Encore un qui, dans les années 1980, a laissé un souvenir impérissable. Qui ne se souvient de cet attaquant au talent incomparable d’homme-orchestre ! Ses incroyables gris-gris ont fait les délices des amoureux du beau football et donné des migraines aux défenseurs qui croisaient son chemin. Pépin Bakékolo dit ‘’Kwakara’’, le fantastique numéro 11 de l’AS Cheminots de Pointe-Noire (1979-1983), a éclaté définitivement aux Diables-Noirs de Brazzaville (1984-1987).

Il savait tout faire sur un terrain : dribbler, accélérer, tirer au but à 25 ou 30 mètres ou encore porter l’estocade sur coup franc. Un joueur hors du commun, un régal pour les yeux. Un personnage attachant aussi, adulé comme jamais par les publics des clubs par où il est passé. Il a forgé sa légende grâce à un geste technique qu’a popularisé bien après lui en Europe dans les années 1990 un certain Jay-Jay Okocha (Nigeria): une roulette du pied droit, puis une feinte de roulette pied gauche complexifiée avec un rapide passement de jambes inversé et, enfin, une feinte de corps (en une fraction de seconde). L’adversaire, désaxé, se retrouvait parfois carrément à terre, comme Bongo ‘’Kallé’’ (Inter Club), un après-midi de juin 1985 (une photo prise par le reporter de La Semaine Africaine en 1985 a immortalisé cette action). Le public, subjugué, a baptisé ce dribble «36e phase», avant de le consacrer «drible du siècle».
La carrière de ‘’Kwakara’’ est celle de tous les footballeurs. Elle s’est déroulée entièrement dans la rue et sur les terrains vagues. Il est donc pur produit de ce curieux football appelé «foot-pelote» ou «mwana-foot». Au sein du FC Lombric de Mfilou, d’abord, de Chatler de Moungali ensuite.
Son talent éveille des appétits des clubs d’élite. L’AS Cheminots de Pointe-Noire s’assure le premier ses services en 1979. Il y est aux côtés de surdoués de la Côte que sont Kambou ‘’Chikito’’ et Bongo ‘’Barabas-Bouger’’. Pour des répertoires en dents de scie. Il remporte néanmoins la Coupe du Congo 1982.
Cinq ans après, ‘’Kwakara’’ signe aux Diables-Noirs. Il est maintenant moins folklorique et de plus en plus collectif. Une marque imposée par l’entraîneur Maurice Ondjolet lors du passage de ce dernier sur le banc des ‘’Jaune et noir’’.
En 1985, ‘’Kwakara’’ est maître à jouer de l’équipe nationale à la Coupe de l’UDEAC à Libreville. L’image gravée dans les mémoires reste celle du reporter Jean-Gilbert Foutou ayant perdu sa voix d’émotion, presqu’au bord des larmes de joie, décrivant les péripéties de l’action du penalty qu’offre Bakékolo aux Diables-Rouges et à Kouvouama ‘’Nis’’, face au Cameroun, et qui propulse le Congo en finale.
En 1986, Bakékolo fait un championnat éclatant avec les Diables-Noirs qui font course en tête au classement sous sa férule. Tout se termine, hélas, en lambeaux… à trois journées de la fin!
Début janvier 1987, les quatre buts inscrits par Bakékolo ‘’Kwakara avec l’équipe nationale et les Diables-Noirs face au SC Bastia de France en tournée hivernale au Congo, marquent le sommet d’une carrière. Il n’avait plus rien à prouver d’où son aventure européenne.
Pépin n’a joué malheureusement que dans de modestes clubs français de Ligue 2 et de Ligue 3 : CO Le Puy (1987-1989), SR Saint-Dié (1989-1990) où la presse locale l’a surnommé le «Fofana de Saint-Dié», et EDS Montluçon (1990-1992), son dernier club professionnel.
Aurait-il pu faire encore mieux ? Bakékolo n’a «pas d’aigreur». Il s’est «bien amusé» et restera un symbole de virtuosité africaine.

G.-S.M.