C’est le thème d’une thèse de Doctorat unique de la formation doctorale à la Faculté des lettres, arts et sciences humaines, présentée et soutenue par M. Ghislain-Roch Etsan, lundi 17 mai 2021 à Brazzaville. Pour laquelle, il a été déclaré admis avec mention : Très honorable. Sous la direction de Joseph Tonda (président), Pr à l’Université Omar Bongo du Gabon. Avec comme membres, Patrice Yengo, Pr à l’Ecole des Hautes études en Sciences Sociales (France), (rapporteur externe), du Pr Joseph Itoua (rapporteur interne), de Julien Bambi, Maître de Conférences (Examinateur) et de Régine Tchikaya Oboa, Maître de Conférences (Directrice de thèse), tous les trois venant de l’Université Marien Ngouabi.

Comptant 396 pages, subdivisés en trois parties: 1) la culture démocratique et personnalisation du pouvoir; 2) Démocratie, culture politique et conflits armés; 3) Culture démocratique, personnalisation du pouvoir et conflits armées, la présente étude montre que la République du Congo a connu, peu avant les indépendances, la démocratie pluraliste, notamment avec comme composante le multipartisme. La pratique politique a conduit au conflit armé de 1959 et à la révolution des 13, 14, 15 août 1963, le multipartisme fut condamné au profit du monopartisme jugé comme gage de l’amitié et de l’unité nationale. Le Congo expérimenta ainsi la démocratie populaire jusqu’à la Conférence nationale souveraine du 25 au 10 juin 1991. En effet, la démocratie pluraliste a été réinstaurée. Durant cette expérience démocratique, les élites (acteurs politiques et intellectuels) reconnaissent le peuple comme seul détenteur du pouvoir qui le délègue à travers des élections transparentes et équitables. Mais, cependant, ces élites n’ont pas changé de culture politique, la culture politique est restée celle du monopartisme. Elles ne représentent que leurs intérêts, ceux de leurs ethnies, de leurs régions (départements).
Cette culture démocratique des élites poursuit Ghislain-Roch Etsan n’a rien avoir avec la tradition africaine en général, congolaise en particulier d’une part qui véhicule les valeurs d’hospitalité, de partage, d’amour, de solidarité, où les normes ne sont pas écrites mais respectées. D’autre part, elle n’a rien avoir avec la culture occidentale où les acteurs respectent les principes démocratiques. C’est dire que la culture démocratique des élites congolaises relève de la tradition africaine réinventée et de la culture démocratique occidentale manipulée à leurs guides à des fins égoïstes.
Au terme de ce travail, il sied de retenir que depuis les indépendances, les africains en général et les Congolais en particulier ont mis en pratique les modèles de démocratie libérale et populaire empruntés aux pays d’Europe occidentale, orientale et à la Chine. Au lendemain des indépendances, la République du Congo a fait l’expérience de la démocratie pluraliste. La démocratie populaire ou le monopartisme a été instauré en 1964 jusqu’à la tenue de la Conférence nationale Souveraine du 25 février au 10 juin 1991 qui a permis au Congo de renouer avec la démocratie pluraliste.
Pour arriver au monopartisme tout comme au multipartisme, un débat s’était instauré dans le pays. Quant à la question du respect des principes, les élites ont affirmé que pendant la première expérience démocratique et le monopartisme, les principes démocratiques comme l’égalité, la liberté, la justice, le respect de chaque personne et de la vie de chaque citoyen n’ont pas été respectés. La Révolution des 13, 14, 15 août 1963 n’a pas résolu les problèmes des populations, mais plutôt assouvie les intérêts de quelques dirigeants. Les Constitutions qui ont régi les rapports entre les différents pouvoirs et les rapports entre les pouvoirs et les citoyens n’ont pas été respectés. L’argument maintes fois évoqué, est le fait que les Constitutions africaines sont fondantes parce qu’elles ne répondent pas aux réalités africaines.
Pour la deuxième expérience de la démocratie pluraliste post-Conférence nationale souveraine, il est à retenir que les élites reconnaissent que la démocratie est une culture politique qui reconnaît comme seul détenteur du pouvoir, le peuple. Elles admettent aussi que la démocratie est universelle, et a pour principes : le multipartisme, les libertés, le règne du droit, l’équilibre des pouvoirs, l’alternance au pouvoir, etc. En somme, les prétendus ‘’démocrates’’ ne traduisent pas dans leur comportement, les valeurs démocratiques qu’ils prétendent défendre. Du respect de la Constitution, il est à noter que les lois et règlements de la République sont violés par les gouvernants. Cette thèse constitue un ensemble très riche pour les sciences politiques en Afrique et pour l’étude du phénomène de démocratie en République du Congo. Mais, au sortir de cette analyse de nombreuses interrogations restent posées qui constituent de nouvelles pistes de recherches…

Alain-Patrick
MASSAMBA