Ce vendredi 30 octobre 2020, la République rend hommage à Jacques Joachim Yhombi-Opango (décédé le 30 mars dernier en France), dont la dépouille mortelle vient d’être rapatriée. Il était ancien Président de la République (1977-1979) et ancien Premier ministre (1993-1996). Mais c’est l’occasion aussi de rappeler à la mémoire collective qu’il fut un grand dirigeant sportif.
L’Ecole militaire préparatoire Général Leclerc peut s’énorgueillir des jeunes sportifs auxquels leurs enseignants «blancs» avaient ‘’inoculé’’ le venin du sport. Un de leurs protégés, Jacques Joachim Yhombi-Opango, devait d’ailleurs figurer parmi les meilleurs sportifs de sa promotion. Et, jeune enfant de troupe venu droit de Fort-Rousset (actuellement Owando), il défendit brillamment les couleurs de son établissement et du Moyen-Congo aux Jeux scolaires et universitaires d’Afrique équatoriale française (AEF) organisés en 1956 à Yaoundé (Cameroun), en athlétisme, au basket-ball et au volley-ball.
Ces trois sports, Joachim Yhombi-Opango les découvrit au sortir de l’école primaire, ces disciplines ne figurant pas au programme scolaire de l’époque, surtout en milieu rural. Ces sports, comme d’autres, exigent discipline et adresse. Ils lui inculquèrent l’esprit d’équipe.
Jacques Joachim Yhombi-Opango reconnaissait les bienfaits du sport. «Dans la mesure où le sport bien compris forme l’homme, tout l’homme, il pousse l’individu à saisir l’essentiel, l’intérêt général du groupe», disait-il. «A travers le sport, je me sens totalement responsable», affirmait-il encore, ajoutant : «Le sport ne me quittera jamais».
Jeune officier, le capitaine Jacques-Joachim Yhombi Opango étonna en devenant un jour président d’Etoile du Congo football. Dans le bureau exécutif de cette équipe figuraient, outre le lieutenant Denis Sassou-Nguesso comme trésorier, Saturnin Okabé, Kader Diawara, Gongarad Nkoua et Paul Andéli. L’une de leurs plus belles trouvailles fut Jean-Michel Mbono ‘’Sorcier’’ en 1964, selon le témoignage du «bourreau» des Aigles du Mali lors de la finale de la 8e Coupe d’Afrique des nations de football. Ils le firent venir de Pointe-Noire, le débauchant de Dragon.
En 1970, devenu commandant, Joachim Yhombi-Opango créa la sélection de football de l’Armée populaire nationale (APN), constellation des meilleurs joueurs militaires (Jacques Yvon Ndolou, Léonard Essongo, etc.) évoluant dans les clubs civils et de certains meilleurs joueurs civils (Moukila, Minga ‘’Pépé’’, Mbemba ‘’Thorex’’, etc.) ayant accepté d’être enrôlés immédiatement dans l’Armée. «Où veut-il en venir avec cette équipe ?», s’interrogèrent les férus du football. Jacques Joachim Yhombi-Opango l’affilia simplement à la Ligue de Brazzaville, puis à la Fédération congolaise de football (FECOFOOT), passages obligés pour pouvoir participer au championnat de football d’élite.
Il se révéla un dirigeant ferme dans la prise de décisions et rigoureux dans leur application: «Nous avons essayé à notre manière de donner un coup de fouet aux sportifs, en leur inculquant l’esprit d’abnégation, de dépassement de soi et de sacrifice»
Au moment d’accéder à la magistrature suprême du pays, l’officier supérieur était déjà président du Comité olympique national (1968-1978). Il avait été la cheville ouvrière de la Coupe du monde militaire de football (le tournoi international du Conseil international du sport militaire) organisée en 1973 à Brazzaville, après avoir initié la candidature du Congo. En 1974, en sa qualité de président du Comité olympique, il eut la géniale idée d’imposer le renfort du CARA par les meilleurs joueurs du moment d’autres clubs, pour sa nouvelle campagne en Coupe d’Afrique des clubs champions. L’aventure fut couronnée d’un succès, les Aiglons ayant remporté l’unique titre du Congo dans la plus prestigieuse des compétitions africaines inter-clubs.
Sportif et dirigeant, l’ancien chef de l’Etat a aidé le sport congolais à sortir des mentalités rétrogrades, presque centenaires, qui l’asphyxient, à partir du petit noyau qu’est le club de football et des structures nationales de gestion du sport. Aux autres de suivre l’exemple!

Guy-Saturnin
MAHOUNGOU