Ouvertes le lundi 10 octobre 2022, au Centre interdiocésain des œuvres (CIO) à Brazzaville, sur le thème: «L’Eglise famille de Dieu qui est au Congo: synodalité, communion et participation» «le corps en effet, ne se compose pas d’un seul membre, mais de plusieurs 1 Cor 12, 14)» les assises de la 51è assemblée plénière de la Conférence épiscopale du Congo (CEC) se sont achevées le dimanche 16 octobre, par une messe solennelle célébrée en la Basilique Sainte-Anne du Congo. L’eucharistie était présidée par Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou, archevêque métropolitain de Brazzaville et de la Province ecclésiastique du Centre (PEC), président de la Conférence épiscopale du Congo.

En présence de NN.SS Urbain Ngassongo, évêque de Gamboma et de la Province ecclésiastique de Centre, vice-président de la CEC; Victor Abagna Mossa, archevêque d’Owando et de la Province ecclésiastique du Nord (PENORD); Miguel Angel Olaverri Arroniz, archevêque de Pointe-Noire et de la Province ecclésiastique du Sud-Ouest (PESO); Daniel Mizonzo, évêque de Nkayi et de Province ecclésiastique du Sud-Ouest; Daniel Franck Nzika, évêque d’Impfondo et de la Province ecclésiastique du Nord; Ildevert Mathurin Mouanga, évêque de Kinkala et de la Province ecclésiastique du Centre; Gelase Armel Kema, évêque de Ouesso et de la Province ecclésiastique du Nord; Toussaint Ngoma Foumanet, évêque de Dolisie et de la Province ecclésiastique du Sud-Ouest; Javier Herrera Corona, nonce apostolique au Congo et au Gabon. Plusieurs prêtres, parmi lesquels les recteurs des trois grands séminaires, les secrétaires généraux de la CEC et de l’association des Conférences épiscopales de la région de l’Afrique centrale (ACERAC), ainsi que diverses Congrégations religieuses. Placée sous l’animation liturgique de la chorale Les Piroguiers du Congo de la Basilique Sainte-Anne, cette messe a connu la présence de M. Dieudonné Bantsimba, président du Conseil municipal et départemental, député-maire de Brazzaville; de Mme Lydie Pongault, ministre de l’industrie culturelle, touristique, artistique et des loisirs; des parlementaires, ainsi que d’autres autorités civiles et militaires. Le personnel du Journal La Semaine Africaine conduit par son directeur de publication Albert Mianzoukouta, était parmi les participants à cette messe pour rendre grâce à Dieu pour les 70 ans de ce Journal.
Le rite d’entrée terminé, Mme Emilie Aïssi, vice-présidente du Conseil pastoral paroissial a prononcé le mot de bienvenue à tous les invités. La lecture du communiqué final des travaux par l’abbé Armand Brice Ibombo, secrétaire général de la CEC, suivi du message de félicitation du Pape François adressé à la Conférence épiscopale du Congo, lu par Mgr Javier Herrera Corona, nonce apostolique au Congo et au Gabon.
Dans son homélie, Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou a qualifié les assises de grande réussite de par la qualité des exposés développés par les experts. Avant d’exhorter le peuple de Dieu, en prenant appui sur l’évangile du jour dans Luc 18, 1-8 qui parlait de la parabole du juge qui se fait prier longtemps. «Prier constamment et de ne pas se décourager». Avant la fin de la messe, Mgr Ildevert Mathurin Mouanga a rendu public le message des évêques du Congo. Ensuite, le président de la Conférence épiscopale a déclaré close la 51e Assemblée plénière des évêques du Congo et par la même occasion, lancé les festivités du 140e anniversaire de l’évangélisation du Congo qui seront célébrées en 2023.

Pascal BIOZI KIMINOU

MESSAGE DES EVEQUES DU CONGO

 

Préambule
1. Réunis, à Brazzaville, au Centre interdiocésain des œuvres (CIO), pour la 51e assemblée plénière, du 10 au 16 octobre 2022, sur le thème: «L’Eglise famille de Dieu qui est Congo: synodalité, communion, participation et mission», «Le corps en effet n’est pas composé d’un seul membre» (1 Co 12, 14), nous archevêques et évêques du Congo, vous adressons, à vous Peuple de Dieu, femmes et hommes de bonne volonté, ce message.
