La communauté internationale a célébré le 17 avril 2022 la 32e Journée mondiale de l’hémophilie sous le thème: «Associer votre Gouvernement, faire des troubles héréditaires de la coagulation une composante de votre politique nationale». Au Congo, le centre national de référence de la drépanocytose ‘‘Antoinette Sassou Nguesso’’, unique structure congolaise pour le moment de prise en charge des maladies hémorragiques (Drépanocytose et hémophilie), a organisé du 12 au 16 avril des journées portes ouvertes sur cette pathologie et les autres maladies liées au sang.

Le centre que dirige le Pr Alexis Elira Dokekias hématologue a voulu à travers ces journées sensibiliser l’opinion sur l’existence de la maladie et de ses manifestations. Pour l’OMS, cette journée a pour but d’aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences qu’ils ont pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique.

Jean Paul Léonard Ngoukoulou
Jean Paul Léonard Ngoukoulou

Encore méconnue, l’hémophilie est une anomalie héréditaire de la formule sanguine, caractérisée par un déficit en coagulants plasmatiques entraînant une prédisposition aux hémorragies.
Rencontré aux journées, le président de l’Association congolaise des hémophiles (ACH) Jean Paul Léonard Ngoukoulou a indiqué les nuances entre l’hémophilie et la drépanocytose. «Ces deux maladies sont congénitales liées au sang. A la différence que chez le drépanocytaire, son globule rouge manquant d’oxygène provoque des complications et autres effets. Par contre pour l’hémophilie, c’est une protéine qui procède à la coagulation qui est déficitaire», a dit le président de l’ACH.
Maladie très invalidante, l’hémophilie se caractérise par des saignements prolongés suite à des blessures ou traumatismes même mineurs. Ces saignements surviennent généralement dans les muscles et les articulations principalement aux chevilles, genoux et hanches. Cela peut provoquer des raideurs et des déformations pouvant aboutir à la paralysie. De même, les complications de cette maladie entraînent des compressions nerveuses, des accidents vasculaires, l’anémie parfois sévère et le décès.
La personne touchée par l’hémophilie présente depuis le bas âge certains signes cliniques entre autres, l’hémorragie lors de la circoncision, saignement de la bouche au niveau des gencives lors des brossages, de la langue, du voile du palais, du nez, l’apparition fréquente des ecchymoses (bleu) et bien d’autres.
Les filles sont très rarement concernées par cette maladie. Elle se transmet par le chromosome X où se situent les gènes incriminés. N’ayant qu’un exemplaire de ce chromosome, les garçons sont systématiquement malades dès lors qu’ils héritent d’un gène muté. A l’inverse, les filles possédant deux chromosomes X ne sont malades que si elles héritent de deux chromosomes malades, ce qui est extrêmement rare.
L’hémophilie ne se guérit pratiquement pas. Elle se contrôle bien grâce aux traitements substitutifs. Ces traitements consistent à injecter au patient, par voie intraveineuse, des facteurs de coagulations fonctionnels. Ces facteurs peuvent être dérivés du sang humain ou d’autres facteurs génétiques.
Au Congo, en dépit de la rareté de la maladie, les foyers de concentration se trouvent dans trois principales villes Brazzaville, Pointe-Noire et Dolisie. Sur la centaine des cas répertoriés en 2021, près de la moitié concerne les enfants de moins de 15 ans.
Le président de l’ACH plaide pour un appui conséquent de la part du Gouvernement parce qu’à partir de la fin de décembre 2022, la Fédération mondiale de l’hémophilie ne subventionnera plus les médicaments destinés au traitement substitutif des hémophiles. Ces médicaments coûtent très chers, il est difficile pour des familles d’y faire face. Une boîte coûte 107.942 F.cfa pour le facteur VIII, pour Emcizumab (hemlibra) la boîte est à 1.636.862 F.cfa. «Les enfants sous régime prophylactique pourront ainsi à nouveau être exposés aux complications hémorragiques spontanées et potentiellement mortelles», a déploré entendre J.P Léonard Ngoukoulou.
L’ACH a été mise en place en 2016 grâce à l’implication du Pr Elira Dokékias et du Dr Olivia Firmine Galiba Atipo-Tsiba. Elle a pour missions d’accompagner la communauté, les patients atteints d’affections hémorragiques, en particulier les hémophiles, leurs familles et promouvoir l’information, la sensibilisation, la prévention prim-aire et secondaire de ces affections. L’ACH a plusieurs partenaires dont l’Alliance francophone pour l’accès au traitement de l’hémophilie.

E.M.-0