D’ici à 2029, la totalité du manganèse gabonais devra subir au moins une première transformation localement, avant de quitter le pays. C’est la décision du gouvernement, afin de créer des emplois et faire un pas de plus vers le développement industriel du pays. Le Gabon est le deuxième producteur mondial de manganèse, un minerai extrait essentiellement par le groupe français ERAMET, qui transforme une petite partie du minerai sur place.
ERAMET dispose d’unités de transformation aux Etats-Unis, en Norvège, en France, mais aussi, sur place, au Gabon. Cette transformation est chapeautée par sa filiale COMILOG (détenue en partie par l’Etat gabonais), qui dispose de deux usines: le Complexe métallurgique de Moanda et le Complexe industriel de Moanda (CIM), capable de traiter environ 20% du minerai, le reste est exporté brut.
Mais ces unités ne tournent pas au maximum de leurs capacités: l’année dernière, le Gabon n’a exporté que 18 000 tonnes de silico-manganèse, c’est-à-dire moins d’un tiers de ce que peut transformer sur place l’usine d’ERAMET. La demande des autorités peut-elle être satisfaite dans les délais impartis?
Cela s’annonce difficile, assure un expert de la filière qui évoque «une décision à l’emporte-pièce qui nécessite un certain nombre de préalables qui ne sont pas réunis». La difficulté, comme toujours quand on parle de transformation, c’est d’avoir de l’énergie, à un coût qui n’est pas prohibitif et qui ne compromet pas la rentabilité du projet industriel. Or le Gabon fait face depuis une année à de nombreux délestages, faute de capacité énergétique suffisante.
Les miniers tels qu’ERAMET, qui sont présents dans le pays, ont-ils les reins assez solides pour débloquer les investissements nécessaires à la transformation de tout le minerai sur place? Certains analystes en doutent.
ERAMET ne s’est pas prononcé sur le défi que représente l’annonce des autorités gabonaises, mais a assuré rester «attentif à la mise en œuvre de cette orientation politique».
Les investissements nécessaires seront-ils à la portée des industriels présents au Gabon tels qu’ERAMET, le chinois CICMHZ (Compagnie industrielle des mines de Hangzhou) ou encore l’entreprise Nouvelle Gabon Mining (NGM), filiale du groupe indien Coalsale Group, d’autres acteurs du manganèse? Les analystes en doutent.
Seul le cours de l’action d’ERAMET a immédiatement réagi à la baisse. Le prix du manganèse lui n’a pas été ébranlé: 90% est utilisé pour fabriquer des aciers. Le minerai est donc suspendu aux éventuelles perturbations dans ce secteur, plus qu’à une annonce qui devrait être mise en œuvre en 2029, selon un analyste.
A long terme, en revanche, le marché pourrait être perturbé si le Gabon n’arrive pas à attirer les investissements nécessaires. Le pays produit environ 20% du manganèse mondial, et toute tension dans la filière locale peut avoir des conséquences.

Gaule D’AMBERT

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