1- Contexte et but
2. Notre 51e assemblée plénière s’est déroulée après la célébration du jubilé d’or des 50 ans de notre Conférence épiscopale (1971-2021). L’année jubilaire a été pour nous l’occasion de jeter un regard attentif et critique sur la vie de notre Eglise locale et d’évaluer l’action pastorale des évêques du Congo, réunis en Conférence épiscopale depuis 1971. Nous avons vu ce qui a été fait, mais aussi ce qui n’a pas été fait. Ce temps de grâce nous a également permis de poser les jalons de la nouvelle ère de la Conférence épiscopale du Congo, en route vers son centenaire.
3. En cette année pastorale 2022-2023, l’Eglise du Congo va célébrer le 140e anniversaire de son évangélisation (1883-2023). Une occasion de vivre cet événement joyeux dans l’esprit de synodalité, en vue de la participation active de tous à la mission du Christ: l’annonce de la Bonne-Nouvelle du Royaume.
4. Cette 51e assemblée plénière s’inscrit dans la démarche synodale préconisée pour les préparatifs de la 16èmeassemblée générale du synode des évêques prévue pour octobre 2023, à Rome. Prélude à cet événement mondial, le Saint-Père a lancé la marche synodale dans tous les pays, avec pour thème: «Pour une Eglise synodale: communion, participation et mission».
5. Ce thème, expression de notre communion avec le Pape François, a fait l’objet de nos assises. Pour le Pape François, «Le chemin de la synodalité est précisément celui que Dieu attend de l’Eglise du troisième millénaire» (Pape François, Discours pour la commémoration du 50e anniversaire de l’institution du Synode des évêques, 17 octobre 2015). En effet, la synodalité est un impératif pastoral pour l’Eglise de notre temps, voire une urgence dans la relance de la nouvelle évangélisation en terre congolaise. L’objectif est d’inviter le Peuple de Dieu qui est au Congo à cheminer ensemble, dans la communion, en vue de la participation active de tous à la mission.
2. Notion de synodalité
6. Le mot synodalité vient du mot synode, qui est composé de deux mots grecs: Sun, qui veut dire «avec» et Odos, «chemin», «route», «voie». Le mot synode signifie faire route ensemble, marcher ensemble, prendre le même chemin, ou suivre la même direction. La synodalité désigne donc le processus par lequel, les enfants de Dieu travaillent ensemble, dans un véritable esprit de collaboration sincère et authentique pour la même cause. «Notre marche ensemble est de fait, ce qui réalise et manifeste le plus la nature de l’Eglise comme Peuple de Dieu pèlerin missionnaire» (Cardinal Mario Gresch, Document préparatoire au synode, p. 2).
7. Adopter la notion de synodalité, c’est opter pour le «nous», penser et agir en équipe, en synergie, en communion, conjuguer nos efforts pour la même cause et la même mission. Notre Eglise locale sent le besoin de retrouver la synodalité, la marche ensemble contre la tentation du narcissisme pastoral, du repli sur soi, de l’enfermement identitaire ou culturel, de l’isolement et du rejet. La synodalité prône l’ouverture, car elle «est une expérience d’incarnation qui nous met à l’écoute du réel, à l’écoute des cris et des besoins du monde. Elle est une façon d’être et de travailler ensemble dans l’écoute et dans le discernement, pour parvenir à des choix pastoraux répondant à la réalité. La synodalité est (…) un appel à changer dans une Eglise en mouvement» (cf. Sr Nathalie Becquart, Révue Christus, n. 270, avril 2021).
3. La synodalité dans la Bible
8. Plusieurs passages des Saintes écritures renvoient à la réalité synodale, qui se présente comme marche de Dieu avec l’homme et des hommes entre eux. La Bible révèle un Dieu créateur qui communique et crée la communion autour de lui. Déjà dans l’Ancien Testament, Dieu a voulu l’homme à son image et à sa ressemblance (cf. Gn 1, 26-28), comme un être social, appelé à collaborer avec lui dans la communion. Malgré le péché qui a brisé cette communion (cf. Gn 3), Dieu renouvelle l’alliance pour ramener l’homme à lui (cf. Gn 9, 8-17; Ex 19, 24; 2 S 7, 11).
