L’Afrique du Sud et le monde pleurent l’archevêque anglican Mgr Desmond Tutu, qui s’est éteint dimanche 26 décembre 2021, en Afrique du Sud, à l’âge de 90 ans. Suite à son décès, messages de condoléances et hommages se multiplient à travers la planète pour saluer la mémoire de ce personnage mythique et emblématique, qui comme Nelson Mandela a considérablement marqué l’histoire et la vie de son pays. Un deuil d’une semaine a été décrété. Les obsèques du patriarche prévues pour le samedi 1er janvier 2022 au Cap.

Mgr Desmond Tutu était tout aussi vénéré qu’adulé tant en Afrique du Sud son pays qu’à travers le monde. Ses prises de position, ses opinions, son engagement et son combat notamment contre les injustices sociales étaient connus et salués par tous. Il a toujours critiqué les niveaux de violence et de corruption atteints dans le pays. Comme Nelson Mandela, autre figure marquante de la «Nation arc-en-ciel», métaphore qu’on lui doit, le patriarche était devenu le symbole de l’unité du pays. Des décennies durant, il a fustigé avec force la politique ou le système de ségrégation raciale, l’apartheid qui avait profondément isolé l’Afrique du Sud face au reste du monde. «L’apartheid est le mal. C’est le système le plus vicieux inventé par l’homme depuis le nazisme», répétait-t-il dans les années 1980, s’attaquant aux fondements religieux de ce régime.
Plus qu’un serviteur de Dieu, cet homme avec un sens suffisamment élevé de la dignité de la personne humaine a dénoncé les vices; interpellé, alerté et conscientisé ses compatriotes Blancs et Noirs dans ce pays d’Afrique compris dans la partie australe du continent. A l’aube des années 90 qui ont déclenché un nouvel élan en Afrique grâce au vent venu de l’Est désigné sous le nom de la Pérestroïka, Mgr Desmond Tutu s’est distingué parmi les leaders ou guides de leurs peuples, qui ont œuvré d’arrache-pied pour donner à leurs pays une place dans le concert des nations.
A travers l’inoubliable «Commission Vérité et Réconciliation (CVR)», il a conféré à l’Afrique du Sud une marque que le monde entier lui reconnaît aujourd’hui comme palmarès et prouesse dans le cadre de la réconciliation de ses filles et fils. A l’instar des hommes de Dieu, prélats pour la plupart, qui avec courage prophétique et abnégation, ont été impliqués au cœur de la marche de leurs pays et peuples lors des Conférences nationales au tout début de la décennie écoulée comme Ernest Kombo au Congo, Laurent Monsengwo Pasinya en RD Congo ou Isidore de Souza au Bénin, Desmond Tutu a décerné à son pays sa vraie médaille, celle de l’acceptation des uns par les autres, et de vivre un et indivisible même dans la diversité raciale.
Fils d’instituteur et de lavandière ayant grandi à Klerksdorp, à 150 km de Johannesburg, le «prince de la compassion» est le second Sud-africain de l’histoire à se voir décerner un Prix Nobel de la paix, en 1984. Le premier fut remporté en 1960 par le révérend pacifiste Albert Luthuli, alors président du Congrès national africain (ANC).
Lors des émeutes écolières de Soweto, réprimées dans le sang le 16 juin 1976, Desmond Tutu, premier doyen noir de l’Eglise anglicane en Afrique du Sud, avait dénoncé la violence de la police exercée contre des enfants. Il faisait résonner sa voix de pacifiste, usant de l’humour comme d’une arme. L’homme a également longtemps lutté avec la maladie.

Aristide Ghislain
NGOUMA