Il y a littéralement du vaudeville dans ce qui se passe de jour en jour au CHU. Notre plus grand hôpital est présenté comme le miroir de ce que nous pouvons faire de mieux au service de la santé au Congo depuis Brazzaville. Malheureusement il est aussi, résolument, le condensé de nos médiocrités les plus absurdes. Ou peut-être la préfiguration du Congo qui sera. Musèlements, insultes, décisions prises un lundi et contredites le mardi, personnel pérorant au nom d’un meilleur service mais donnant l’impression de vouloir n’en faire qu’à sa tête. Et autorités absolument impuissantes devant les vociférations des fort-en-gueule et les brouhahas menaçants, tantôt flattant notre égo, tantôt nous appelant à de la xénophobie de bas-étage, comme si nous serions mieux entre nous !
Il faut une congolisation des postes d’encadrement au CHU-B, criaient quelques syndicats il y a peu. Il faut démettre la ministre de la Santé, son Directeur départemental, ses collaborateurs et, surtout, les experts canadiens auxquels nous lient des contrats, disent-ils, faramineux ! Qui nous coûtent cher.
Le fil est gros, mais il présente l’avantage de désigner les autres comme seuls coupables des malheurs qui, chaque semaine, nous font enterrer jusqu’à plus de 150 morts par semaine (hors Covid-19 !). Tout se passe comme si personnel et encadrement du CHU voulaient nous obliger à chausser des lunettes de myopes, de la congolité rassurante par le seul fait, pour ne pas rechercher et trouver les raisons véritables de la maladie dont souffre véritablement notre hôpital.
Tout se passe comme s’il suffisait de les laisser faire, jongler avec les budgets, faire joujou avec des technologies les plus coûteuses sans bien s’en servir, tolérer des agents absents 11 mois sur 12 dans les services mais présents à chacune des fois que le Trésor ouvre ses guichets, entretenant sans en donner l’air, les mafias du médicament qui prolifèrent en bas des salles, ou à la Banque du sang !
Ainsi donc, nous ne savons pas si le président de l’Intersyndicale, auteur supposé d’insultes contre l’autorité, usage de faux et comportement inapproprié, est bien licencié par la direction. Ou si la commission des litiges a bien invalidé la sanction annoncée au motif qu’il y a eu entorse au Code du travail. Dedans ou dehors? La loi ou la morale?
C’est comme si on voulait continuer à jouer avec nos santés et nous prendre à témoin. Ou en otage. Tant que nous sommes au centre d’un jeu qui nous dépasse, inutile de dire que tous ces millions dénoncés, reçus, dépensés, gaspillés n’ont pas servi la cause de la santé. Et d’un autre côté, il ne suffira pas d’annoncer qu’on veut mieux gérer. Tant que cela ne rejaillira pas dans le ressenti général du Congolais, nous nous contenterons de compter les points.
Sauf qu’on ne pourra pas écrire, comme à la fin d’un bon match ou d’un duel âpre : «Direction Vs Syndicats : 2 partout, la balle à terre». D’ici à la semaine prochaine ou à la fin souhaitée du bras de fer qui nous est offert en spectacle, il y aura de nombreux morts. Nous, pas eux.

Albert S. MIANZOUKOUTA