Des plateformes des organisations de défense des droits humains ont animé une conférence de presse sur le délai de détention préventive bafoué par des magistrats. Cette conférence, donnée samedi 5 mars 2022, au siège de l’organisation Cercle uni des droits de l’homme et culture de paix (CUDHOC), à Brazzaville, a été coanimée par Gaspard Mienantima, président du CUDHOC et Trésor Chardon Nzila Kendet, directeur exécutif du Centre d’actions pour le développement (CAD). C’était en présence de Jean Nganga, président de l’Association de promotion et de défense des populations autochtones, Cherotti Mavoungou, président de l’Association pour le respect du droit des population autochtones, du développement durable et du droit de l’homme (ARPA2DH), et d’Innocent Ngueloué, délégué de la plateforme Congo Maison. L’objectif de cette conférence était de dénoncer la violation des formalités procédurales substantielles et légales intentionnellement violées par ceux qui doivent dire le droit, aux fins de confisquer le droit de liberté des détenus préventifs.
Deux cas ont été évoqués à titre d’illustration, pour dénoncer la violation de détention préventive. Deux femmes, arrêtées lors de la célébration de la Journée internationale de la femme, croupissent en prison sans jugement depuis plusieurs mois, alors qu’elles bénéficient de la présomption d’innocence suivant le droit.
La détention préventive pose de sérieux problèmes quant à son applicabilité sur le terrain, ont relevé les conférenciers. Mme Bobette Ngoyo, une femme illettrée arrêtée le 9 juillet de l’an dernier, est écrouée depuis le 19 du même mois à la Maison d’arrêt de Brazzaville. Elle entame déjà son 8e mois dans le milieu carcéral. Elle est en dépassement du délai de détention préventive. Selon la loi, la détention préventive n’est que de quatre mois.
Pour permettre à l’instruction de poursuivre son enquête, il faut une ordonnance de prolongement de deux mois de détention, soit un délai de six mois au total.
Le deuxième cas est celui de Mlle Chancelia Moulounda, étudiante en master 1 à la Faculté des lettres de l’Université Marien Ngouabi, arrêtée le 21 février 2021 et placée à la Maison d’arrêt depuis le 25 février 2021. Elle est déjà à neuf mois de détention préventive sans avoir été entendue par un juge d’instruction.
Dans les deux cas, le délai légal de détention provisoire est épuisé.
Le code de procédure pénale précise, selon les articles 119 et 121, que la détention préventive est une mesure exceptionnelle; elle ne peut excéder quatre mois. A la lumière de ces articles, le principe est d’être libre de tous ses mouvements. Le non-respect de la durée de la détention préventive revêtirait un caractère à durée indéterminée qui ferait disparaître les dispositions légales de l’article 121 pour laisser place à l’arbitraire. Alors que l’article 55 du code pénal, en son alinéa 4, dispose que l’accusé doit être traduit devant la cour criminelle au plus tôt 48 heures après son arrestation par le procureur de la République et au plus tard, à la prochaine session ordinaire.
Les orateurs ont conclu qu’une privation arbitraire de liberté porte gravement atteinte aux droits humains. Aussi ont-ils exigé la libération des personnes qui sont en situation de privation arbitraire de liberté, en soulignant que la liberté est le principe et la privation, l’exception. Une sorte de plaidoyer pour ces organisations de défense des droits humains pour que le ministère de la Justice rende publiques les statistiques liées au milieu carcéral. De la sorte, activistes des droits de l’homme, journalistes et citoyens se feront une idée réelle sur le milieu carcéral du pays.

Philippe BANZ