Heureusement, nous sommes dans un pays qui ne compte aucun climato-sceptique connu. Nous sommes directement exposés aux effets néfastes du changement climatique, le nier ne servirait à rien. Depuis début novembre, il pleut presque sans discontinuer du nord au sud du Congo; de l’est à l’ouest du pays. Il pleut! Des quartiers de nos principales villes sont à genoux, les infrastructures sont mises à mal et des vies humaines sont à déplorer.
Les effets s’étalent sous nos yeux et, il faut le reconnaître, personne ne met durablement personne en cause directe de ce qui nous arrive. Oui, quelque ministre se sera bien montré léger dans la gestion de tel ou tel autre chantier; nos populations se seront montrées coupables de déboiser à tout-va les alentours de Brazzaville. Oui, les permis de construire ont été accordés avec insouciance: oui!
Mais il se dégage de tout ceci que les responsabilités sont diffuses, générales et lointaines. Nous habitons des quartiers dont nous savons la fragilité des terrains; nous sommes au bord de rues qui sont en même temps des ruisseaux d’écoulement des eaux de ruissèlement. Nous savons que les obstruer par des digues ou les cimenter à outrance, sans coordination avec les plans de la mairie, c’est aggraver les choses.
Nous savons tout cela, mais qui osera faire le premier pas d’un retour volontaire au village? Qui obéira à l’injonction de non-viabilité lorsque la crise du logement impose de se bâtir une masure au premier espace libre que l’on trouve? Qui a jamais reculé de donner quelques billets de banque aux contrôleurs et aux agents du cadastre aux yeux trop ouverts?
C’est tout cela qui nous retombe sur la tête avec les pluies de ces derniers jours. Cela, et autre chose de lointain aussi. Les fumées que crachent les usines dans les pays d’abondance viennent se venger chez nous sous formes de flots ou de chaleurs excessives. Il pleut au Congo, la forêt brule en Australie et en Amazonie: peut-être les conséquences d’une même cause. Mais, dans tous les cas, une raison de plus de nous dire victimes et pas coupables.
On va philosopher et pérorer sur les causes: en attendant, Makabandilou ronge tout ce qu’il a de terres et de routes. Ainsi que Mfilou. Kintélé. Ngoyo. La Corniche. Le viaduc. Chaque fois que le ciel s’assombrit, notre humeur s’assombrit aussi. Car une nouvelle pluie annonce forcément une nouvelle catastrophe ou aggrave la première. Les changements climatiques sont dans nos villes et le long de nos cours d’eau, de notre littoral. Le déplorer est un minimum. Pleurer sur notre sort, c’est ajouter de l’eau à l’eau; pas l’assécher.

Albert S. MIANZOUKOUTA