9. A travers les prophètes, Dieu continue de parler à son Peuple pour qu’il soit toujours fidèle à son Alliance. Voilà pourquoi les prophètes invitent le Peuple à la conversion du cœur vers Dieu et à la justice (cf. Jr 37, 21; 38, 1). Pour que cela se réalise, Dieu promet de donner un cœur nouveau et un esprit nouveau (Ez 11, 10), pour ouvrir devant son Peuple le chemin d’un nouvel exode (cf. Commission théologique internationale, La synodalité dans la vie et la mission de l’Eglise, p. 30-31).
10. Dans le Nouveau Testament, Dieu renouvelle son alliance en Jésus-Christ, sauveur de l’humanité, qui le révèle au monde comme communion d’amour (cf. Jn 1, 1-3). N’agissant pas seul, Jésus fait en toutes choses la volonté du Père (cf. Jn 14, 10). Il est le pèlerin qui proclame la Bonne-Nouvelle (cf. Lc 4, 14-15; 8, 1), annonce le chemin de Dieu (cf. Lc 20, 21) et indique la direction (cf. Lc 9, 51-19, 28). Il est Lui-même le chemin (cf. Jn 14, 6) qui mène au Père, communiquant aux hommes dans l’Esprit Saint (cf. Jn 16, 13) la vérité et la vie de communion avec Dieu et avec les frères. «Vivre la communion selon la mesure du commandement nouveau de Jésus signifie marcher ensemble dans l’histoire comme Peuple de Dieu de la nouvelle alliance, d’une manière qui correspond au don reçu (cf. Jn 15, 12-15)» (cf. Commission Théologique Internationale, p. 33).
11. C’est dans le livre des actes des apôtres que nous trouvons la première forme de l’Eglise synodale, l’exemple d’une vie de communion et du vivre-ensemble à travers la première communauté chrétienne: «La multitude de ceux qui étaient devenus croyants n’avait qu’un seul cœur et une seule âme…ils mettaient tout en commun» (Ac 4, 32). Cette nouvelle communauté est le fruit du Saint-Esprit reçu le jour de la Pentecôte (cf. Ac 2, 1-12), qui fait de nous le corps du Christ, où chacun a sa place et son rôle à jouer (cf. 1 Co 12, 12-17; Rm 12, 4-5; Ep 4, 4). D’autres épisodes importants nous révèlent aussi la dimension synodale dans l’Eglise naissante, par exemple le concile de Jérusalem, où les Apôtres se mettent ensemble pour régler le problème des divisions, des injustices, de la discrimination au sein de l’Eglise naissante (cf. Ac 6, 1-7). Tous ces exemples cités et bien d’autres encore témoignent de l’importance de la réalité synodale dans les Saintes écritures.
4. La synodalité dans
l’Enseignement de l’Eglise
12. La synodalité désigne au niveau de l’Eglise particulière ce que la conciliarité signifie au niveau de l’Eglise universelle. Il s’agit d’une propriété de l’Eglise qui découle de sa nature. Il y a l’idée d’une relation entre les fidèles qui œuvrent pour l’unique mission, chacun prenant sa part, selon son rang et ses ressources. Il est mieux de parler de synodalité comme communion interne à une Eglise particulière. Il s’agit de la réalité communionnelle de l’Eglise qui se déploie dans une Eglise particulière, en un lieu. Par le baptême, une fraternité nous est offerte, des sœurs et des frères nous sont donnés.
13. Ainsi, le baptême introduit dans une communion qui instaure des relations nouvelles avec Dieu et les autres. Les baptisés, disciples du Christ ne se sont pas choisis, ils se découvrent «ensemble», convoqués par Dieu. Le même Esprit par lequel Dieu communique sa vie et se révèle, demeure dans le cœur des croyants en même temps qu’il les met en relation pour la même mission. C’est donc le baptême qui fonde la participation de tous les fidèles à l’unique mission de l’Eglise. Celle-ci est une réalité liée à l’incorporation baptismale et ecclésiale. Elle atteste de la vraie communion dans l’Eglise. En fait, c’est l’Esprit qui opère l’unité et fonde la communion. Il nous faut sans cesse l’invoquer, demander au Seigneur de nous l’envoyer afin que nous soyons vivifiés de la vie même de Dieu.
