malienne et la réciprocité d’exercice de la pharmacie n’existe pas entre son pays et le nôtre. Mr Madjid est en train de s’agiter avec l’injonction qu’il a reçue pour pouvoir être livré. Les grossistes lui font savoir qu’ils ne peuvent pas le livrer tant qu’il n’est pas inscrit à l’Ordre. J’ai fait signer le relevé de conclusions de la réunion avec les grossistes. Ils étaient unanimes, mais il y a ceux qui ne veulent pas le signer. La faculté de pharmacie du Mali sort au moins 1000 pharmaciens par année. Mr Madjid est Congolais désormais, il va prendre et adopter les enfants de ses frères, sœurs et cousines pour les amener au Congo et vont tous ouvrir des pharmacies. Nous avons intérêt à faire que cela s’arrête. Si nous arrêtons ce combat, on est tous perdants. Et si Madjid s’installe, l’Ordre n’aura plus sa raison d’exister. L’article 26, alinéa 5 de la loi instituant l’Ordre, dispose que le conseil national de l’Ordre national des pharmaciens du Congo agrée les demandes de création d’établissements pharmaceutiques après traitement et étude par la direction des pharmacies, du médicament et des laboratoires, un arrêté du ministre de la Santé publique sanctionne cet agrément. Et le décret n°88/430 du 6 juin 1988 fixant les conditions d’exercice libéral de la médecine et des professions paramédicales et pharmaceutiques dispose en son article 13 que le ministre de la Santé délivre une autorisation provisoire d’un an».
Fort de cela, le syndicat national des pharmaciens du Congo pense que l’autorisation délivrée à Mr Abdoul Madjid Traoré par Mme Jacqueline Lydia Mikolo, à l’époque ministre de la Santé et de la population, n’est pas conforme parce que ne répondant pas aux critères édictés par la loi.
Après le délai de sept jours accordé aux autorités compétentes, faute de quoi, un mouvement de grève sera observé, le bureau exécutif national du SYNAPHAC s’est retrouvé le 13 décembre pour décider de la suspension temporaire du préavis de grève. En attendant le retour de l’autorité compétente, un moratoire de quelques jours a été donné l’administration pour procéder à l’annulation pure et simple de l’autorisation de création et d’ouverture d’une officine pharmaceutique délivrée à Mr Abdoul Madjid Traoré.

Cyr Armel YABBAT-NGO