La musique des deux Congo riverains, en l’occurrence la rumba qui est son expression phare, est objet d’un nouvel essai signé Bienvenu Boundimbou. Sur cent quarante et une pages du livre édité par Hemar, l’auteur tente d’appréhender les emprunts réalisés dans la chanson congolaise de variétés. Seydou Badian écrit dans Sous l’orage, « La meilleure des connaissances est celle qui mène l’homme vers les hommes ». C’est dans cette veine que s’inscrit le jeu d’appropriation du discours de l’autre à travers la rumba congolaise, ici mise en évidence par la plume experte de Bienvenu Boudimbou, journaliste et enseignant-chercheur à l’Université Marien Ngouabi.
Il relève que la création dans ce domaine ne se fait pas en vase clos, elle est fortement marquée d’apports extérieurs. Un certain métissage culturel et artistique est perceptible dans la chanson congolaise depuis les années 1950 jusqu’à nos jours. Cette réalité ne fait que prendre de l’ampleur. L’objectif de l’étude y relative consiste à en saisir les modalités.
La rumba congolaise s’enrichit du «folklore», mais aussi de la world music. La discographie des virtuoses comme Papa Wemba en témoigne tant. La littérature est également une source d’inspiration importante, surtout la bible. Rapha Boundzeki se réfère notamment au poème de Symphorien Nkoua pour composer sa chanson culte Le départ pour l’école. Par ailleurs, les titres Ésaü de JB Mpiana, 13ème apôtre de Koffi Olomidé, Eden de Théo Blaise Kounkou, Nzambé mokondzi de Roga Roga font allusion à la bible.
Les auteurs des chansons puisent parfois dans l’actualité des médias ou de la société, dans les mélodies de leurs devanciers, au cinéma, au football etc., le contenu de leur art. Ils empruntent les titres des chansons (Dona Beija de Youlou Mabiala, Independance day de Doudou Copa…), les extraits des chansons ou des morceaux complets (Koffi chante Lutumba Simaro), les noms des autres (Rochereau, Bill Clinton, Al Pacino, Fabregas…), les cris pour l’animation (Kitoko ya mascara, Contentieux…).
La parole de l’autre dans la rumba congolaise abonde aujourd’hui par les dédicaces des mêmes noms chez plusieurs musiciens, par les aphorismes issus de la sagesse populaire, et par la création d’un vocabulaire nouveau à partir des mots français. Ou par des interférences de langues lingala et français comme on peut le remarquer dans cet extrait d’un morceau tiré de l’album Affaire d’Etat de Koffi Olomidé :
«Batongaka mboka na maloba pamba te, il faut mosala eleka maloba na ebele / Patriote ya solo atia ka intérêt général liboso ya nionso / Congo ekobonga té soki to za te lisanga, soki to sangisi te le génie de l’un avec l’énergie de l’autre, soki to tié té intérêt ya peuple devant le chacun pour soi / Congo eza na besoin ya sueur koleka biloba loba / Bozoba ememi division, pe ba guerre, Congo ezo zonga sima, attention / Congo eza na posa ya paix».

Aubin BANZOUZI

(Source: adiac-congo.com/les dépêches du bassin du congo)