14. La communion est un don suscité par l’Esprit comme son principal agent et artisan. Ce don est précieux pour l’Eglise, pour nos communautés et pour la réalisation ensemble de la même mission et le rayonnement de l’Eglise. Les disciples du Christ la réalisent en un lieu par l’accueil de la parole de Dieu dans la foi, la communion et la mission donnée à tous. En fait, la communion des baptisés est manifeste par leur participation à l’eucharistie et grâce à l’aide de l’Esprit Saint qui édifie le corps ecclésial par ses dons multiples et divers, les charismes variés donnés à chacun en vue du bien de tous (Cf. Rm 12, 6-18; 1Co 12, 7-10 et 28-31).
15. Il faut dire que l’eucharistie nourrit la coresponsabilité de tous les baptisés dans la vie et le témoignage de l’Eglise. Tous les baptisés participent à l’édification de l’Eglise mais «chacun selon sa condition propre» (Lumen Gentium n. 32). Cette coresponsabilité de tous les baptisés est diversifiée en fonction des vocations, charismes et ministères. Ainsi, chacun, à sa façon et dans l’unité, participe à la construction de l’œuvre commune (cf. Lumen Gentium, n. 30). La synodalité suggère bien la convergence et l’apport de tous les baptisés. La coresponsabilité comme nécessaire participation de tous les baptisés doit sans cesse s’exprimer comme une mission qui vient du Seigneur. Tous les baptisés sont invités à s’écouter mutuellement, à discerner ensemble les choix pastoraux et à les mettre en pratique, chacun jouant son rôle.
5. La synodalité: un impératif pastoral
16. Suite aux crises multiples que connaît l’Eglise et la société, la synodalité apparaît comme un impératif pastoral tant au niveau de l’Eglise universelle qu’au niveau de notre Eglise locale. En ce qui nous concerne, nous avons reçu l’Evangile de Jésus-Christ il y a bientôt 140 ans (1883-2023). L’Eglise du Congo a parcouru son chemin. Nous sommes déjà tournés vers le deuxième centenaire de notre évangélisation. D’où l’urgence de renforcer l’unité et de privilégier la marche synodale pour la relance de la mission évangélisatrice en terre congolaise. Soulignons quelques points qui montrent en quoi la synodalité est un impératif pastoral pour notre Eglise.
17. Une Eglise peuple de Dieu. Le Concile Vatican II parle de «l’Eglise comme Peuple de Dieu» (Lumen Gentium, n. 2). Pour le Concile, l’Eglise n’est pas réservée aux seuls clercs, mais elle est une communauté ouverte à tous les baptisés: évêques, prêtres. Tous sont invités à s’impliquer dans la mission du Christ (cf. Redemptoris missio, n. 1) et personne ne doit être exclu.
18. Une Eglise de témoignage
et de l’engagement.
Notre Eglise locale doit devenir davantage un exemple de synodalité pour les autres églises, à travers notre témoignage de vie chrétienne, notre engagement et notre capacité à vivre la communion et la fraternité à l’exemple de la première communauté chrétienne (cf. Ac 2, 42-47). Au cours de nos assises nous ne nous sommes pas limités à parler de la synodalité, mais nous avons aussi cherché comment traduire et vivre la communion, la participation en vue de la mission. Comme le souligne le Pape François, «le thème de la synodalité, ce n’est pas un chapitre d’un traité d’Ecclésiologie, encore moins une mode, un slogan ou un nouveau terme à utiliser ou à exploiter dans nos réunions. Non ! La synodalité exprime la nature de l’Eglise, sa forme, son style, sa mission» (Pape François, Discours du 18 octobre 2021).

19. Une Eglise de l’écoute. Pour le Pape François, «Une Eglise synodale est une Eglise de l’écoute, avec la conscience qu’écouter est plus qu’entendre. C’est une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre» (Pape François, Discours au 50e anniversaire du synode des évêques, 17 octobre 2015).
20. Une Eglise qui rejette toute division.
Le chemin de la synodalité est celui qui combat les divisions, les barrières et construit des ponts. Tous, nous sommes appelés à collaborer, à coopérer et à travailler ensemble. Que chacun se sente protagoniste dans l’édification du corps du Christ qu’est l’Eglise (cf. 1 Co 12). Car nous sommes frères et sœurs, filles et fils d’un même Père Dieu, d’une même mère, l’Eglise et d’un même Sauveur, Jésus-Christ. Car, comme le souligne le Saint Père dans Fratelli Tutti, n. 87, «la vie subsiste là où il y a un lien, la communion, la fraternité. C’est une vie plus forte que la mort quand elle est construite sur de vraies relations et des liens de fidélité. Il n’y a pas de vie là où on a la prétention de n’appartenir qu’à soi-même et de vivre comme des îles».
