Archevêque de Brazzaville, Mgr Anatole Milandou nous a accordé une interview exclusive dans laquelle il souligne que son message de Noël (page 11) est un cri de douleur par rapport aux propos haineux, mensongers et diffamatoires injectés sur les réseaux sociaux. Des propos qui ont désorienté, troublé et blessé beaucoup de monde dans l’archidiocèse et au-delà.

* Mgr, votre message de Noël est un cri de douleur, dites-vous: pourquoi?
**Oui, un cri de douleur! Parce que les chrétiens de l’Archidiocèse, les prêtres et moi-même, avons souffert des propos haineux, mensongers et diffamatoires qui ont été injectés dans les réseaux sociaux. Ils ont désorienté, troublé et blessé beaucoup de monde. Depuis longtemps, beaucoup d’écrits diffamatoires circulent sur les réseaux sociaux. Souvent, nous préférons nous taire pour ne pas donner de l’oxygène à ceux qui en ont fait leur passe-temps. Mais cette fois-ci, ils ont scandalisé et choqué du monde! J’ai donc pensé réagir parce que beaucoup nous reprochent de garder le silence. Je me trouvais en France quand ces écrits ont commencé à circuler dans les réseaux sociaux. D’anciens séminaristes indignés et révoltés par ces médisances sont venus à ma rencontre; des médisances apparemment colportées par les prêtres eux-mêmes.

*Vous insistez sur la lumière de la paix dans l’archevêché. Prêtres et Laïcs sont dans le trouble: savez-vous pourquoi cette agitation en ce moment précis? Et qui l’orchestre?
**Je me pose moi-même la question sur l’origine de cette agitation. Je ne connais pas celui qui l’orchestre, puisqu’il se cache sous un faux nom. De la sorte, il lui est commode de déverser tout le mensonge et cracher toute la haine qu’il veut. Le Pape François qualifie ce genre de mensonge de mensonge terroriste. Je ne nie pas les problèmes qui peuvent exister dans mon diocèse, comme dans n’importe quelle autre organisation de ce type. Ce qui est troublant ici, c’est le caractère mensonger des propos. Je prends un exemple: nous nous sommes rendus en Suisse, on a écrit que nous sommes allés y chercher de l’argent que nous y avions caché. C’est pourtant la première fois que je mettais le pied en Suisse, et nous nous y sommes rendus pour prendre part à un atelier interconfessionnel initié par la Conférence des Evêques de la RD Congo sur la prévention des conflits dans la Région des Grands Lacs et en Afrique Centrale. Les participants provenaient de tous horizons: il y avait des Imams, des Pasteurs, des Evêques. Il y avait même le Cardinal Fridolin Ambongo, Archevêque de Kinshasa; le Cardinal Dieudonné Nzapalaïnga de Bangui était attendu; il n’a pas pu venir pour cause de maladie. La délégation du Congo-Brazzaville était composée du Pasteur Edouard Moukala, président de l’Eglise évangélique du Congo, de la Pasteure Nelly Foutou, de l’Abbé Mesmin et de moi-même. Il faut donc avoir une mémoire diaboliquement fertile pour enfanter des mensonges autour d’un tel événement, et le transformer en un vil acte de transaction financière! Ces deux grands mensonges: celui d’être parti chercher de l’argent en Suisse et celui de faire de moi un franc-maçon me troublent beaucoup. Je me demande jusqu’ici quel est le but recherché et quelle idéologie sous-tend ces racontars.

*Vous réaffirmez la nécessité d’une vie de cohérence au sein du clergé: la formation est-elle suffisamment pensée pour répondre aux défis pastoraux et sociaux du moment?
**La formation est une question que nous, les Evêques du Congo, nous avons évoquée à Liambou, à Pointe-Noire, au terme de notre rencontre, dernière retraite spirituelle. C’est un point qui fera l’objet d’une réflexion au mois de mars prochain, avec les formateurs eux-mêmes. Effectivement, les anciens séminaristes scandalisés par tout ce qu’ils ont lu dans les réseaux sociaux sont venus partager ma douleur à Paris. Ils se sont interrogés sur la qualité de la formation reçue par nos prêtres. Les scandales posés ces derniers temps sont tels que nous sommes tombés d’accord sur l’urgence de réfléchir sur la formation dans nos Séminaires.

*Quelle est la résolution la plus urgente à mettre en œuvre pour que la sérénité revienne dans l’archidiocèse?

**Tenant compte de ce que les prêtres m’ont partagé lors des rencontres que j’ai organisées avec eux, et bien que l’année pastorale soit déjà largement entamée, je vais réorganiser la Curie en nommant dans un premier temps un Vicaire général. Mais nous ne devons pas le faire sous la pression des réseaux sociaux. C’est dans ce genre de crise que se repose la question de l’identité véritable du prêtre.

Propos recueillis par
Albert S. MIANZOUKOUTA