Madrid et Rabat ont normalisé vendredi 18 mars 2022 leurs relations à la faveur d’un geste de soutien réclamé de longue date par le Maroc sur le dossier hautement sensible du Sahara occidental. Ceci, après un an de brouille diplomatique majeure. Une surprise de Madrid à l’endroit de la classe politique espagnole, le Front Polisario, qui a suscité une réaction ferme de l’Algérie, qui a annoncé samedi 19 mars, le rappel de son ambassadeur à Madrid, sans délai.
Ce 19 mars, le Front indépendantiste sahraoui, le Polisario, a exprimé son «étonnement» face à la position du gouvernement espagnol de soutenir la position marocaine sur le Sahara occidental. Un échange de communiqués entre Rabat et Madrid, la veille, avait avalisé le réchauffement en cours entre les deux capitales et le changement radical de point de vue à Madrid sur la question du Sahara occidental. Le gouvernement espagnol a fait savoir: «Aujourd’hui, nous entamons une nouvelle étape dans notre relation avec le Maroc basée sur le respect mutuel, le respect des accords, l’absence d’actions unilatérales et la transparence et la communication permanente».
Cette annonce intervient après la publication d’un communiqué du palais royal marocain faisant état d’un message du Premier ministre espagnol Pedro Sanchez, indiquant selon Rabat que le plan marocain «d’autonomie» pour le Sahara occidental est ‬«la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution du différend».
Le chef de la diplomatie espagnole José Manuel Albares est revenu sur le dossier, à Barcelone, déclarant que «l’Espagne considère que l’initiative d’autonomie présentée en 2007 par le Maroc est la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution de ce différend» entre Rabat et les indépendantistes du Front Polisario.
Cette reconnaissance par Madrid du projet marocain de faire du Sahara occidental une province autonome est un changement majeur. Jusqu’ici, l’Espagne appuyait une résolution des Nations unies réclamant un référendum d’autodétermination pour cet immense territoire situé entre le Maroc et la Mauritanie, dont une partie est aux mains du Front Polisario indépendantiste.
Dans le cadre de la normalisation des relations entre les deux Etats, une visite de Pedro Sanchez au Maroc, est programmée tandis que le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel Albares, se rendra à Rabat avant la fin du mois.
C’est depuis des décennies que le conflit du Sahara occidental, ex-colonie espagnole considérée comme un territoire non autonome par l’ONU oppose le Maroc aux indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par Alger. Rabat, qui contrôle près de 80% de ce territoire, propose un plan d’autonomie sous sa souveraineté tandis que le Polisario réclame un référendum d’autodétermination, prévu lors de la signature en 1991 d’un cessez-le-feu, mais jamais concrétisé.
La brouille diplomatique entre Madrid et Rabat avait été provoquée en avril 2021 par l’accueil en Espagne, pour y être soigné du COVID, du chef du Front Polisario, Brahim Ghali, ennemi de Rabat. Elle s’est traduite en mai dernier par l’arrivée massive de migrants d’origine marocaine dans l’enclave espagnole de Ceuta, sur la côte nord du Maroc, profitant d’un relâchement de la surveillance des frontières côté marocain.
Ce changement de cap est un effet de la guerre en Ukraine, l’Espagne et l’Europe ayant besoin de stabilité au Sud. Alger a assuré que ce revirement n’allait pas affecter ses livraisons de gaz à l’Espagne. Toutefois Alger a annoncé le rappel immédiat de son ambassadeur à Madrid. Cette décision survient après les déclarations de Pedro Sanchez sur le Sahara occidental, a expliqué l’Algérie.

A.P MASSAMBA