Anciens alliés, l’un président de la République, l’autre gouverneur de la richissime province du Katanga, tous deux membres du PPRD fondé par Joseph Kabila, que Moïse Katumbi quitte en 2015 pour chercher à briguer la présidentielle qui se profilait à l’horizon provoquant une rupture entre eux. Les deux principaux leaders du Katanga se sont, finalement, serrés la main, à l’occasion de la fermeture du forum sur l’unité et la réconciliation des Katangais, dimanche 22 mai 2022, à Lubumbashi, l’une des principales villes du Sud-Est de la République démocratique du Congo.

La cérémonie a eu lieu au cours d’une messe célébrée par Mgr Fulgence Muteba, archevêque de Lubumbashi. A cette occasion, des centaines de personnalités ont assisté à la poignée de main entre Joseph Kabila et Moïse Katumbi, longtemps restés adversaires acharnés. Il faut rappeler que ces deux hommes politiques viennent de passer une longue période de forte tension suite à leurs divergences d’opinions politiques.
Les alentours de la cathédrale Saints Pierre et Paul étaient bondés de monde. Personne ne voulait rater la cérémonie de réconciliation.
Dans la cathédrale, Moïse Katumbi, habillé en chemise blanche, avait pris place à droite de l’autel. A gauche, Joseph Kabila, ancien chef de l’Etat, occupait seul une place qui lui était réservée. La messe a duré plus de deux heures. Puis est venu le moment tant attendu.
L’archevêque de Lubumbashi annonce que les deux leaders katangais avaient décidé de poser un geste de réconciliation. Moïse Katumbi s’est avancé alors vers Joseph Kabila. Tout souriants, les deux hommes se sont serrés la main sous une salve d’applaudissements. Après quoi, Joseph Kabila et Moïse Katumbi ont échangé quelques mots.
Autre moment fort, c’est le rite de réconciliation. Les deux hommes politiques se sont lavés les mains dans une bassine d’eau, symbole d’un nouveau départ. Cette cérémonie s’est déroulée à la fin de la messe sur le parvis de la cathédrale, en présence de tous les chefs religieux et des curieux.
Enfin, tous ont partagé un repas, où Joseph Kabila s’est adressé aux jeunes les appelant à faire le suivi des recommandations du forum, car dit-il, la cérémonie de ce jour vise plus l’unité du Katanga. Les participants au forum ont aussi recommandé la libération des Katangais arrêtés pour leurs opinions politiques.
Moïse Katumbi est perçu par certains comme le principal adversaire de l’actuel président Félix Tshisekedi alors que l’éventuelle candidature de Joseph Kabila au scrutin de décembre 2023 fait débat. En effet, la Constitution ne précise pas si un ancien chef d’Etat peut se représenter des années plus tard.
Cette poignée de mains a suscité beaucoup d’émotions parmi les personnes venues assister à la messe de réconciliation.
Pour Me Hubert Tshiswaka Masoka, directeur de l’Institut de recherche en droits humains (IRDH), «c’est une accolade entre deux politiciens qui s’étaient séparés un temps et aujourd’hui, ils se réconcilient pour avoir une vue d’ensemble à l’avenir… Nous sommes au seuil des élections de 2023, il y a un calcul pour aller aux élections et les gagner. Et c’est fort probable que les politiciens fassent des calculs pour reconquérir le pouvoir en 2023».
«Je crois qu’on n’a pas eu tort de donner l’occasion à Moïse Katumbi et à Kabila de se réconcilier parce qu’à travers eux se réconcilient d’autres Katangais, d’autres Congolais et les nations qui ont soutenu Kabila ou Moïse, retrouvent aussi l’occasion de se réconcilier», a indiqué un observateur.
Après sept ans de brouille, les militants des deux hommes se sont félicités de cette réconciliation. Leurs relations s’étaient fortement détériorées après la démission de Moïse Katumbi du PPRD en 2015 pour rejoindre l’opposition. Une défection que l’ancien président ne lui avait pas pardonnée, allant jusqu’à le comparer à Judas Iscariote. Depuis, les deux hommes ne se parlaient plus.

Gaule D’AMBERT