21. Une Eglise qui promeut la sincérité, l’honnêteté
et la droiture.
La notion de synodalité implique, en effet, la sincérité, l’honnêteté, la droiture, car la marche ensemble doit se faire dans la confiance. Il nous faut lutter contre les antivaleurs qui gangrènent notre Eglise et notre société. En ce sens, la lutte contre les antivaleurs demeure d’actualité. En effet, la corruption bat son plein à tous les niveaux, la culture de la facilité a pris le dessus sur l’effort et le sacrifice.
22. La marche synodale nous interpelle et nous invite à revoir notre façon d’être et de travailler ensemble: non pas les uns contre les autres, chacun dans son diocèse comme il l’entend ou les évêques d’un côté et les prêtres de l’autre ou encore les responsables contre les membres simples, mais tous ensemble, les uns avec les autres, en nous écoutant avec patience et humilité, en mutualisant nos forces. Ce qui implique de mettre en valeur toutes les compétences, tous les charismes et toutes les ressources disponibles dans l’Eglise. C’est ensemble que nous avons à être «sel de la terre et lumière du monde» (Mt 5, 13-14).
6. Pistes pour une Eglise synodale
23. La synodalité est une autre façon d’être et de travailler ensemble, qui met en évidence le fait que chacun a quelque chose de précieux à apporter au corps tout entier qu’est l’Eglise (Lumen Gentium, n. 7). Toutefois, pour mettre en œuvre une pastorale synodale, les slogans ne suffiront pas. L’Église a besoin aujourd’hui de pasteurs formés à la synodalité, qui exercent un nouveau style de «leadership», un leadership de service et non du pouvoir, une nouvelle manière d’exercer l’autorité.
24. Nous pouvons énumérer quelques pistes qui peuvent nous aider à faire de la synodalité un «savoir-faire» avec Dieu et un «savoir être» en Eglise et en Société: quitter une Eglise des privilèges et des castes pour une Eglise de communion, sans marginalisation et sans exclusion. Cela passe par quelques changements à opérer dans notre vie d’Eglise:
– La conversion continuelle, qui exige le changement de comportement, car la marche synodale implique la conversion personnelle et communautaire, le renoncement aux égos en faveur du «Nous», de la communion contre le travail en solitaires.
– La pratique des sacrements, qui implique de redécouvrir l’importance du baptême et de l’engagement chrétien dans la construction active de l’Eglise et de la société. Pour le Pape François, «on ne peut pas participer à l’Eucharistie sans s’engager à une fraternité mutuelle, qui soit sincère…» (cf. Pape François, Angélus Fête-Dieu 2014).
– La nécessité de grandir dans la spiritualité, pour se débarrasser de tout esprit mondain (rivalités, compétitions, complexes etc.), afin de vivre réellement comme des enfants de Dieu. Dans la marche synodale, la spiritualité doit être au premier plan de nos efforts de conversion.
– L’importance de l’Engagement familial. La famille a un grand rôle à jouer dans cette marche vers la synodalité, car elle est l’«Eglise domestique», la «cellule de base de la société et de l’Eglise» (Africae munus, n. 42). Les parents doivent éduquer les enfants aux valeurs de la vie, leur apprendre à travailler ensemble, à participer aux initiatives communautaires.
– La lutte contre toutes les antivaleurs, qui s’opposent à la communion. De ce fait, la synodalité exige l’adoption d’un style de vie nouveau basé sur l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur et maitrise de soi (cf. Gal 5, 22).
– La formation des clercs et des fidèles laïcs, en vue d’une meilleure collaboration pour l’édification de communautés et de paroisses plus justes et plus fraternelles, débarrassées du cléricalisme et de la déresponsabilisation des fidèles laïcs, qui est son corolaire. Clercs et laïcs doivent se former, en saisissant les différentes opportunités qui leur sont offertes, dans les paroisses comme dans les structures de formation permanente de l’Eglise, telles que l’école des sciences religieuses, l’Accabe, le CERC, etc.
