De la cérémonie de célébration de la 30e Journée mondiale de la liberté de la presse au Congo sur fond de «cacophonie» au sein du CSLC (Conseil supérieur de la liberté de communication), le 3 mai dernier à Brazzaville, est sorti un engagement positif du gouvernement. Il a répondu au cri de détresse lancé par les professionnels des médias, quand ils se sont dits soucieux et inquiets de l’avenir de leur métier, dont l’exercice devrait être sans entraves. Tiendra-t-il ses promesses?

Placée cette année sous le thème «Façonner un avenir de droits: La liberté d’expression comme moteur de tous les autres droits de l’homme», la Journée mondiale de la liberté de la presse a été organisée presqu’à la hussarde dans un hôtel, en présence notamment du Premier ministre Anatole Collinet Makosso. L’implication du chef du gouvernement a quelque peu apaisé les tensions provoquées par l’annonce controversée du changement avorté de la date de commémoration de l’événement par le CSLC, la veille.
A cette occasion, le ministre de la Communication et des médias, Thierry Moungalla, pleinement conscient des difficultés auxquelles est confronté le secteur des médias, a promis de redéfinir la vocation des médias dits d’Etat, notamment Télé-Congo et Radio-Congo. Ils seront transformés en établissements publics à caractère industriel et commercial. La presse congolaise étant «en danger de mort», a-t-il reconnu, il promet une réforme de la RAV (Redevance audio-visuelle), de réfléchir à l’octroi d’une enveloppe d’urgence à cette presse et de faire face aux besoins de formation des professionnels des médias.
En somme, le ministre de la Communication a répondu en quelque sorte aux doléances des organisations des professionnels des médias. Il a annoncé la tenue prochaine d’un forum national de la presse.
Le président du Conseil d’administration de l’UPPC (Union des professionnels de la presse du Congo), Jean Charles Maniongui, et le directeur exécutif de JEC (Journalisme et Ethique Congo), Arsène Séverin Ngouela, ont fait en effet un vigoureux plaidoyer pour l’émergence d’une presse réellement libre et indépendante. Car, malgré de grandes avancées dans l’univers médiatique du pays, à l’exemple des textes consacrant depuis 2001 la dépénalisation des délits de presse, l’exercice du métier de journaliste au Congo n’est pas aisé pour autant. Ils ont aussi placé le gouvernement face à son devoir de subventionner les entreprises de presse toujours confrontées à la pauvreté, avec des personnels vivotant dans une telle précarité qui les rend vulnérables aux sollicitations; ils sont prêts à vendre «leur âme au diable».
«Cela fait beaucoup d’années déjà que nous le réclamons. C’est une injustice que de voir les partis politiques et autres institutions d’appui à la démocratie être financés par des fonds publics dans notre pays, et que la presse soit délaissée. Même les médias publics ne jouissent pas des budgets conséquents à leurs besoins», regrette Arsène Séverin Ngouela.
Une situation qui préoccupe aussi la représentante de l’UNESCO au Congo, Fatoumata Barry Marega, qui a réaffirmé par ailleurs l’engagement de son institution dans le renforcement des capacités des journalistes. Le but recherché étant, selon elle, «d’assurer la production d’informations de qualité susceptibles de renseigner utilement et contribuer aux efforts du Congo pour l’atteinte des Objectifs de développement durable à l’horizon 2023».
Et le Premier ministre Anatole Collinet Makosso, prenant acte des doléances, de conclure que «la soif de liberté de la presse est un besoin pour nous tous, y compris les pouvoirs publics». Mais la presse n’étant pas sans reproche, «il est hors de question que l’on donne une valeur marchande à la délation, à l’insulte et à l’invective».

Guy-Saturnin
MAHOUNGOU