La rencontre à Brazzaville des secrétaires et gestionnaires des Conférences épiscopales des six pays de la région autour du secrétaire général de l’Association des Conférences épiscopales de la région de l’Afrique centrale (ACERAC) en novembre 2020; le remède qu’il a mis au point pour soulager les malades atteints du coronavirus; le Cardinal Christian Tumi enlevé brièvement par les séparatistes dans la partie anglophone du Cameroun sont parmi les sujets que notre rédaction évoque dans cet entretien avec Mgr Samuel Kleda, archevêque de Douala, au Cameroun. Il a séjourné à Brazzaville il y a quelques mois, à l’occasion de la retraite annuelle des évêques du Congo dont il a été le prédicateur. A l’instar du défunt Cardinal son père spirituel et prédécesseur, le prélat est connu pour son franc-parler.

*Mgr, en dehors de la retraite, avez-vous parlé avec vos confrères évêques des enjeux liés à l’Eglise de la sous-région?
**Pour nous quand nous parlons d’enjeux en tant qu’évêques c’est l’évangélisation, comment mieux annoncer Jésus-Christ dans la sous-région en ce temps de crise sanitaire, économique, sociale, politique. Nous avons effectivement cherché ensemble comment annoncer Jésus-Christ aujourd’hui dans ce contexte-là. Voilà pourquoi le thème de la retraite était: «La nouvelle évangélisation ou comment annoncer l’évangile aujourd’hui dans le contexte qui est le nôtre»? Evidemment dans tout cela quand vous nous voyez, aujourd’hui quand nous nous réunissons, nous ne pouvons pas éviter le sujet qui regarde la santé, la crise sanitaire causée par la pandémie du coronavirus. Nous en avons parlé, j’ai partagé l’expérience de ce que nous faisons au Cameroun. Eux aussi les évêques m’ont parlé de ce que l’Eglise fait ici au Congo contre le coronavirus.
Au Cameroun, j’ai mis au point un traitement contre le coronavirus. Je dirais que la situation est bien contrôlée et à ce niveau je suis ouvert pour faire que le produit ne reste pas seulement au Cameroun. S’il y a des gens à côté, nos voisins qui meurent cela nous touche directement. Voilà pourquoi le thème que nous avons évoqué sur l’évangélisation. Partout nous évêques aujourd’hui nous cherchons comment annoncer l’évangile de telle sorte qu’il soit accueilli par tous les fidèles, faire que l’évangile permette à chaque fidèle de répondre à ses aspirations profondes, à être le fidèle et à dire chaque jour oui au Seigneur et en même temps lui donner l’occasion à chaque moment de s’épanouir. Voilà pourquoi l’évangile est un message d’amour, de vie, de paix.

*Votre remède a défrayé la chronique au Cameroun avant d’être reconnu. Quelles stratégies envisagez-vous pour vulgariser ce produit et le rendre accessible au niveau de la sous-région?
**Nous sommes prêts à mettre une stratégie au point mais tout dépend de l’accueil du pays. Les gens d’une région ou d’un pays peuvent demander: donnez-nous le produit! Nous sommes prêts à le faire parce que curieusement aujourd’hui le produit est beaucoup envoyé en Europe, à l’extérieur. Je dirais presque en dehors des pays d’Afrique en général mais en Europe, aux Etats-Unis ou dans d’autres pays. La demande est forte et nous cherchons autant que possible à répondre à l’appel qu’on nous adresse. De ce côté-là il n’y a pas de problème. Si un pays ou des groupes de personnes dans un pays demandent le produit, nous le préparons et nous le mettons à disposition.

*Parmi les demandeurs est-ce qu’il y en a qui s’en sont trouvés guéris? Avez-vous des statistiques?
**Le problème aujourd’hui ne se pose plus sur l’efficacité du produit pourquoi parce que dès le début, dès le mois de mars 2020 quand le coronavirus a commencé à attaquer puis infecter les gens, nous avons mis le produit au point. Depuis ce moment, nous soignons les gens. Aujourd’hui avec les personnes qui ont pris le produit nous arrivons au mois à 12 000 personnes que nous soignons et qui sont guéries. Le produit a été analysé, il n’est pas toxique, il répond tout à fait, il n’y a pas d’effets secondaires. Je tiens à dire que pour nous Eglise du Cameroun c’est notre manière d’évangéliser, de prendre la personne en charge. C’est ce qui fait que jusqu’à présent, au moins à l’intérieur du pays nous donnons le produit gratuitement, nous ne demandons rien. Comme le Seigneur nous a dit: «Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement»! L’argent pour fabriquer le produit, beaucoup d’hommes d’affaires, beaucoup d’amis m’en donnent.

*Etes-vous soutenu aussi par les gouvernants?
**Pour le moment non! Ceux que nous avons ce sont les particuliers, ceux des sociétés qui nous ont aidés, mais pas des Etats qui se sont engagés. Du Cameroun, le gouvernement a quand même demandé d’analyser le produit. Cela coûte cher, c’est sa participation. Et d’ailleurs il a été analysé dans nos structures.

