Le patriarche et icône de la musique congolaise Ganga Edo (Edouard Ganga à l’état-civil) décédé le 7 juin dernier à Brazzaville à l’âge de 87 ans a été inhumé ce mercredi 22 juillet 2020, au cimetière du Centre-ville où il repose désormais pour l’éternité. Peu avant, la famille musicale, amis et officiels ont rendu un dernier hommage à ce passionné de la musique, dont les œuvres ont fait danser des milliers de mélomanes au Congo et à travers le monde pendant des décennies. La levée du corps à la Morgue municipale de Brazzaville a été suivie d’une cérémonie officielle au Palais des congrès.

Le ministre d’Etat, ministre en charge l’Agriculture, président de l’Union nationale des écrivains et artistes congolais (UNEAC) Henri Djombo, les membres du Gouvernement, le ministre de la Culture et des arts de la RD Congo, Jean-Marie Lukundji à la tête d’une forte délégation; l’ambassadeur de France François Barateau; la directrice de l’Institut français du Congo (IFC), Marie Audigier ; le président de l’Union des musiciens congolais (UMC) Magloire Dieudonné Bonguili ‘’Pape God’’, ont participé à cette cérémonie d’adieu et déposé, chacun, une gerbe de fleurs devant la dépouille du disparu.
Arraché à la vie après près de 67 ans de carrière musicale, le légendaire Ganga Edo était le dernier survivant de ceux qui ont posé les bases de grands groupes musicaux, l’Ok Jazz (RD Congo), en 1956, et les Bantous de la capitale en 1959. Pendant la cérémonie, les Bantous de la capitale et les artistes venus de la RD Congo ont interprété la chanson ‘’Aimé wa bolingo’’ et exhibé quelques pas de danse.
Dans l’oraison funèbre, Dieudonné Moyongo, ministre de la Culture et des arts a longuement encensé la brillante et élogieuse carrière musicale de Ganga Edo qui s’est déroulée entre Brazzaville et Kinshasa (ex Léopoldville). Il a montré qu’il avait gravi toutes les étapes par un travail laborieux, opiniâtre, méthodique et fécond. Il avait su conquérir l’estime, la sympathie et le respect de ses co-sociétaires des Bantous de la capitale qui le vénéraient comme leur patriarche. Il avait été décoré au grade de Commandeur dans l’ordre du mérite congolais par le Président de la République, le 15 août 2019.
Son homologue Jean-Marie Lukundji, de la RD Congo, a également souligné la grandeur et le talent de l’artiste. «Ganga Edo c’est l’illustration de l’adage qui dit toujours que Kinshasa et Brazzaville sont les capitales les plus rapprochées au monde et séparées seulement par le fleuve. C’est l’illustration ! Ganga Edo, c’est un grand, né à Kinshasa et grandi entre les deux rives avec sa musique. C’est le dernier des mohicans de la rumba congolaise des deux rives ».
Pour saluer la mémoire de celui qui a porté haut l’étendard de la musique congolaise, les artistes-musiciens des deux rives du fleuve Congo ont livré des témoignages pathétiques. Pour tous, leurs souvenirs sont et restent leur meilleur compagnon.
Le président de l’Union des musiciens congolais, Pape God, estime «c’était un patriarche. Il avait beaucoup de talent en tant qu’artiste, c’était aussi un sage. Nous le fréquentions de temps à autre pour des conseils».
Nona Arthur, Bantous de la capitale : «C’est un acteur, il a su jouer son film, et il est parti. Nous le regrettons !».
Rikky Siméon, lui aussi membre du même orchestre : «Edo nous quitte, mais nous allons continuer à perpétuer l’œuvre musicale, en misant sur la jeunesse pour que l’orchestre continue à vivre même après nous ».
Jeannot Bombenga (Vox Africa RD Congo) a dit avoir «une tristesse indescriptible, parce que perdre un monument comme Edo m’a attristé».
Verkys Kiamuangana-Matéta (RD Congo) s’est rappelé qu’avec Ganga Edo, ils ont réalisé beaucoup de choses. «Il y avait moi, Franco Luambo Makiadi et Vicky Longomba, nous avons même voyagé à Bruxelles, et fait des chansons comme ‘’Aimé wa bolingo’’. A cette période on jouait de la bonne musique».
Benz Bozi Boziana (Anti-Choc RD Congo), a aussi salué le talent de Ganga Edo. Il a souhaité que les jeunes s’inspirent de lui, et le prennent comme modèle, pour produire des œuvres de qualité».
Manda Chante (Bana Ok RD Congo), a expliqué que même si les anciens sont en train de partir, ils (NDLR : les jeunes) continueront à suivre leurs pas; la rumba congolaise ne disparaîtra pas ».
Compositeur, chanteur, arrangeur, Ganga Edo, également co-fondateur des orchestres Negro Jazz, Les Nzoïs et Bantous monument, est l’auteur de plusieurs chansons comme ‘’Zozo’’ ; ‘’Mado kobanga té’’ ; ‘’Matanga ma ya Ngombé’. Mais la plus mythique reste ‘’Aimé wa bolingo’’. Doté d’un timbre vocal exceptionnel et d’excellents dons de danse, il a composé des chansons sur différents thèmes, mais avec un accent particulier sur l’amour. Il laisse une veuve et plusieurs enfants. Adieu l’artiste !

Alain-Patrick MASSAMBA