– L’urgence de l’autofinancement et du développement, pour libérer notre Eglise de toute forme de dépendance et d’assistanat. Il n’y a pas de vraie synodalité sans développement et sans autonomie financière. Sur ce, nous encourageons toutes les initiatives allant dans le sens de l’autofinancement et de l’auto-prise en charge. Après 140 ans d’évangélisation, notre Eglise ne devrait-elle pas être une Eglise autonome? L’affirmation de Jésus: «donnez-leur vous-mêmes à manger» (Mt 14,16) doit être au cœur de nos préoccupations et devenir l’objet central de nos réflexions.
25. Voilà quelques éléments non exhaustifs que nous suggérons pour nous aider à faire de nos milieux de vie des lieux d’apprentissage de la synodalité, pour une Eglise et une société synodale, sous la conduite du Saint-Esprit. Avec le Pape François nous disons: «L’Église va de l’avant, elle marche avec tous, elle est synodale. Mais il y a toujours l’Esprit qui est le grand protagoniste de l’Église. N’oubliez pas cette formule: «Il a paru bon à l’Esprit Saint et à nous de ne pas vous imposer d’autre obligation» (…) Si l’Esprit n’est pas là, ce sera un parlement diocésain, mais pas un synode». (Pape François, Rome, 18 octobre 2021).
7. Exhortation ou appels
26. Filles et fils bien aimés, au terme de nos assises, nous vous lançons ces appels, à vous tous fidèles du Christ, Peuple de Dieu en marche, afin que la synodalité devienne aussi votre priorité.
1. Aux Enfants et aux Jeunes
27. Au moment où nous renouvelons les organes de gouvernement de nos mouvements d’apostolat, l’Esprit Saint parle à notre Eglise du Congo-Brazzaville. Chers enfants et chers jeunes, vous êtes porteurs de cette nouvelle espérance qui se veut communion, participation et mission. Nous, vos pères évêques, en choisissant de réfléchir sur la synodalité, nous voulons vous pousser vers un élan missionnaire, vous inviter à être des bâtisseurs de notre Eglise.
28. Vous vous êtes souvent sentis en marge des instances de décisions. Voilà pourquoi, nous vous voulons dans cette marche, plus proches de nous, comme dit le Pape François, «une alliance entre jeunes et anciens est nécessaire, pour ne pas oublier les leçons de l’histoire, pour surmonter les polarisations et les extrémismes de notre époque» (Pape François, message pour la journée mondiale de la jeunesse, 2022).
29. Chers enfants et chers jeunes, notre désir le plus ardent est que nos mouvements d’apostolat deviennent davantage de véritables communautés de croissance spirituelle et humaine, des lieux de rencontres qui favorisent l’épanouissement de chacun. Nous voulons avec vous une Eglise où chacun trouve davantage sa place et son rôle, sans convoitise, sans rivalités et sans écrasement. Sachez donc que vous avez votre rôle à jouer dans l’Eglise et dans la société et que nous sommes avec vous et parmi vous comme Pères et Pasteurs (cf. Jn 10, 11-17).
2. Aux prêtres et aux
personnes consacrées
30. A vous prêtres et personnes consacrées, comme vous le savez, nous avons la mission de paître le troupeau qui nous est confié pour sa croissance. Nous voulons vous dire merci pour tout ce que vous faites dans vos paroisses et dans vos communautés. Aidez vos frères et sœurs à vivre et à marcher ensemble en prenant chacun sa part de responsabilité dans l’engagement missionnaire, car tout baptisé est missionnaire. Soyez pour vos frères et sœurs le levain dans la pâte, de vrais témoins, disciples du Christ, qui accompagnent, écoutent, dialoguent pour la construction d’une véritable Eglise-famille de Dieu. Puisse le Seigneur Ressuscité vous aider à vivre votre mission dans l’humilité, la joie, l’espérance et l’esprit fraternel.
3. Aux Fidèles laïcs
31. Filles et fils fidèles laïcs du Christ, nous vous appelons à plus de responsabilité, à l’engagement, à la participation active et à la mission de l’Eglise, corps du Christ. C’est une invitation pour que l’ensemble de notre Église fasse entendre sa voix: le collège épiscopal, le clergé, les fidèles laïcs, chacun à l’écoute des autres et tous à l’écoute de l’Esprit Saint. Nous vous demandons à vous «tous fidèles laïcs du Christ de vous engager vraiment dans le domaine qui vous est propre, caractérisé par le temporel dans sa diversité et dans sa complexité» (Cf. Lumen Gentium, n. 31). C’est une tâche noble qui vous est confiée: celle de travailler à ce que le plan divin se réalise davantage, en tout temps et en tout lieu. Pour ce faire, il est nécessaire de cultiver l’esprit de collaboration avec tous et particulièrement avec vos pasteurs. Que notre bénédiction vous accompagne!
