Plus d’une vingtaine d’activistes de la société civile africaine se sont réunis du 4 au 6 juillet 2024 à Arusha, en Tanzanie, pour réfléchir sur la corruption, dans le cadre de la Journée africaine de lutte contre la corruption commémorée par l’Union africaine (UA) le 11 juillet de chaque année. La réunion organisée par Transparency international (TI) a regroupé les délégués des pays points focaux de cette ONG internationale spécialisée en matière de transparence. Le Congo y a été représenté par l’auteur de cet article, membre du Conseil d’administration de la Rencontre pour la paix et les droits de l’Homme (RPDH), section locale de TI.

Réunis trois durant à l’hôtel Mount Meru, les participants ont planché essentiellement sur la méthode BOT, un outil standard efficace en matière de lutte contre la corruption, déjà mis en œuvre dans quelques pays d’Afrique. Ils ont identifié les principaux facilitateurs des financements illicites (FFI), qui opèrent notamment sur le continent de manière incessante. Ceux-ci, très souvent enfreignent la législation en vigueur du pays, contournent le service fiscal et procèdent tantôt par des prête-noms, pour échapper aux contrôles de l’administration compétente.
En complicité avec certains piliers du régime en place, ces agents corrupteurs pour la plupart des facilitateurs étrangers, infiltrent même les Eglises, à travers les œuvres de charité. En première ligne des transactions financières frauduleuses et de l’invasion fiscale, se trouvent les entreprises commerciales, qui occasionnent les flux financiers illicites. Le développement de ce phénomène fait que l’Afrique enregistre chaque année, plusieurs dizaines, voire centaines de milliards qui se volatilisent. Outre celle née des entreprises commerciales, il y a aussi la corruption favorisée par les entreprises criminelles et la corruption active. C’est ce qui explique les soulèvements de ces jours-ci au Kenya, en Zambie, au Zimbabwe, au Malawi et dans d’autres régions du continent.
Se basant sur l’étude menée en 2010 par Transparency international au niveau des banques, compagnies d’assurances et autres lieux supposés de corruption en Afrique, les participants ont noté que ce phénomène des flux financiers ou flots illicites dépouille le continent de ses ressources et le soumet à d’énormes risques. A partir de cette étude, TI avait en effet inventorié un certain nombre de circuits frauduleux et de corruption, qui pour la plupart des cas relèvent des mandataires, des notariats, de l’incorporation des sociétés où les facilitateurs ont des comptes, de la consultance en matière fiscale, des agents de services immobiliers, du blanchiment d’argent. En général, les facilitateurs étrangers viennent d’Europe, du Moyen-Orient, d’Asie.
Pendant cette réunion, les participants venus d’Europe et de plusieurs pays d’Afrique se sont dotés des arguments ou outils pour contrecarrer la corruption et établir un registre BOT dans leurs pays respectifs. Ils ont convenu de remonter les résolutions de leurs travaux auprès des décideurs, puis à terme, à l’Union africaine. Comme activistes et lanceurs d’alerte, ils ont pris l’option de plaider pour un modèle de loi à proposer aux Etats membres de l’UA. Il s’agit de faire un lobbying dans les pays et bâtir des stratégies susceptibles d’accroître les soutiens et établir la légitimité au niveau de l’UA.
Les participants ont rappelé que l’an dernier le G20 et l’UA s’étaient engagés à investir dans la transparence concernant les bénéficiaires effectifs.

Aristide Ghislain NGOUMA
(Participant)