Le Cameroun s’est rendu aux urnes dimanche 9 février dernier, dans le cadre des élections législatives et communales qui se sont déroulées sous tension, surtout dans les régions anglophones du Nord-ouest et du Sud-ouest. Ce double scrutin permettra au pays de renouveler son Parlement notamment la chambre des députés à l’Assemblée nationale et doter les communes de nouveaux conseillers municipaux. Plusieurs fois reportées, ces élections se tiennent alors que le paysage politique du Cameroun est demeuré dans un climat délétère ces trois dernières années. Les résultats sont attendus dans les tout prochains jours.

La loi du pays prévoit que les résultats de ces élections puissent être publiés dans les trois semaines qui suivent le scrutin. Au lendemain du vote, Elections Cameroon (ELECAM) organe chargé de son organisation, a débuté le dépouillement et la compilation des résultats. Le scrutin a été caractérisé par un fort taux d’abstention presque jamais enregistré auparavant, et a mobilisé principalement les électeurs du parti au pouvoir le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), ceux du Front démocratique et social (SDF), parti fondé par l’historique opposant John Fru Ndi, du parti du jeune leader Cabral Libi. Le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto, principal opposant de Paul Biya est l’une des formations politiques de l’opposition qui ont choisi de boycotter ce double scrutin.
Si dans certaines régions du pays comme le Centre, le Littoral ou l’Extrême nord les électeurs se sont timidement mobilisés; dans la partie anglophone notamment à Bamenda, Buea, Cumba, le vote a été exercé surtout par les agents des forces de l’ordre ou simplement boycotté. Dans ces localités, les séparatistes sont toujours aux prises avec les forces de défense et de sécurité, empêchant ainsi le bon déroulement du scrutin. Ce que minimise le pouvoir qui s’est plutôt félicité de ce vote qu’il considère comme démocratique et transparent. Les ONG de défense des droits de l’homme dans le pays ont elles aussi donné de la voix, en dénonçant un vote irrégulier: une mascarade.
Comme un peu partout dans la sous-région, ce scrutin organisé après des reports depuis 2018 n’a malheureusement pas permis d’élaguer les principales irrégularités tant dans les préparatifs que dans son déroulement proprement dit. Il n’a fait qu’exacerber les tensions au sein des états-majors politiques et même dans le pays. Les véritables freins au processus demeurent la révision du fichier électoral, l’égalité des chances pour tous les candidats, le déroulement du scrutin sur l’ensemble du territoire en tenant compte du statut des régions anglophones dévastées par les conflits armés, la non-prise en considération des alertes souvent lancées par les hommes d’Eglise et la société civile, dont les appels des évêques qui sans cesse invitent à des élections apaisées.

Azer ZATABULI