4. Aux dirigeants de notre pays
32. Chers dirigeants, vous qui avez le privilège d’assumer une parcelle d’autorité dans la gestion de notre si beau pays le Congo, nous vous exhortons à écouter les cris du peuple qui souffre des maux que nous connaissons tous: la violence, le banditisme, la corruption, la culture de la médiocrité et de la superficialité, le favoritisme, le chômage, les bavures policières, les extorsions etc.). Gardez présent à l’esprit la promotion du bien commun, la dignité de la personne humaine et le respect de ses droits fondamentaux. Que la marche synodale commencée par notre Eglise vous serve d’exemple. Nous vous assurons de notre prière.
5. Aux Femmes
et aux Hommes politiques
33. À vous, femmes et hommes, qui œuvrez dans le champ de la politique, nous adressons ce vibrant appel à vous engager, vous aussi, sur le chemin de la synodalité, qui exige une autre façon d’être, d’agir et de travailler ensemble pour le bien de la patrie. Quelles que soient vos différences et divergences, privilégiez le dialogue, en mettant au centre de vos préoccupations l’amour et le bien de toute la communauté. La synodalité exige de nous une bonne gouvernance qui prend en compte les marginalisés de la société et fait participer toutes ses composantes à la gestion seine de la chose publique. Soyez rassurés de nos prières.
6. Aux Femmes et aux Hommes de bonne volonté
34. A vous Femmes et Hommes de bonne volonté, la marche synodale objet de notre réflexion de ces jours-ci nous concerne aussi. Notre monde a besoin de paix, de justice et d’amour qui exige la participation et la collaboration de tous, car «Nous formons tous un seul corps» (Cf. 1 Co 12). Voilà pourquoi, nous vous exhortons à plus d’engagement dans la société, pour faire prévaloir les vertus fondamentales dont notre pays a besoin pour sa stabilité politique et économique. L’engagement à la paix, à la justice, au travail bien fait doit être l’œuvre de toutes et de tous. Que personne ne se sente exclu de cette mission commune. Que celles ou ceux qui ont des responsabilités dans l’Eglise ou la société se considèrent comme de simples serviteurs (cf. Lc 17, 7-10), qu’ils soient exemplaires et irréprochables dans leur conduite: «Je vous exhorte donc, frères, par la compassion de Dieu, ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait», avertit Saint Paul (Rm 12, 2). Que le Seigneur vous aide toutes et tous à devenir des artisans de paix, des bâtisseurs infatigables de notre pays.
Conclusion
35. Filles et fils bien aimés, au terme de notre assemblée plénière, nous nous réjouissons du bon déroulement des travaux et des échanges fructueux que nous avons eus. Ces échanges ont renforcé en nous l’esprit de synodalité, pour une participation active et pleine à la mission du Christ. Vous aussi, partout où vous êtes, nous vous invitons à privilégier le travail en équipe, à collaborer. Il est certes vrai que la collaboration n’est pas toujours chose facile, mais pour nous fidèles du Christ, elle est primordiale et constitutive du Corps que nous formons, afin d’affronter les innombrables défis pastoraux que le monde actuel nous impose. Aussi, avec l’aide de Dieu, nous vous demandons de cultiver l’amour fraternel, l’entraide, le dialogue pour une église synodale où chacun a sa place et joue son rôle. Nous vous exhortons à réciter la prière du synode dans toutes vos rencontres jusqu’à l’assemblée générale du synode en octobre 2023. Que le Seigneur vous bénisse toutes et tous, qu’Il bénisse nos communautés et nos familles pour que nous puissions construire ensemble des cités de paix et de dialogue dans un esprit de synodalité: communion, participation et mission.
Que la Vierge Marie, Notre Dame du Rosaire et Notre-Dame du Congo intercède pour notre Eglise locale et pour notre pays le Congo.

Fait à Brazzaville le dimanche 16 octobre 2022

Les Archevêques et Évêques du Congo