La fin d’une si longue attente. Après deux échecs en finale (2002 au Mali et 2019 en Egypte), le Sénégal est, enfin, champion d’Afrique. Il a remporté dimanche 6 février 2022 au Stade d’Olembé, à Yaoundé, la finale de la 33e édition de la Coupe d’Afrique des nations de football aux dépens de l’Egypte. Aux tirs au but (4 tirs réussis contre 2. Temps réglementaire : 0-0). Le Cameroun, hôte de la compétition pour la deuxième fois après celle de 1972, complète le podium.
Dans la capitale égyptienne, pas d’âme qui vive. Tout est figé. Les rues sont désertes. La déception gronde. Opprobre ou deuil ? Ce qui se passe à ce moment-là ne dit pas son nom. Les Pharaons, la prestigieuse formation sextuple championne d’Afrique, sont passés à côté de leur sujet. Ils n’ont pas réussi la passe de huit qui leur aurait permis d’asseoir un peu plus leur hégémonie sur le continent.
De l’autre côté, à Dakar, le petit peuple est secoué par une joie indescriptible. La fête a été longue, toute la nuit, comme l’a été l’attente de ce tout premier titre de l’histoire du football du pays: un peu plus d’un demi-siècle, 57 ans exactement, depuis la première participation du Sénégal à une phase finale de Coupe d’Afrique en Tunisie en 1965. Il jubile. Il danse. Le président Macky Sall aussi n’y résiste pas. Depuis Addis-Abeba où il présidait le sommet de l’UA (Union africaine), il octroie aux travailleurs sénégalais un jour de congé chômé et payé (lundi 7 février 2021) pour accueillir les héros de Yaoundé et célébrer l’événement. «Champion d’Afrique ! Quel match ! Quelle équipe ! Vous l’avez fait. Beau moment de football, beau moment de communion et de fierté nationale. Félicitation à nos héros », écrit-il dans un tweet.
Pour vingt-quatre heures, le peuple sénégalais est heureux. Il oublie son tracassin quotidien. Son trophée en or suffit. Non ! De son côté, le président Macky Sall ne voulait pas partir comme ses prédécesseurs Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade sans avoir embrassé la prestigieuse Coupe d’Afrique des nations. Il peut maintenant être en paix…: il «consomme» son dernier mandat, à moins de décider de braver la Constitution.
Mais quelle finale que celle de Cameroun-2021!
La finale de 2021 n’est certainement pas la plus belle ni la plus longue de l’histoire de la CAF commencée en 1959. Par contre, comme d’autres avant celle de cette 33e édition de la CAN, la consécration des Lions sénégalais a tardé à se dessiner. Elle fuyait. Dangereuse pour les cardiaques. Pour la neuvième fois (1982, 1986, 1992, 2000, 2002, 2006, 2012, 2015 et 2021), elle a emprunté la voie des tirs au but. Consciente de ses insuffisances physiques (prolongation et tirs au but face à la Côte d’Ivoire en huitième de finale et face au Cameroun en demi-finale; prolongation sans tirs au but en quarts de finale face au Maroc), l’Egypte a verrouillé son but par un dispositif défensif impressionnant. Le cadenas a bien fonctionné, ce que certains spécialistes qualifient de négation du football. Pourtant il en a été de même ou presque du côté sénégalais. Cette neutralisation systématique et réciproque a quelque peu stérilisé les débats.
Cependant, cela ne dit pas que la finale a été simplement plate ou sevrée d’occasions franches de but, au contraire. L’absence de but est due aux maladresses qu’ont accumulées les attaquants, à l’image du Sénégalais Sadio Mané qui a raté un penalty en début de partie. Et à l’excellent métier des gardiens de but. Assez largement suffisant pour ôter son piment à ce qui aurait pu être une fête totale du football, à la place de cette exhibition agaçante. Mais les dieux étaient cette fois sénégalais et leurs godasses à crampons ont quatre yeux…pour fixer le ballon des tirs au… but !
C’est finalement une finale honnête qu’a remportée le Sénégal. Et pour le faire, Aliou Cissé a utilisé Edouard Mendy, Bouna Saar, Kalilou, Gana Gueye, H abib Diallo, Baba Dieng, Saliou Ciss, Diedhhou, Ismailia Saar, Kouyaté, Abdou Diallo, etc.
Le meilleur joueur du tournoi est sorti de ce groupe : Sadio Mané (29 ans). Au Cameroun le meilleur buteur: Vincent Aboubakar qui, avec 8 buts, était à un but d’égaler le recordman des buts inscrits en une édition, feu Ndaye Mulamba de la RDC (9 buts en 1974).
Enfin, il faut signaler que la petite finale (match de classement pour la troisième place) restera dans les annales. Le Burkina Faso menait 3-1 à la 86e minute avant de s’écrouler. Deux buts du Cameroun en quatre minutes, pas de prolongations et les tirs au but qui tournent à l’avantage des Lions indomptables. Le Cameroun, frappé par la malédiction à domicile en demi-finale comme il y a 50 ans, sauve sa CAN. Mais les Etalons burkinabè peuvent quitter la CAN fiers de leur parcours.

Jean ZENGABIO