*Vous êtes membre du Conseil d’administration de l’hôtel de l’ACERAC. Où en êtes-vous aujourd’hui dans la gestion de cet édifice?
**L’hôtel notre siège a connu à ses débuts beaucoup de problèmes mais nous nous sommes mis au travail. Nous avons pris les choses en mains pour résoudre ces problèmes. Par exemple pour le problème de construction; il fallait restaurer certaines parties endommagées par les pluies, par d’autres intempéries. Nous avons même fait appel au constructeur chinois, il nous fait le travail et nous-mêmes au niveau de la gestion nous avons pris le temps de former notre personnel, nous avons réussi à le faire avec un hôtel au Cameroun. Depuis au moins une année l’hôtel est en mesure d’accueillir beaucoup de personnes et je dirais que l’hôtel fonctionne normalement. Nous sommes très contents parce que nous sommes en train de réussir à équiper totalement l’hôtel sans avoir pris de crédit. Ce qui fait que les entrées aujourd’hui nous permettent maintenant d’équiper l’hôtel et nous restons libres, nous ne devons à personne. Nous sommes vraiment fiers de cela et l’hôtel aujourd’hui les gens peuvent aller y loger, il y a des salles de rencontres, des chambres de luxe et des suites. Avec le coronavirus nous avons été un peu bloqués mais maintenant cette phase est en train de passer et nous nous estimons très heureux pour l’avenir de notre hôtel. Et nous en rendons grâce au Seigneur.

*Un mot sur les préparatifs de la prochaine Assemblée plénière de l’ACERAC ?
**Comme vous le savez, les rencontres n’ont pas encore repris comme tel. Les secrétaires se sont réunis sur la question il y a quelques mois. Je crois que d’ici peu toutes les Conférences épiscopales seront informées exactement du thème et comment l’Assemblée va se dérouler. Le lieu c’est la Guinée équatoriale. Nous espérons qu’en juillet prochain tout sera prêt pour nous réunir et partager nos différentes expériences pastorales.

*Vos deux mandats à la tête de la Conférence épiscopale nationale ont été caractérisés par votre engagement sur des questions parfois brûlantes. Le Cameroun venait de tenir des élections régionales alors que la crise dans les régions anglophones perdure. Comment l’Eglise du Cameroun s’y prend-elle?
**J’ai été président de la Conférence épiscopale pendant deux mandats et autant que possible nous avons essayé d’annoncer l’évangile c’est-à-dire la vérité de l’évangile. Mais les gens disent que j’ai un langage un peu dur, qu’à cause de mon franc-parler je suis un opposant. Il faut comprendre les choses; nous avons reçu une mission, celle d’annoncer l’évangile avec toutes ses exigences. Si l’évangile dit: annoncez ceci, moi en tant que pasteur j’ai le devoir de l’annoncer, que cela plaise ou non. C’est l’évangile que j’annonce, ce n’est pas ma parole. Je ne peux pas non plus parler en cachant des vérités par convenance. Pour moi il m’est impossible de ne pas dire la vérité, donc nous avons essayé d’aider pas dans le but de détruire quoi que ce soit mais de construire à partir de la vérité. On ne peut pas construire avec le mensonge, cela il faut le savoir.
Nous avons eu des moments difficiles, la crise dans les deux régions anglophones du pays. Nous avons eu même l’assassinat d’un évêque, tout cela pour ma part j’ai essayé d’y répondre selon la vérité de l’évangile. Je suis sûr que peut-être les gens ont dit voilà l’opposant. Mais aujourd’hui on se rend compte que jusqu’à présent ce qui devrait être fait pour résoudre tel ou tel problème n’a pas encore été fait. Voilà pourquoi nous sommes toujours au point de départ sur certains sujets pourtant brûlants. Mais je voudrais dire une chose, que l’Eglise est là pour dire la vérité, pour construire; l’Eglise n’est pas un parti politique ou un parti d’opposition, l’Eglise a un message à annoncer et elle n’annonce que ce message, cette vérité de l’évangile. Je crois que les choses évoluent et nous prions pour les problèmes au Cameroun et que tout aille bien.

*Le Cardinal Christian Tumi a été brièvement enlevé par les séparatistes…
**Effectivement le Cardinal allait dans son village et malheureusement il a été pris par les combattants, ceux qui réclament l’indépendance. Il est resté avec eux plus de 24h et il a été libéré. C’est regrettable qu’un homme de 90 ans de surcroît un prêtre, un évêque, un Cardinal soit pris par des bandits ou par des rebelles, des gens qui ont des revendications à faire, ce n’est pas normal. Nous sommes en Afrique, on devrait respecter les personnes d’un certain âge.

Propos recueillis par
Aristide Ghislain NGOUMA et Destin BIKOUTA